C’est le moment d’acheter VOTRE APPARTEMENT

Bientôt la fin de la TVA réduite… c’est le moment de devenir propriétaire. Voilà le calcul qu’ont fait certains d’entre nous ces derniers mois. Mais au-delà du changement législatif qui a pu accélérer les choses, le marché des appartements se porte plutôt bien. Et ça ne fait que commencer.

Pour les acheteurs, le compte à rebours a commencé : plus que trois semaines pour profiter de la TVA réduite sur l’achat d’un bien immobilier neuf. En effet, à partir du 1er janvier 2011, la législation belge change. La vente de terrains devient soumise à la TVA, alors qu’aujourd’hui les frais d’enregistrement sur les terrains est de 12,5 % pour la Wallonie et Bruxelles. Autre mauvaise nouvelle pour les acheteurs, c’est la fin de la TVA réduite à 6 % sur la première tranche de 50 000 euros ! Désormais, elle sera à son taux normal de… 21 %.

Les conséquences de cette nouvelle fiscalité sont difficiles à prévoir. Selon certains experts, elle devrait faire augmenter le prix des appartements neufs de 2 à 3 %. Ça peut paraître faible, mais d’après Immobel cette mesure va alourdir la facture de façon non négligeable : pour l’achat d’un appartement neuf de 325 000 euros, prévoyez 20 100 euros en plus s’il est situé à Bruxelles, et 12 600 euros en plus s’il est en Wallonie. D’autres prévoient plutôt un refroidissement du marché, avec la diminution des transactions pendant 3 à 6 mois.

Les acheteurs potentiels se précipitent-ils pour autant sur l’acquisition d’un bien avant la date fatidique ? Les notaires sont unanimes, ils ont un travail accru depuis quelques semaines : les acheteurs veulent signer l’acte de vente à temps. De là à penser que des achats d’appartement soient réalisés en prévision du changement de législation, rien n’est certain. Damien et sa femme sont mariés depuis six mois, et ils viennent d’acheter un appartement de 130 m2 à Schaerbeek.  » C’est en cherchant un appartement à vendre qu’on a appris, par les professionnels, que la TVA allait augmenter ! Pour nous, ça n’a donc rien changé, on n’était pas au courant… Mais c’est sûr que si je n’avais pas encore acheté cette mesure aurait précipité mes démarches. « 

Quel que soit le rôle de la fin de la TVA réduite dans l’acquisition d’un logement, les professionnels sont formels : le marché de l’immobilier en général se porte bien. Selon le Baromètre des notaires, en novembre 2010, les transactions immobilières ont augmenté de presque 9 % par rapport au même mois de l’année précédente.  » Il y a plusieurs explications à ce dynamisme, qui concerne tous les biens immobiliers, appartements compris, explique Bart Van Opstal, président de la Fédération royale du notariat belge. Le prochain changement de législation concernant la TVA joue sûrement. La fin de la TVA réduite et la TVA applicable sur les terrains vont faire grimper la facture, en particulier pour le neuf. Mais l’autre critère important, ce sont les taux d’intérêt, historiquement bas : c’est le moment de contracter un emprunt. L’inflation est à environ 3 %, et les livrets d’épargne classiques rapportent moins que ça. Les particuliers ont vite fait le calcul : il est bien plus rentable d’investir dans la pierre. D’autant que, depuis la crise, les personnes qui ont un peu d’argent de côté ne font plus confiance aux produits financiers. « 

Ce dynamisme général concerne tous les biens immobiliers. Mais les appartements ont la cote à Bruxelles et dans les villes wallonnes. Pour Philippe Rosy, associé gérant chez Engel & Völkers, agence immobilière spécialisée dans le haut de gamme, c’est un tournant assez récent en Belgique :  » Bruxelles a été pendant très longtemps une ville sans appartements. Tout le monde voulait sa maison unifamiliale. La mode commence dans les années 1920, avec le Résidence Palace, rue de la Loi. Un immeuble avec concierge, portier, courts de tennis, piscine… Les classes dirigeantes ont alors le sentiment qu’un appartement n’est plus un sous-logement ! Peu à peu, cette nouvelle perception se diffuse dans toute la société… Mais la Belgique reste en retard par rapport à l’Europe : à Bruxelles, il y a des rues entières sans immeubles, avec seulement des maisons ! Vous ne verrez jamais ça à Paris. « 

Baby-boomers et jeunes mariés recherchent appartement

Ce changement de mentalité qui rend peu à peu l’appartement acceptable au milieu du xxe siècle s’accélère aujourd’hui sous l’influence d’une tendance démographique : l’arrivée des baby-boomers à l’âge de la retraite. Les notaires de Wallonie soulignent l’importance du  » retour à la ville « , en appartement, des personnes nées dans les années 1950-1960. Le parcours de vie est souvent le même : elles ont acheté ou fait construire une maison dans les années 1980, sur plusieurs étages, avec un jardin. Aujourd’hui, les enfants sont partis, la maison est devenue trop grande, les escaliers sont fatigants, le jardinage est perçu comme une contrainte, les frais d’entretien sont trop élevés par rapport aux revenus… Jean-Louis Jeghers, notaire à Liège, le confirme :  » L’élément financier est décisif dans le choix d’acheter un appartement : les frais d’entretien sont incomparables. C’est aussi plus pratique, plus confortable… Mais cela a toujours été vrai ! Alors que l’ampleur du retour à la ville est relativement récent, il date d’une dizaine d’années. Il faut dire que la situation économique générale n’est pas brillante. Les villas ont perdu leur attrait, certaines sont d’ailleurs difficiles à vendre.  » Les personnes âgées d’une soixantaine d’années qui quittent leur maison constituent environ un tiers des acheteurs. A Namur, à Liège, à Waterloo, les agents immobiliers observent partout l’intérêt de cette population pour les appartements.

L’autre profil très fréquemment rencontré est celui du jeune couple : avec l’augmentation du prix des maisons, les appartements sont devenus les seuls biens immobiliers accessibles pour un premier achat. Ils constituent la majorité des clients de Jean-François Piancatelli, directeur commercial de la société Etienne Piron, un promoteur immobilier qui développe actuellement des projets dans la région liégeoise :  » Les jeunes ménages forment environ 40 % de ma clientèle. Ils peuvent avoir un bel appartement neuf pour environ 200 000 euros, alors qu’il faut compter au moins 300 000 euros pour une maison. Leur achat sera remboursé en vingt ans, et ça sera rentable même s’ils décident de le revendre avant pour acheter une maison. « 

Parfois, le budget est là, mais les appartements restent malgré tout plus attrayants : Damien et sa femme auraient pu acheter une petite maison en ville. Dans ce cas, pourquoi avoir privilégié l’achat d’un appartement ?  » Nous avons acquis un duplex de 130 m2. Pour le même prix, la même surface, il existe des maisons dans certains quartiers de Bruxelles, c’est sûr, mais elles sont sombres, étriquées, en mauvais état… Il faut rajouter le prix des travaux, et aussi le temps que ça prend ! C’est beaucoup plus contraignant. « 

L’appartement en Brabant wallon : un bien convoité

Appartement moyen-haut de gamme pour les baby-boomers, appartement plus accessible pour les jeunes couples : la demande est là. Mais elle n’est pas la même partout. Dans les endroits les plus prisés, elle se traduit par une augmentation des prix. Selon le Baromètre des notaires, au 3e trimestre de l’année 2010, les prix des appartements sur le territoire belge ont plutôt eu tendance à diminuer légèrement. Cette baisse est surtout liée aux prix des appartements en Flandre et à Bruxelles (-1,7 %). Comptez en moyenne un peu moins de 200 000 euros si vous souhaitez acheter dans la capitale. En Wallonie, en revanche, les prix ont augmenté de 5,2 % par rapport au trimestre précédent : le prix moyen d’un appartement dans la région se situe autour de 152 000 euros. Cette hausse est surtout vraie dans le Brabant wallon (11,7 %) et dans la province de Liège (7 %).  » Il ne faut pas surestimer ces variations de prix, insiste Bart Van Opstal. En général, malgré les évolutions d’un trimestre à l’autre, elles s’équilibrent sur l’année.  » Le président de la Fédération royale du notariat rappelle que le phénomène s’est observé à Bruxelles au début de cette année : il y a eu une très forte hausse des prix, suivie d’une baisse.

Cette précaution prise, la hausse de près de 12 % du prix des appartements en Brabant wallon est malgré tout conforme à une tendance observée à la longue, c’est-à-dire l’augmentation de la demande. Le prix moyen des appartements à Bruxelles reste environ 30 % plus cher qu’en Brabant wallon. Du coup, certains jeunes couples, qui n’ont pas un gros capital, y font leur premier achat immobilier. Mais là encore, les jeunes ne sont pas les seuls à s’intéresser au marché des appartements. Et c’est justement la clientèle plus âgée qui tend à faire grimper les prix. Philippe Rosy, de l’agence Engel & Völkers, évoque même un manque d’appartements :  » A Lasne, Waterloo, Rixensart, La Hulpe, on a beaucoup de personnes âgées qui souhaitent quitter leur villa pour un appartement… Mais c’est simple : ils n’en trouvent pas ! « 

La demande s’accroît aussi fortement pour certains quartiers de Bruxelles. Lorsqu’on leur demande un exemple, les professionnels citent tous Flagey.  » C’est l’emblème de ce que l’on appelle l’effet de mode, explique Eric Verlinden, administrateur délégué du groupe Trevi. Il s’y produit le même phénomène que dans le quartier du Châtelain il y a quinze ans ! Avec la rénovation du bâtiment de la RTB, le Belga… Le quartier a changé d’image.  » Selon lui, plusieurs quartiers profitent de cet effet de mode, par exemple à Sainte-Catherine, autour du Théâtre royal flamand, ou à Saint-Josse, entre la maison communale et les institutions européennes.  » Mais il y a aussi les quartiers qui sont très demandés depuis un moment : le Sablon, Montgomery (Woluwe), le Châtelain et Brugmann (Ixelles)… « 

Les immeubles résidentiels, un marché juteux pour les promoteurs

Entre les quartiers à la mode et l’augmentation des prix dans d’autres quartiers il y a quelque temps, l’avis général est unanime : à Bruxelles, la tendance est à la hausse depuis les années 2000. Et cela devrait continuer, voire s’accélérer, car la capitale est en déficit de logements. Selon les estimations du Bureau du Plan, les Bruxellois devraient être plus de 1,3 million dans 50 ans. Autrement dit, il va falloir loger une population qui sera en augmentation d’un tiers : l’enjeu est majeur. Certes, Bruxelles dispose d’une certaine réserve foncière, mais elle n’est pas extensible, et à terme les prix des appartements vont forcément grimper.

Une bonne nouvelle pour les promoteurs. Certains semblent déjà anticiper cette future demande d’appartements. Dans la capitale, les projets immobiliers fleurissent. Il y a par exemple la politique de transformation des anciens sièges sociaux en appartements, comme celui de Solvay à Ixelles, destiné à accueillir des logements de haut standing. Le siège de l’ex-CGER, lui aussi, doit se transformer en complexe mélangeant commerces et habitations. Ces grands projets immobiliers sont en général destinés au résidentiel de luxe. Ainsi, l’ancien siège de BASF, à Uccle, s’apprête à devenir le Parc du Hamoir, une résidence de 52 appartements répartis sur cinq étages. Les logements feront de 100 à 285 m2, tous avec une terrasse de 30 m2 au minimum. Le prix ? Pour un appartement deux chambres, comptez 440 000 euros, hors TVA.

Le Parc du Hamoir n’est pas un exemple isolé. En Wallonie aussi, les promoteurs se dépêchent d’acheter des terrains en vue de grands projets. Le notaire Jean-Louis Jeghers cite le cas de plusieurs nouvelles résidences dans les faubourgs de Liège :  » A Rocourt, à Fléron, au Sart Tilman, plusieurs résidences sont sorties de terre, et, à chaque fois, les appartements les plus chers, entre 250 000-300 000 euros, se vendent très rapidement. Il y a aussi un grand projet immobilier en perspective près de la gare des Guillemins. Rien ne sera construit avant au moins 3-4 ans, mais, en attendant, les maisons se vendent à un prix d’or… J’en ai estimé une à 350 000 euros, elle est partie à 420 000 euros ! Et c’est évidemment un promoteur qui l’a acquise… C’est probable qu’ils rachèteront ensuite les maisons voisines, pour les raser et construire un building. « 

Avec l’accroissement et le vieillissement de la population, le marché des appartements a de beaux jours devant lui. Reste à prévoir aussi des appartements plus modestes et accessibles, peut-être moins attrayants.

FRANCELINE BERETTI

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