Carlos, parce qu’elle le vaut bien

Alexandre Charlier
Alexandre Charlier Journaliste sportif

Onze ans de complicité gagnante entre Carlos Rodriguez et Justine Henin. A la veille de l’US Open, zoom sur le coach de la championne.

Il n’a pas besoin de parler pour s’exprimer. C’est le genre de gars au contact de qui on se sent vite meilleur. Charismatique. Oui, c’est ça… Dur au-dehors, mais tendre au-dedans. Tel est Carlos Rodriguez, un hombre droit, qui a toutes les allures d’un gourou. Un rien secret. Généreux et exigeant. Et toujours fidèle à des valeurs. Onze années qu’il forme avec Justine Henin le couple sportif belge le plus solide et le plus performant qui soit. Une relation d’une force incroyable sur laquelle s’attardent les caméras du monde entier. Sous leurs casquettes, échange de regards incessants entre la championne et son coach. Certains jasent : le coaching est interdit pendant les matchs… Coach ? Carlos est bien plus que cela. Il a dû surmonter bien des obstacles pour accompagner et faire durer Justine au faîte du tennis féminin.

L’union est née en 1996. Justine vient de perdre sa maman un an plus tôt. L’adolescente est fragilisée. Plus qu’un entraîneur, la Rochefortoise trouvera, dans le Sud-Américain, un mentor puis un ami.

Plus qu’un coach, un complice à toute épreuve

Carlos est né en Argentine mais a quitté sa famille et ses proches dès l’âge de 17 ans. Déjà le goût du défi, du risque et du développement personnel. Pas maladroit raquette en main, le teenager taquine la balle jaune en tournoi. D’abord aux Etats-Unis. Puis en France. Il sera assimilé 30e Français au sommet de sa carrière. Mais c’est en Belgique qu’il va bifurquer, trouvant, dans une école de tennis à Gand, en 1988, des conditions idéales pour transmettre art et savoir tennistiques. Vint ensuite une rencontre avec Dick Norman du côté de Waregem. Carlos fait ses armes en aidant le géant flandrien à passer de la 600e aux abords de la 100e place à l’ATP. L’Argentin se fait remarquer de l’autre côté de la frontière linguistique. L’AFT (Association francophone de tennis) lui fait confiance et il passe à la vitesse supérieure en s’occupant de Dominique Monami (pas encore Van Roost). Il y aura aussi Olivier Rochus et un poste de directeur technique à l’AFT (1995-2006).  » Un jour, j’ai reçu un coup de fil du papa de Justine, qui désirait que je m’occupe de sa fille… « , raconte simplement Carlos.

Déjà séduit par la personnalité et la technique de sa petite protégée, Rodriguez ignorait à l’époque que leur union allait s’inscrire dans la légende du sport professionnel.

Trente-cinq titres et 6 grands chelems plus tard, Rodriguez et Justine, eux, sont toujours unis pour le bonheur, très souvent, et le malheur, aussi, parfois. Derrière la silhouette de la championne, il y a une ombre. Des ombres. Rupture avec son père, divorce d’avec son mari Pierre-Yves Hardenne en 2006, blessures, maladies, états d’âme et relations tendues avec  » son  » public. Carlos a longtemps joué les pare-feu médiatiques. Mais Justine devait toujours rebondir.

La famille comme centre de gravité

Rayonnante depuis qu’elle a renoué, cet été, avec son père et sa famille, Justine est aussi au top de sa forme avant d’entamer l’US Open. Carlos Rodriguez sera évidemment là pour l’aider à conquérir un nouveau titre de grand chelem.  » Moi et une équipe de 6 autres personnes « , précise celui qui met aujourd’hui son expérience du coaching au service des entreprises. En effet, depuis peu, il est actif au sein de Nexp, une société veillant au développement dans l’entreprise. La responsable des programmes et du développement marketing du concept n’est autre que son épouse, Elke van Dongen. Elke, discrète  » parce que Carlos veut préserver sa famille « , Elke, la femme de sa vie, rencontrée en 1990,  » avant la rencontre avec Justine… « , qui accepte de lever une partie du voile pour Le Vif/L’Express.

 » Dans la vie comme dans son métier, Carlos est un perfectionniste. En fait, seuls les projets à long terme l’intéressent. Il est à 100 % dans ce qu’il fait. Sa relation avec Justine est très complexe. Ils ont leur complicité. Bien sûr, vivre avec cela n’a pas toujours été facile. La carrière de Justine a forcément influencé notre propre vie de couple. Mais nous avons évolué dans nos relations Mon amitié avec elle est extraprofessionnelle. Nos rapports se sont aussi modifiés au fil du temps… J’aimerais avoir mon mari plus souvent pour moi toute seule, mais je sais les sacrifices qu’il fait. C’est pour plus tard. Certainement…  »

Quand Carlos est de retour au bercail, il oublie fatigue, soucis et agenda pour la plus grande joie de Mateo (4 ans) et de Manuel (2 ans).  » Il se lâche à fond avec les enfants, mais, attention, il se montre aussi très exigeant !  » révèle Elke, qui s’épanouit à nouveau à travers son boulot après une éclipse  » maternelle  » de trois ans. Avec le Just in Team et l’Académie de tennis 6e sens, Carlos Rodriguez sait qu’il y aura une vie après la carrière pro de Justine Henin. Mais pourrait-il reprendre sous son aile une autre graine de champion(ne) ?  » Justine m’a tant donné. Ma famille a fait des sacrifices. Cela me paraît difficile mais, dans la vie, on ne sait jamais… « . l

Alexandre Charlier

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