BD : les auteurs se rebiffent

Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

Les dessinateurs et scénaristes francophones délaissent la planche pour la pancarte : l’année restera marquée par la paupérisation galopante de leur métier. La réaction ne fait que commencer.

Le paradoxe a de quoi faire sourire, ou au moins interpeller: dans un secteur culturel qui a mis des générations à obtenir sa reconnaissance en tant qu’art, les artistes doivent se battre aujourd’hui pour défendre… leur métier. Quand un secteur économique éternue, c’est en effet toute sa masse laborieuse qui se mouche, et la bande dessinée ne fait pas exception, que du contraire. Il y avait déjà, depuis quelques années, dans un marché qui se maintient mais qui affiche tout de même un repli pour la troisième année consécutive, une baisse importante des ventes par volume, et par ricochet, des revenus des droits d’auteur et des avances qui y sont liées.

La mutation numérique a creusé le problème, et menace désormais ce principe très francophone des droits d’auteurs, quand ce ne sont pas les diffuseurs eux-mêmes qui se livrent une guerre même pas larvée (le conflit entre Amazon et Hachette qui s’est achevé en novembre laissera des traces) ou les vitrines des librairies qui disparaissent une à une. La crise plus générale des pouvoirs publics creuse désormais davantage leur tombe : en France, la réforme programmée de la Sécu et de leur régime de cotisations (et chez nous, les coupes claires qui semblent inévitables dans les subventions de la Fédération Wallonie-Bruxelles) achèverait de les paupériser, une majorité des quelque 1500 professionnels recensés en France vivant déjà sous le seuil du revenu garanti…

Grève ou retraite

La première réaction commune s’est tenue au festival de Saint-Malo, en octobre dernier, avec une grève éclair des dédicaces, mais aussi avec la mise sur pied des Etats Généraux de la Bande Dessinée, présidés par Benoît Peeters. Le secteur jeunesse vient lui aussi de se réveiller, avec une manifestation en plein milieu du salon de Montreuil, le plus important du genre. Mais c’est au prochain festival d’Angoulême, fin janvier, que la mobilisation devrait faire nombre et sensation, avec une  » Marche des Auteurs  » programmée le samedi, et à laquelle lecteurs et éditeurs sont invités à se rallier.

La suite ? Un peu de mou obtenu de l’Etat, desdits éditeurs et du reste de la chaîne sur les avances ou les pourcentages consentis (aujourd’hui, sur un album vendu, le ou les auteurs touchent moins d’1 % de son prix de vente…) ou, à défaut, un durcissement du conflit, les uns refusant toute autre activité que leurs planches, les autres les abandonnant définitivement. Ils ont déjà été plusieurs en 2014 à annoncer leur retraite très anticipée.

OLIVIER VAN VAERENBERGH

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