Aux grands maux les grands remèdes

Martens et Dehaene ont usé de thérapies de choc pour provoquer le sursaut. Van Rompuy ne paraît pas en mesure d’enclencher une mécanique aussi brutale.

. les défis – les enjeux

> Sous Martens (1982 -1987). Au sortir des années 1970, la Belgique est  » l’homme malade de l’Europe « . Alors président du PSC, Gérard Deprez rappelle la bande-annonce de cet  » Apocalypse now  » :  » Il fallait affronter trois défis majeurs de front : le dérèglement monétaire, un problème grave de compétitivité des entreprises, des déficits colossaux.  » Les gouffres budgétaires atteignent 15 % du PIB, l’inflation est galopante, le franc belge, chancelant. Le chômage est en plein boom et la sidérurgie, surtout wallonne, en plein naufrage.  » La priorité était de rétablir la compétitivité de l’économie, tout en amorçant la maîtrise des dépenses publiques « , se souvient Philippe Maystadt, ministre PSC du Budget de 1981 à 1985 et des Finances dans les années 1990.

> Sous Dehaene (1992-1997). La compétitivité rétablie et la croissance restaurée, le tendon d’Achille reste résolument budgétaire : la dette publique explose pour culminer à 137 % du PIB. L’assainissement drastique des finances publiques s’impose, sous peine de louper l’entrée dans l’Union monétaire européenne. Les critères de convergence de Maastricht deviennent la bible gouvernementale. L’effort soutenu pâtit d’une sévère récession en 1993, année noire sur le plan économique.

> Sous Van Rompuy (2009- ). La Belgique renoue avec les démons budgétaires. Recettes en chute libre, dépenses sociales à la hausse, taux de chômage record en vue.  » Le défi qui attend Herman Van Rompuy s’apparente davantage à celui relevé sous Jean-Luc Dehaene « , estime Philippe May-stadt. Dans son malheur, Van Rompuy peut s’estimer heureux : l’euro lui épargne des attaques sur le franc belge, l’inflation est quasi nulle, l’économie n’est plus moribonde. Un péril majeur le guette :  » Une remontée des taux d’intérêt serait très problématique sur le plan budgétaire.  » Et un défi périlleux se profile :  » Dans les années 1980, nous n’avions pas cet énorme nuage noir du vieillissement de la population et le coût astronomique qu’il représente « , craint Mark Eyskens, ex-Premier ministre et ministre des Finances CVP.

. les mesures fortes

> Sous Martens. Dévaluation du FB de 8,5 % en février 1982. Suspension automatique des salaires, trois sauts d’index successifs. Le sauvetage de la sidérurgie, qui a coûté 100 milliards de FB (2,5 à 3 milliards d’euros). Des programmes de réduction massive des dépenses publiques.

> Sous Dehaene. Plan global en novembre 1993, de sauvetage de l’emploi et de la compétitivité : blocage des salaires à partir de 1995, instauration de l’index-santé. Privatisation d’entreprises publiques. Liaison du franc belge au Deutsche Mark.

> Sous Van Rompuy. Après le coûteux sauvetage des banques (20 milliards d’euros), quelle thérapie de choc pour le budget ?  » Mis à part des mesures politiquement sensibles dans la sécurité sociale, il ne reste plus grand-chose à rogner sur les dépenses au niveau fédéral. Toucher à la justice par les temps qui courent ? Difficile. La marge de man£uvre est très étroite « , avance un ancien ministre. Point de  » comités de la hache  » en vue, comme jadis. Van Rompuy pourrait se satisfaire de mesures plutôt  » soft  » d’ici à la fin de son mandat en 2011, misant surtout sur des effets d’aubaine : le départ massif de fonctionnaires fédéraux à la retraite (40 % d’ici à dix ans) fera fondre naturellement les effectifs de la fonction publique par un non-remplacement partiel, la prolongation de la vie des centrales nucléaires rapporterait 500 millions d’euros, etc. Au moins l’inflation au taux plancher le dispense-t-elle a priori de toucher à l’index. n

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