Au commencement sera… Cosi Fanciulli !

Barbara Witkowska Journaliste

L’Opéra Fuoco, basé à Paris, monte un opéra-prologue à Cosi fan tutte, d’après un livret d’Eric-Emmanuel Schmitt et sur la musique de Nicolas Bacri. Rafraîchissant !

Rappelons, pour les distraits, le propos du chef-d’oeuvre de Mozart. L’action (d’après un fait prétendument véridique) se déroule dans la région de Naples, vers la fin du XVIIIe siècle. Don Alfonso, un vieux sceptique, met au défi deux jeunes officiers de conserver pendant leur absence l’amour de leurs fiancées. Ceux-ci font semblant de partir pour la guerre mais reviennent un soir déguisés en Albanais et courtisent les demoiselles qui cèdent à leurs avances. Pour finir, ils laissent tomber les masques, à l’extrême confusion des jeunes filles.  » Cosi fan tutte !  » (ainsi font-elles toutes !), ricane alors le vieux Don Alfonso. Pendant longtemps, on a pris Cosi fan tutte pour une comédie légère et insouciante avant de comprendre que le livret de Lorenzo Da Ponte était l’une des oeuvres les plus profondes et énigmatiques du théâtre lyrique, interrogeant les éternels leurre et douleur de nos amours… sans jamais trouver de réponse.

David Stern, fondateur et directeur de l’Opéra Fuoco, s’attache à la promotion de jeunes chanteurs et se consacre à insuffler une énergie nouvelle au répertoire vocal des XVIIIe et XIXe siècles.  » Cosi fan tutte est l’une des approches les plus subtiles de la psychologie que l’on peut trouver dans l’opéra, explique-t-il. Je me suis souvent demandé ce qui exactement avait conduit les personnages à devenir ceux que nous présente Da Ponte. Mon instinct me disait de remonter le temps pour tenter de découvrir les adolescents et jeunes adultes qu’ils furent.  » Cette réflexion le mène à commissionner Cosi Fanciulli (ainsi font les enfants), un opéra d’une heure environ, réunissant de très jeunes artistes.

Sollicité pour écrire la musique, Nicolas Bacri, compositeur français basé en Belgique, est enchanté par le projet et pense à Eric-Emmanuel Schmitt comme librettiste. Grand fan de Mozart, l’écrivain accepte tout de suite, enthousiasmé par l’idée d' » écrire du théâtre musical « .  » Le théâtre, je sais faire, dit-il. Cosi peut être interprété de moult façons, il est polysémique. On est dans un cas bizarre, difficilement lisible. C’est un mystère et ça m’intéresse beaucoup d’y pénétrer. Le désir, le trouble, la naissance de l’amour, je sais ce que c’est, je m’entends bien avec les ados. Le pitch ? A Naples, dans une école de chant, Don Alonso est professeur de musique. Deux jeunes soeurs sont amoureuses de lui, enfin, elles le croient. Le prof, lui, est amoureux de Despina qui est leur servante. Commence une comédie d’intrigue, inondée par la naissance du désir, l’ambiguïté des sentiments, le simulacre, la ruse et le jeu. Le tout va devenir réalité, un vrai éclairage sur Cosi fan tutte.  »

Cosi Fanciulli est porté par une musique où l’on retrouve la versatilité de Mozart.  » La création est toujours la réécriture de quelque chose, souligne Nicolas Bacri. Je me place dans la filiation et non dans la rupture. Dans ma musique on peut percevoir le XVIIIe siècle, mais ce n’est pas une copie de Mozart « . Très attendue, cette production jubilatoire compte bien faire une carrière internationale.  » Les projets de reprise sont actuellement à l’étude avec théâtres et festivals aux Etats-Unis, en France, en Grande- Bretagne, en Suède et en Belgique « , conclut Philippe Grenêche, délégué général de l’Opéra Fuoco.

Cosi Fanciulli, auThéâtre des Champs-Elysées, à Paris, le 4 juin, à 10 heures et 14 h 30. www.theatrechampselysees.fr

Barbara Witkowska

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