Le choix du traitement dépendra de la nature de l’allergène et du type de symptômes. © getty images

Allergies, comment traiter chaque symptôme et diminuer sa sensibilité

Ludivine Ponciau
Ludivine Ponciau Journaliste au Vif

A côté des antihistaminiques, d’autres médicaments et thérapies existent. Le tout est de savoir à qui ils conviennent et à quel moment les tester.

La floraison du bouleau est derrière nous mais les chênes, les pinacées et les cupressacées continuent de charger l’air de pollens. La saison des graminées vient quant à elle de commencer. Ceux que ces allergies saisonnières concernent savent qu’il est temps d’ouvrir le placard à médicaments, si ce n’est déjà fait, et de sortir cachets, sprays et gouttes oculaires. Prévenir et soigner ces allergies répandues n’est pas forcément simple. L’efficacité de la désensibilisation et des traitements est en effet assez variable selon la personne mais aussi selon le type d’allergie et l’intensité de la saison pollinique.

Les réactions allergiques peuvent se manifester sous différentes formes selon le système touché : respiratoire (difficultés à respirer ou respiration bruyante, gorge serrée, rhinite – parfois avec irritation des yeux), cutané (urticaire, gonflement des lèvres, de la langue et/ou du visage), cardiovasculaire (baisse de la pression artérielle, arythmie) ou gastro-intestinal (crampes, nausées, vomissements, diarrhées, problèmes de déglutition). L’allergie peut aller jusqu’à provoquer de la confusion, des étourdissements, une perte de conscience ou un choc anaphylactique.

Les allergènes ne sont pas seulement présents dans l’air que nous respirons, ils le sont aussi dans nos assiettes. Les fruits, les légumes, les graines et les noix peuvent provoquer des réactions plus ou moins fortes comme des éruptions cutanées, de l’urticaire ou des troubles gastriques. Dans le cas des allergies croisées pollen-aliments, qui affectent les individus présentant une rhinite allergique et qui consomment des fruits et légumes crus, la réaction se limite à la région péribuccale.

En urgence ou de fond

Il est possible d’atténuer les symptômes sans forcément recourir à la médication, simplement en adaptant ses habitudes de vie et en adoptant certains gestes de façon à éloigner l’allergène (pollen, acariens, aliment, poils de chat, moisissures, etc.). Pour savoir ce qui fonctionne vraiment, il n’y a pas de meilleur moyen que de s’adresser à son généraliste et de tester.

La seconde étape consiste à s’orienter vers un traitement adéquat. On distingue le traitement symptomatique du traitement curatif, autrement dit la désensibilisation ou l’induction de tolérance, lorsqu’il s’agit d’aliments. Le choix du traitement ne dépendra pas tant de la nature de l’allergène que du type de symptômes à traiter. Les allergies saisonnières se traitent différemment selon qu’elles affectent les voies hautes (sphère ORL et yeux) ou basses (bronches).

Les rhinites et les irritations oculaires se soignent très bien avec des antihistaminiques et des corticoïdes par voie nasale, les irritations oculaires avec des collyres corticoïdes sous forme de gouttes.

Les études ont montré des améliorations en cas d’asthme, provoqué par de l’allergie ou non.

Contrairement aux antihistaminiques plus anciens, les antihistaminiques de deuxième et encore plus de troisième génération ne provoquent pas, ou peu, d’effet de somnolence étant donné que la substance n’agit pas sur le cerveau. Comment agissent-ils? Lors du premier contact avec un allergène, des anticorps sont produits par les globules blancs afin de préparer le système immunitaire à une prochaine rencontre. Ces anticorps (IgE) se fixeront aux mastocytes – des cellules du système immunitaire présentes dans les muqueuses (poumons, intestins) ou les tissus conjonctifs et qui contiennent des granulations riches en histamine, notamment – ainsi qu’à d’autres cellules du système immunitaire, les basophiles, sensibilisées par les IgE.

En cas de nouvelle exposition à l’allergène, les mastocytes sont activés. Ils libèrent alors de l’histamine et des leucotriènes, qui se fixeront aux récepteurs des cellules voisines et, in fine, provoqueront le gonflement ou la sécrétion de liquide. L’action du médicament se situe à ce niveau. En se liant aux récepteurs des cellules voisines et en les empêchant de fixer l’histamine, les antihistaminiques bloqueront la réaction chimique à l’intérieur des cellules et limiteront l’apparition de symptômes.

Pour soulager les voies basses et traiter l’asthme, on utilisera également des corticoïdes couplés avec des bronchodilatateurs sous forme d’inhalateur pour permettre aux voies respiratoires de se relâcher et de se dilater. «Au-delà du traitement de base par corticoïdes inhalés et bronchodilatateurs à longue durée d’action, et lorsque l’asthme n’est pas contrôlé, complète Renaud Louis, professeur de pneumologie à l’ULiège et chef du service de pneumologie au CHU de Liège, on peut prescrire de la méthylprednisolone (NDLR: substance active du Medrol, un corticoïde qui présente des propriétés anti-inflammatoires et immunosuppressives) qui donne de bons résultats et permet de maîtriser une exacerbation mais qui provoque beaucoup d’effets secondaires.

Le cas de figure le plus pertinent pour prescrire une immunothérapie, c’est lorsque le patient présente une hypersensibilité à l’égard d’un seul allergène. Dans la pratique clinique, on l’utilise pour les allergies au venin de guêpe ainsi que pour les pollens de graminées ou de bouleau et, depuis peu, pour les acariens. Malheureusement, dans la rhinite et l’asthme, le médicament n’est remboursé que pour les allergies aux acariens, responsables de la majorité des cas d’asthme, pas celles aux pollens.»

En traitement de fond, l’immunothérapie allergénique, également appelée «désensibilisation», permet d’agir directement sur le système immunitaire pour le rééquilibrer. Deux méthodes coexistent. La plus ancienne, l’immunothérapie sous-cutanée, par injections donc, s’étire sur quelques semaines d’affilée puis toutes les quatre à six semaines environ, sous la surveillance d’un médecin.

A nouveau, le gros désavantage est qu’elle n’est pas remboursée alors qu’elle coûte une centaine d’euros par mois et qu’il faut généralement trois à cinq ans pour obtenir un résultat optimal. L’autre méthode, la plus récente, consiste à donner sous la langue l’allergène jusqu’à ce que le corps s’y habitue. L’immunothérapie sublinguale à l’égard des acariens est aujourd’hui remboursée si la rhinite est associée à un asthme. Celle à l’égard du pollen ne l’est pas encore.

L’immunothérapie n’est pas indiquée pour traiter l’asthme sévère, le risque de crise étant trop élevé. Néanmoins, d’autres solutions existent, précise le Pr Renaud Louis: la biothérapie à base d’anticorps monoclonaux programmés pour reconnaître et neutraliser l’immunoglobuline E (IgE). Le traitement, très coûteux (10 000 à 15 000 euros par an) n’est remboursé que dans les cas d’asthme sévère, d’allergies aux acariens, aux moisissures ou aux animaux domestiques. Pas dans les cas d’allergies saisonnières.

Une autre biothérapie contre l’asthme allergique est également utilisée en clinique. Elle permet de produire des anticorps pouvant neutraliser des protéines immunitaires humaines clés dans le déclenchement de l’asthme allergique, les cytokines IL-4, IL-13 et IL-5. «Une petite révolution, s’enthousiasme le pneumologue du CHU de Liège. Les études ont montré des améliorations, pour les personnes souffrant d’asthme sévère éosinophilique (NDLR: causé par une forte présence de cellules éosinophiliques dans le sang), qu’il soit provoqué par de l’allergie ou non.»

Mettre son système immunitaire au repos

La prise en charge des patients souffrant d’allergies alimentaires se fait également à plusieurs niveaux: le traitement en urgence des symptômes et l’induction de tolérance, bien que la première règle soit d’éviter au maximum de consommer l’aliment en question ou les plats en contenant.

La réaction du système immunitaire à la présence d’un allergène et la cascade de réactions produites par la libération d’histamine peut être bloquée par les antihistaminiques. «Si le problème est chronique et que l’inflammation est aiguë, on peut opter pour un traitement de fond qui permettra de mettre le système immunitaire au repos. Dans le cas de l’eczéma, par exemple, on préconisera de bien hydrater la peau et on prescrira une crème à base de cortisone pour diminuer l’inflammation, illustre la Pr Françoise Smets, gastro-entérologue aux Cliniques universitaires Saint-Luc, à Bruxelles. Dans le cas d’un angio-œdème (NDLR: ou œdème de Quincke, gonflement de la peau et des muqueuses), la première étape consistera à prendre un antihistaminique. Mais comme c’est souvent insuffisant, on peut ajouter de la cortisone ou encore, en cas de réaction anaphylactique, de l’adrénaline (par voie intramusculaire).»

Dans ce cas, il faut bien entendu éduquer le patient et l’entourage afin qu’ils sachent comment utiliser le stylo et réaliser l’injection. En ce qui concerne les allergies à certains médicaments, enfin, on préconisera des antihistaminiques ou de l’adrénaline. Il peut arriver qu’une personne présente une intolérance aux antihistaminiques mais ces cas sont heureusement très rares.

L’induction de tolérance, soit l’équivalent de la désensibilisation mais pour les aliments, ne peut se faire que si les marqueurs ne sont pas trop présents dans le sang ou si le test de provocation ne débouche pas sur une réaction sévère. Si les conditions sont favorables, on peut alors commencer à introduire la protéine en petite quantité à dose journalière pendant plusieurs semaines. Après cette période, on réalise un nouveau test de provocation pour évaluer la possibilité d’augmenter plus rapidement les doses. Lorsque la tolérance est établie, il est important que le patient consomme l’aliment en question régulièrement. Sans quoi l’allergie peut réapparaître. Quand on voit les désagréments que les symptômes peuvent provoquer, ce serait dommage.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire