» Il faut un vrai débat sur l’Union  »

Pascal Lamy, commissaire européen chargé du Commerce extérieur, se montre favorable à un référendum sur la Constitution

Vous réclamez une  » gouvernance européenne « . L’Union à 25 menacerait-elle de dériver faute de capitaine ?

– Nous ne sommes pas dans une des bonnes périodes de la construction européenne. Comme par hasard, ce mauvais moment coïncide avec la présence de certains leaders nationaux û je ne vise personne en particulier û qui ne sont guère engagés dans l’aventure européenne. Manque de chance : c’est précisément à ce moment-là qu’on augmente le poids de l’Europe, puisque l’élargissement accroît des deux tiers le nombre des membres de l’Union, tandis que la population et la richesse progressent respectivement de 20 et 5 %. On voit bien avec ces trois pourcentages qu’il y a un déséquilibre sur lequel il faudra travailler. Il s’agit de savoir si on va pouvoir trouver l’énergie politique qui permet de maintenir le cap de ce projet européen, lequel est une ambition d’intégration à la fois économique et politique.

Comment expliquez-vous ce peu d’engagement des leaders des pays membres ?

– L’énergie politique doit d’abord provenir des Etats membres parce que les démocraties nationales sont aujourd’hui davantage constituées que la démocratie européenne, qui se cherche encore. Nos leaders nationaux, hélas ! ne font guère preuve d’enthousiasme. Il y a une vingtaine d’années, Kohl ou Andreotti, les démocrates-chrétiens, Mitterrand ou Gonzalez, les socialistes, c’était tout de même autre chose du point de vue de l’engagement européen. Il ne faut, certes, pas tout mettre sur le dos des leaders qui, rappelons-le, sont élus. Si les opinions veulent l’Europe, à elles de le faire savoir. Mais il est vrai aussi qu’on est à une époque où l’Europe, parce qu’elle représente l’avenir, suscite l’anxiété. Il faut donc que l’Europe réponde à cette peur multiforme du lendemain, qu’il s’agisse du terrorisme, de la maladie, des migrations, des délocalisationsà

Etes-vous pour l’organisation d’un référendum sur la Constitution européenne ?

– Oui, plutôt. Car j’estime que nous avons besoin d’un grand et vrai débat sur l’Europe. Il faut se remettre d’accord sur ce que nous voulons faire ensemble. Mais ce référendum ne doit pas être utilisé pour des problèmes politiques nationaux. Il faudrait organiser cette ratification de la Constitution le même jour partout, dans les 25 Etats membres, afin que les opinions comprennent bien que c’est de l’avenir de l’Europe qu’il est question. l

Entretien : Alain Louyot

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