Sauveurs d’animaux

Ben Herremans

Sauver la planète, c’est aussi préserver la vie qui s’y développe. De nombreuses espèces animales sont aujourd’hui menacées dans leur existence, mais il existe heureusement des personnes qui dédient leurs efforts à les sauver. Au Rwanda, Olivier Nsengimana a fait de la grue couronnée grise le symbole du renouveau africain, tandis qu’en Amérique du Sud, Pablo Garcia Borboroglu se consacre à la défense des manchots.

En partenariat avec Rolex

Au secours des grues couronnées au Rwanda

Dans la période tourmentée qu’a vécue le Rwanda dans les années 1990, la conservation de la nature n’était évidemment pas une priorité mais la situation a changé ces dernières années. Avec son projet de sauvegarde de l’emblématique grue couronnée grise, le vétérinaire et défenseur de l’environnement Olivier Nsengimana participe à ce changement. Aujourd’hui, la grue couronnée grise est même devenue le symbole du renouveau africain en général.

Symbole de richesse et de longue vie

Avec sa houppe dorée et son sac gulaire écarlate, la grue couronnée grise est au Rwanda un symbole de richesse et une promesse de longue vie. Ces gracieuses créatures sont hélas en voie d’extinction car, considérées comme des animaux de compagnie insolites, de nombreuses grues couronnées grises vivent désormais captives, véritables ornements vivants, dans les jardins privés de riches Rwandais ou les parcs d’hôtels.

Étant donné que l’élite les considère comme des oiseaux d’ornement et presque comme des objets précieux, ces grues se retrouvent dans un trafic illégal d’animaux de compagnie. L’espèce fait l’objet d’un vaste braconnage par des villageois pauvres en quête de revenus, et les grues sont souvent blessées voire tuées dans cette pratique. Leur population dans le monde a ainsi chuté de 80%.

Marais transformés en terres de culture

Après s’être d’abord intéressé au sort des gorilles de montagne, autre espèce menacée, Olivier Nsengimana s’est dévoué à la cause de la grue couronnée grise. Selon lui, il y a encore une autre raison au déclin de ces oiseaux.

« Une autre menace majeure pour les grues couronnées grises est la disparition de leur habitat. La forte densité de population exerce une pression importante sur les ressources naturelles du Rwanda. C’est particulièrement le cas dans les marais qui sont l’habitat naturel des grues. Les paysans ont en effet pris possession de nombreuses zones marécageuses afin de les transformer en terres de culture, et les grues couronnées grises ont ainsi vu disparaître les marais où elles se reproduisaient et se nourrissaient. »

L’amour, un auxiliaire précieux

Olivier Nsengimana a vite compris que les oiseaux maintenus en captivité étaient en fait un atout important pour relancer l’espèce, et il a donc commencé à les recenser.

Mais comment lui, un simple villageois, pourrait-il arriver à convaincre les riches et les puissants de relâcher leurs grues dans la nature ? « Je me suis rendu compte que je pouvais compter sur une arme puissante pour m’aider dans mon combat : l’attachement des Rwandais pour la grue couronnée grise. Ils aiment en effet profondément ces oiseaux. Parce que ce sont des créatures magnifiques. »

Prise de conscience

En 2014, Olivier Nsengimana a reçu un Prix Rolex à l’esprit d’entreprise. Avec ces Prix, Rolex soutient depuis plus de quarante ans des personnes exceptionnelles qui, avec courage et conviction, relèvent des défis essentiels et font du monde un endroit meilleur. « Le fait que Rolex croie en mon idée a marqué le début de tout. Tout ce que nous avons réalisé n’a été possible que grâce à la confiance et au soutien de Rolex. »

C’est donc inspiré par l’amour du peuple rwandais pour la grue couronnée grise, et encouragé par le prix Rolex à l’esprit d’entreprise, qu’Olivier Nsengimana a entrepris sa mission. Il a ainsi pu voir les choses en grand et poursuivre des objectifs ambitieux.

Une de ses premières actions a été de lancer une campagne nationale à la radio et à la télévision. Il y expliquait une chose dont les Rwandais n’avaient même pas conscience : en l’occurrence, le fait que c’est précisément leur attachement pour la grue qui met celle-ci en danger. Et c’est ainsi que les propriétaires de grues se sont tournés vers lui pour lui demander ce qu’ils pouvaient faire, et proposer eux-mêmes que leurs oiseaux soient remis en liberté.

Réhabilitation des oiseaux

Avec le soutien du gouvernement rwandais, Olivier Nsengimana et son équipe ont développé une base de données répertoriant les grues couronnées grises en captivité. Dans le parc national d’Akagera, des infrastructures spéciales ont été aménagées pour la ‘réhabilitation’ des oiseaux, puisque ceux-ci devaient réapprendre les comportements naturels indispensables à leur survie. Il fallait en outre laisser le temps de repousser aux plumes qui étaient coupées pendant la captivité afin d’empêcher les grues de s’envoler.

Le centre pour les grues couronnées grises n’est pas couvert par un filet et une fois rétablis, les oiseaux peuvent donc voler librement dans le parc. Plus tard, Olivier Nsengimana a également trouvé une réserve d’oiseaux à Kigali, la capitale du Rwanda, pour accueillir les animaux trop malades ou définitivement incapables de retourner à l’état sauvage après une vie en captivité.

Le succès en chiffres

À ce jour, 242 grues couronnées grises ont été libérées de captivité au Rwanda. Parmi elles, 166 sont retournées à la nature. Grâce à une gestion stratégique de la faune sauvage, les oiseaux profitent de nouveau de leur habitat d’origine.

Depuis 2017, Olivier Nsengimana et son équipe recensent les grues au Rwanda et ont ainsi pu établir que leur nombre a doublé en quatre ans, passant de 487 à 997 individus. Des chiffres réconfortants, qui nourrissent les espoirs de tous ceux qui se sont engagés dans ce projet.

Aujourd’hui au Rwanda, plus aucune grue couronnée grise ne vit en captivité, et le commerce illégal alimenté par leur braconnage a été pratiquement éradiqué. Le projet de préservation des grues couronnées grises a suscité un large enthousiasme.

La réserve d’oiseaux, un lieu inspirant

La réserve d’oiseaux de Kigali est extrêmement populaire auprès des visiteurs, qui sont ravis de pouvoir admirer de près les grues (celles qui ne sont plus capables de retourner vivre à l’état sauvage).

« C’est un lieu inspirant », déclare Olivier Nsengimana. « Dans la réserve, les gens peuvent en apprendre plus sur notre travail et prendre conscience des conséquences de la captivité des animaux. »

Un modèle pour la sauvegarde de la biodiversité

Le projet de sauvegarde des grues couronnées grises a suscité énormément d’admiration et d’enthousiasme. Le travail d’Olivier Nsengimana est devenu un modèle pour la sauvegarde de la riche biodiversité du Rwanda. Plus que cela, la grue couronnée grise est devenue le symbole fragile de la lutte pour la protection de la faune sauvage d’Afrique centrale contre les pressions croissantes liées à l’activité humaine.

La grue est aussi devenue l’emblème d’une campagne que le défenseur de l’environnement a lancée pour inciter les Rwandais, et surtout les jeunes générations, à prendre soin du patrimoine naturel de leur pays. Il n’est en effet pas rare que des enfants des zones rurales s’emparent des œufs d’oiseaux sauvages, et Olivier Nsengimana et son équipe sont donc allés dans les écoles pour sensibiliser les jeunes à la protection des oiseaux et de leur habitat.

Le succès de ces campagnes de sensibilisation a entraîné le déploiement d’une série de nouveaux programmes qui se sont étendus au-delà de la ville, jusque dans les villages et les communautés forestières locales. La conservation de la nature a également permis de créer des emplois, par exemple pour surveiller les zones marécageuses. Les communautés locales ont appris à gagner leur vie sans mettre des espèces animales en danger.

Autres pays, autres animaux

De l’est au sud, les grues couronnées grises sont présentes dans plusieurs régions d’Afrique. Partout, elles sont en danger et partout, leur population est en déclin. Dans le cadre des études qu’il mène, Olivier Nsengimana observe notamment leurs préférences en matière d’habitat et leurs schémas de migration. Il a constaté que les oiseaux circulent entre le Rwanda et les pays voisins, le Burundi, la Tanzanie et l’Ouganda. « Les premiers résultats de ces études montrent que nous avons intérêt à travailler tous ensemble. » Son souhait est donc de mettre en place des partenariats avec des groupes de conservation de la nature dans d’autres pays, afin de permettre à la population de grues de reprendre partout.

Olivier Nsengimana et ses collègues ont aussi étendu leurs travaux à d’autres espèces menacées, telles que les chauves-souris, les becs-en-sabot, les sitatungas et les gris du Gabon, et à la restauration de l’habitat de ces animaux.

Ensemble, nous sommes forts

L’initiative d’Olivier Nsengimana a fait des émules : son projet qui visait à rendre leur liberté à quelques oiseaux d’ornement est devenu une mission qui dépasse les frontières, et la grue elle-même devient lentement mais sûrement le symbole du renouveau africain.

Quant à lui, Olivier Nsengimana est heureux de constater que la sauvegarde de la grue couronnée grise est un projet authentiquement rwandais : né dans son esprit, c’est par les communautés locales qu’il a été mis en œuvre. Contrairement à de nombreuses autres initiatives de conservation de la nature en Afrique, qui sont dirigées par des ONG de pays non africains.

Olivier Nsengimana souligne encore que ses projets et ses ambitions sont littéralement sans frontières et donc en parfaite adéquation avec l’initiative Perpetual Planet de Rolex, qui vise à protéger la planète dans toute sa diversité. Au final, nous devons tous travailler main dans la main. « Ensemble, nous sommes forts. Il est important que nous unissions nos forces pour sauver la planète. Cela ne peut être l’affaire d’une seule personne. Sauvegarder toutes les espèces, et notre planète entière, doit être la mission de chacun de nous. »

Au secours des manchots en Amérique du sud

Deux tiers des oiseaux marins ont disparu depuis 1960, et parmi eux, les manchots font partie des espèces les plus menacées. Quatorze des dix-huit espèces de manchots ont en effet vu leur statut se dégrader au cours des trente dernières années : l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) considère désormais que plus de la moitié d’entre elles sont menacées.

C’est ce déclin alarmant qui a incité l’écologiste argentin Pablo Garcia Borboroglu à lancer une campagne mondiale. En tant que président de la Global Penguin Society, il s’est donné pour mission d’éliminer les plus grandes menaces qui pèsent sur les manchots. En 2021, il a reçu un Prix Rolex à l’esprit d’entreprise. Le jury composé de scientifiques a apprécié son initiative parce que, tout en couvrant trois continents, elle implique quand même les communautés locales dans sa réalisation.

Sur terre ou en mer : un danger permanent

Les manchots sont menacés en permanence. Sur terre, où ils se reproduisent et nidifient, ils sont menacés par des activités humaines perturbatrices ainsi que par des prédateurs nouvellement arrivés et qu’ils ne perçoivent donc pas comme des ennemis naturels, tels que les chiens, les renards, les serpents, les mustélidés et les chats. Ces prédateurs n’existaient auparavant pas en Antarctique, mais aujourd’hui ils volent les œufs des manchots et attaquent leurs petits.

Sur l’eau aussi, les manchots sont en danger quand ils parcourent des centaines de kilomètres pour se nourrir ou migrer. Ils sont en effet exposés aux effets du changement climatique, de la pollution environnementale et de la surpêche. L’épuisement des réserves de poissons les oblige à nager toujours plus loin pour trouver du poisson afin de nourrir leur progéniture. Bien souvent, à leur retour, leurs petits sont déjà morts de faim.

Premier manchot sauvé… le déclic

Garcia Pablo Borboroglu étudie les manchots depuis plus de 30 ans. Plus précisément depuis qu’il a constaté, dans les années 1980, la disparition de 40.000 individus par an suite aux gigantesques marées noires qui ont eu lieu en Patagonie, la région d’Amérique du Sud qui s’étend du Chili à l’Argentine.

Depuis lors, il s’efforce de les sauver. « J’ai eu une révélation quand j’ai relâché dans la nature le premier manchot que j’avais sauvé. J’ai compris alors qu’une action individuelle pouvait avoir un impact important, et j’ai redoublé d’efforts pour contribuer à leur sauvegarde. »

Un projet, trois piliers

Le projet de Garcia Pablo Borboroglu repose sur trois piliers. Pour commencer, la collecte de connaissances scientifiques sur trois principales espèces de manchots en Argentine, au Chili et en Nouvelle-Zélande. « Nous étudions tous les aspects biologiques et écologiques essentiels. Si nous voulons faire des recommandations en matière de conservation, il est utile qu’elles soient fondées sur des faits. »

Ensuite, la sensibilisation et l’implication des écoles et communautés locales. Garcia Pablo Borboroglu propose ainsi des voyages scolaires à la découverte de colonies de manchots, et organise le ramassage de déchets sur les côtes afin de mieux préserver leurs sites de reproduction. Il développe en outre sur place un écotourisme durable, ainsi qu’un kit pédagogique en ligne qu’il souhaite diffuser dans le monde entier.

Enfin, il y a la collaboration avec les gouvernements nationaux et les propriétaires terriens afin d’améliorer la prise de décision politique, comme la création et la gestion d’aires marines protégées (AMP).

Aider aussi les océans

Les manchots sont extrêmement sensibles aux changements de leur habitat naturel, ce qui en fait des indicateurs fiables de l’état de santé des océans. « Aider les manchots, c’est aussi aider les océans », déclare Garcia Pablo Borboroglu. « À travers les manchots, nous œuvrons également à la conservation des océans, qui jouent un rôle essentiel dans la qualité de vie pour la planète toute entière. Les océans fournissent nourriture et oxygène, et ont un effet régulateur sur le climat. Au-delà de la sauvegarde des manchots, nous nous attaquons aussi aux problématiques environnementales majeures. L’enjeu est planétaire. »

À ce jour, 1,6 million de manchots ont déjà été aidés par les actions de Garcia Pablo Borboroglu. Il a déjà sécurisé 13 millions d’hectares de leur habitat naturel, et des milliers d’enfants ont participé aux campagnes de sensibilisation qu’il a organisées.

Rolex soutient des personnes et organisations qui recherchent et développent des solutions aux problèmes de la planète et qui ainsi contribuent à rendre le monde meilleur et à préserver la planète pour les prochaines générations. Dans cette série Le Vif met leurs efforts en lumière. Le Vif a réalisé ces articles en toute indépendance rédactionnelle.

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