Lors de la Révolution culturelle, Xi Jinping fit partie des jeunes envoyés par millions à la campagne en «rééducation auprès des masses». © belga image

Xi Jinping : d’antimaoïste à plus maoïste que Mao ?

Xi Jinping et son père ont subi les foudres de la Révolution culturelle des années 1960 lancée par le Grand Timonier. Pour faire oublier cette période, le président chinois a dû jouer à fond la carte de la loyauté.

«Xi aurait pourtant pu devenir antimaoïste», soutient l’historien Michel Bonnin, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), en parlant de celui qui, aujourd’hui, s’est forgé un culte de la personnalité qui n’a rien à envier au Grand Timonier. Retour en 1962, quand son père, Xi Zhongxun, un révolutionnaire proche de Mao, se retrouve victime d’une purge menée par l’auteur du Petit livre rouge. Fragilisé par le fiasco du Grand Bond en avant (1958-1961) qui engendra une terrible famine et causa la mort de dizaines de millions de Chinois, Mao lance la Révolution culturelle en 1966. Xi Jinping n’a alors que 13 ans et subit les foudres de cette sombre période. «Pendant des années, il est perçu comme l’enfant d’un traître au parti, retrace le spécialiste de la période maoïste. Il en a beaucoup souffert.» Envoyé comme des millions d’autres «jeunes instruits» à la campagne en «rééducation» auprès des masses, le jeune Jinping tente de s’échapper, revient à Pékin, mais sa mère le dénonce publiquement. Il est renvoyé et passe finalement sept ans à Liangjiahe, un petit village pauvre du Shaanxi, au nord de la Chine.

Xi Jinping savoure d’autant plus le système duquel il a failli être exclu.

«De cette période traumatisante, Xi ne garde aucun ressentiment à l’égard de Mao», relate l’auteur de Génération perdue. Le mouvement d’envoi des jeunes instruits à la campagne en Chine, 1968-1980 (EHESS, 2004). Xi Jinping dira plus tard que c’est à ce moment là qu’il a eu «le sentiment de se réaliser». Michel Bonnin estime qu’il y a «un côté syndrome de Stockholm: pour s’en sortir, il fallait être plus orthodoxe que les orthodoxes, plus maoïste que Mao. En fin de compte, jouer à fond la carte de la loyauté a fini par payer: il savoure d’autant plus le système duquel il a failli être exclu.»

Contrôle du parti

Après neuf tentatives ratées, il réussit à intégrer le PCC au dixième essai. Appuyé par les réseaux de son père, qui fut réhabilité à la mort de Mao, Xi gravit les échelons au sein de l’appareil du parti. D’abord au niveau local et provincial. Puis il connaît une ascension politique vers la fin des années 2000 à l’échelle du pouvoir central. «Xi est un pur produit du parti, complète Konstantinos Tsimonis, maître de conférences au Lau China Institute du King’s College London. Il est convaincu que la centralisation et le contrôle du parti sont essentiels pour l’unité du pays. Pour lui, maintenir le Parti communiste chinois au pouvoir est une nécessité absolue au même titre que le libéralisme est un danger pour la Chine.»

Pour les dirigeants chinois, la désintégration de l’Union soviétique et la chute du Parti communiste soviétique constituent «une profonde leçon», déclare Xi devant les cadres du PCC en 2012, peu après avoir accédé au pouvoir. A ses yeux, la déstalinisation, «un nihilisme historique», et la libéralisation des médias ont entraîné la mise à mort de l’URSS: «Le Parti communiste d’Union soviétique comptait proportionnellement plus de membres que le nôtre. Mais pas un seul homme n’a eu le courage de se lever pour résister!»

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