Depuis juillet 2022, Ukrainiens et Russes se battent sous un déluge de feu pour le contrôle de la localité de Bakhmout, dans l’est de l’Ukraine. © GETTY IMAGES

Ukraine: un premier succès pour le groupe Wagner?

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Les Russes progressent sur le front de Bakhmout où les mercenaires d’Evgueni Prigojine jouent un rôle important. Les Occidentaux équipent les Ukrainiens en chars légers pour l’étape suivante, d’une autre envergure.

Les avancées militaires sont encore limitées. Mais elles préludent peut-être à un premier succès des Russes depuis la prise de la ville de Severodonetsk, dans la province de Louhansk, le 25 juin 2022. A la faveur d’une offensive lancée le 6 janvier, ils se seraient emparés d’une grande partie de la localité de Soledar, à une dizaine de kilomètres au nord de la ville martyre de Bakhmout, théâtre d’une bataille acharnée qui dure depuis juillet 2022. «Soyons honnêtes. […] L’armée ukrainienne se bat avec bravoure pour Bakhmout et Soledar», a reconnu le patron du groupe de mercenaires Wagner, Evgueni Prigojine, dans un étonnant élan de sincérité qui vise peut-être à mettre en exergue l’efficacité de ses propres troupes, seule force russe engagée, selon lui, dans l’assaut de Soledar. Parallèlement, les forces séparatistes prorusses de la république autoproclamée de Donetsk ont revendiqué la prise du village de Bakhmuts’ke.

Soyons honnêtes. […] L’armée ukrainienne se bat avec bravoure pour Bakhmout et Soledar.

Bakhmout, où l’armée ukrainienne est en voie d’encerclement par l’armée russe et ses supplétifs, constitue un enjeu stratégique limité. Certes, sa prise serait une étape vers la reconquête de l’ensemble de la province de Donetsk, objectif affiché de Vladimir Poutine qui l’a annexée officiellement à la Russie le 30 septembre 2022. Notamment parce que la localité de Soledar dispose d’accès à un réseau sous-terrain long de deux cents kilomètres hérité d’une mine de sel désaffectée – un autre vestige étonnant de l’industrialisation de cette région après l’immense complexe industriel d’Azovstal, à Marioupol. Mais ce sont les villes de Kramatorsk et de Sloviansk, plus au nord, qui, si elles étaient conquises, représenteraient un véritable trophée d’envergure pour Moscou. On en est encore loin.

Meilleure coordination

Il n’empêche, la progression autour de Bakhmout semble témoigner d’une meilleure collaboration entre les différentes composantes militaires russes, entre l’armée et le groupe Wagner et entre l’infanterie et l’aviation qui, longtemps absente du ciel ukrainien, apporterait un soutien cette fois efficace aux soldats sur le terrain. Cette coopération n’est pas sans rappeler l’offensive conjointe menée par l’armée syrienne et l’aviation russe dans la bataille de Deir ez-Zor, à l’est de la Syrie, qui avait permis, entre septembre et novembre 2017, d’en déloger les rebelles et les combattants islamistes opposés à Bachar al-Assad. L’opération avait été dirigée, à l’époque, côté russe, par le commandant des forces russes d’intervention en Syrie, un certain Sergueï Sourovikine, propulsé commandant en charge des opérations militaires en Ukraine en octobre 2022.

La reprise de l’initiative des Russes sur le terrain n’est peut-être pas étrangère à l’accélération de l’approvisionnement en armements actée depuis le 6 janvier par les puissances occidentales. La France, les Etats-Unis et l’Allemagne ont décidé de fournir à l’armée ukrainienne des chars légers, respectivement des AMX-10 RC (dont le nombre n’a pas été communiqué), des Bradley (50) et des Marder (20 à 40, selon Berlin). Ces envois, alors que certains songent déjà à des chars lourds Abrams ou Leopard 2, doivent préparer les Ukrainiens à résister aux assauts russes et à lancer une grande contre-offensive au regard de laquelle la bataille de Bakhmout, démesurément lourde en pertes humaines, paraîtra sans doute accessoire. Cruelle réalité de la guerre.

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