Alexeï Navalny est décédé en prison. © belga

Navalny arrête sa grève de la faim

Le Vif

L’opposant russe emprisonné Alexeï Navalny a annoncé vendredi cesser la grève de la faim qu’il observait depuis trois semaines pour dénoncer ses conditions de détention, suscitant des inquiétudes pour sa santé et des tensions russo-occidentales.

La veille, des docteurs, dont son médecin personnel, l’avaient exhorté à arrêter « immédiatement » de ne plus s’alimenter, disant craindre sa mort ou des « dommages considérables » pour sa santé.

« Je commence à mettre fin à ma grève de la faim », a écrit l’opposant de 44 ans dans un message sur son compte Instagram.

Désormais, ses soutiens s’inquiètent des conditions de sa reprise progressive d’une alimentation, qui doit se faire de façon précise pour éviter tout risque.

Le militant anti-corruption et adversaire le plus célèbre de Vladimir Poutine avait cessé de s’alimenter le 31 mars, accusant l’administration pénitentiaire de le priver d’accès à un médecin alors qu’il dit souffrir d’une double hernie discale.

Il se plaignait aussi, avant sa grève de la faim, d’une perte de sensibilité aux jambes et aux mains qui, selon lui, pourrait être une conséquence de l’empoisonnement dont il a été victime l’été dernier et dont il accuse le Kremlin.

– « Soutien énorme » –

L’un de ses proches collaborateurs, Leonid Volkov, avait annoncé jeudi soir que l’opposant avait finalement été ausculté cette semaine dans un hôpital civil et que son dossier médical avait été transmis à ses docteurs.

« Les médecins en qui je crois pleinement ont annoncé hier que nous avions atteint suffisamment de choses pour que je mette fin à ma grève de la faim », a donc écrit vendredi M. Navalny.

« Grâce au soutien énorme de bonnes personnes dans tout le pays et à l’étranger, nous avons fait de grands progrès. Il y a deux mois on riait au nez de mes demandes d’assistance médicale », a-t-il ajouté.

Alexeï Navalny avait été arrêté sitôt rentré d’Allemagne en janvier, après cinq mois de convalescence pour se remettre de son empoisonnement à l’agent innervant Novitchok. Fin février, il a été condamné à une peine de deux ans et demi de prison pour une affaire de fraude remontant à 2014, qu’il dénonce comme politique.

Selon ses soutiens, il a pu enfin voir des médecins hors du système carcéral grâce la pression de ses partisans qui ont réuni mercredi soir des milliers de personnes à travers la Russie. Le jour même, le président Vladimir Poutine prononçait son discours annuel à la Nation.

Navalny poursuivait sa grève de la faim depuis trois semaines pour protester contre le faible accès aux soins médicaux. Selon ses médecins, il risquerait un arrêt cardiaque
Navalny poursuivait sa grève de la faim depuis trois semaines pour protester contre le faible accès aux soins médicaux. Selon ses médecins, il risquerait un arrêt cardiaque « d’une minute à l’autre ».© Reuters

Ces manifestations, moins importantes qu’en janvier au moment de son arrestation, ont aussi été moins brutalement réprimées, même si elles se sont soldées par plus de 1.900 interpellations.

L’affaire Navalny a nourri ces derniers mois un regain de tensions russo-occidentales, Washington et l’UE dénonçant à la fois son empoisonnement, le refus de Moscou d’enquêter sur celui-ci, son emprisonnement, puis son traitement en prison.

Les Occidentaux ont aussi menacé la Russie de conséquences si l’opposant venait à mourir en prison. Moscou a rejeté l’ensemble de ces critiques.

– Nouvelles inquiétudes –

« Nous sommes toujours profondément préoccupés par son état de santé et sa sécurité, et nous continuons à appeler à sa libération immédiate et sans conditions », a déclaré vendredi le département d’Etat américain.

Selon l’opposant, sa reprise d’une alimentation normale va prendre 24 jours, soit la durée pendant laquelle il a cessé de manger.

L’une de ses alliées, Lioubov Sobol, qui avait observé une grève de la faim en 2019 pour dénoncer le rejet de sa candidature à une élection locale, a affirmé que les prochains jours « allaient être très durs » pour Alexeï Navalny.

D’après elle, il va connaître une envie « très forte de nourriture normale » mais ne pourra ingurgiter que des liquides « en très faible quantité » pendant la semaine à venir.

Dès lors, cinq docteurs, dont sa médecin personnelle, Anastassia Vassilieva, ont exigé vendredi qu’il soit transféré dans un hôpital « moderne » à Moscou.

Après avoir eu accès à son dossier, ces médecins avaient demandé jeudi à ce qu’Alexeï Navalny s’alimente du fait de « symptômes d’insuffisance rénale, de symptômes neurologiques sévères et d’hyponatrémie sévère » pouvant conduire selon eux à sa mort.

Après sa condamnation, le militant avait été transféré dans une prison à une centaine de kilomètres de Moscou. Dimanche dernier, il avait été hospitalisé dans une unité pour prisonniers tuberculeux de la même région, puis transféré dans un hôpital civil à proximité.

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