Le PSG est la vitrine flamboyante de la stratégie d’investissement du Qatar dans le sport. © belga image

Mondial au Qatar : pourquoi c’est aussi un enjeu régional

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Les Emirats arabes unis à Manchester City, le Qatar au PSG et l’Arabie saoudite à Newcastle: la bataille du soft power des puissants du Golfe se règle dans le foot.

Le 23 novembre 2010, Nicolas Sarkozy, alors président de la République française, reçoit à déjeuner à l’Elysée, le prince héritier du Qatar Tamim bin Hamad al-Thani (il deviendra émir le 25 juin 2013), le Premier ministre Hamad bin Jassem al-Thani et le président de l’Union des associations européennes de football (UEFA), Michel Platini. Le 2 décembre 2010, la Fifa désigne le Qatar pour accueillir le Mondial 2022. Michel Platini, auquel on prêtait une préférence pour celle des Etats-Unis, vote en faveur de la candidature de l’émirat. En mai 2011, le Qatar Sports Investments (QSI) procède au rachat, à hauteur de 70%, du club de foot du Paris Saint-Germain. Cette séquence est l’objet d’une enquête de la justice française pour suspicion de pacte corruptif. Toujours est-il que le chiffre d’affaires du PSG, établi à 90 millions d’euros avant ce rachat, a atteint les 700 millions d’euros en 2022.

Amnesty International n’hésite pas à dénoncer dans le rachat de Newcastle par l’Arabie saoudite «une opération de blanchiment d’image».

Le club parisien est devenu le modèle de la stratégie sportive de l’émirat en remplissant l’objectif de la rentabilité financière et celui du soft power. Malgré la priorité mise par le Qatar sur ce type d’investissement, il n’est pourtant pas le premier pays du Golfe persique à avoir suivi cette voie. Au sein de la fédération des Emirats arabes unis, Abou Dhabi a perçu plus tôt le filon que pouvait offrir le football professionnel en plein développement lié à l’explosion des tarifs des droits de télévision. Dès septembre 2008, le conglomérat Abu Dhabi United Group, propriété du cheikh Mansour, demi-frère du président de la Fédération des émirats Khalifa ben Zayed Al Nahyane (décédé cette année), rachète la formation de Manchester City «pour attirer l’attention du monde entier sur Abou Dhabi». Le montant de l’opération est estimé entre 185 et 260 millions d’euros. Le club petit frère de Manchester United l’a désormais supplanté en qualité et a remporté six titres de champion depuis l’arrivée des Emiratis.

Une campagne à 333 millions d’euros

Sur la scène géopolitique du Golfe, devant le Qatar et les Emirats arabes unis, c’est l’Arabie saoudite qui compte. Il aura pourtant fallu attendre 2021 pour la voir s’intéresser à la manne du football anglais. Le Public Investment Fund acquiert le 7 octobre 80% des parts du club de Newcastle. Comme l’opération survient trois ans après l’assassinat du journaliste et opposant Jamal Khashoggi, commandité par le prince héritier Mohammed ben Salmane, Amnesty International n’hésite pas à dénoncer alors «une opération de blanchiment d’image». Une campagne de relations publiques évaluée à 333 millions d’euros, tout de même.

Mais qui ravit les supporters du club de la ville du nord-est de l’Angleterre. Sauvé de justesse de la relégation lors de la saison 2021-2022, Newcastle revit, et, troisième du championnat avant la trêve internationale, brigue une des quatre premières places qualificatives pour la lucrative Ligue des champions. Or, sa politique de recrutement brille par son efficacité et est moins bling-bling que celle du PSG. L’Arabie saoudite aurait-elle appris de l’expérience du Qatar?

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