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Mélenchon, tribun « insoumis » de la gauche radicale française

Le Vif

Orateur enflammé, ancien trublion socialiste devenu héraut de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon a mené une campagne atypique qui lui a permis de s’imposer comme le candidat de la gauche à la présidentielle française.

S’il n’est pas parvenu à se qualifier pour le second tour qui se tiendra le 7 mai, il a toutefois réalisé un score important, avec plus de 19% des voix.

Adepte revendiqué du « parler dru et crû », l’homme ne laisse pas indifférent. Populiste de gauche pour ses adversaires, défenseur du peuple contre l’oligarchie pour ses partisans, cet admirateur de la gauche latino-américaine a choisi comme mot d’ordre « La France insoumise ».

Parti en lointain challenger – avec moins de 10% des intentions de vote – il a effectué une spectaculaire remontée ces dernières semaines pour se hisser au coude à coude avec le candidat de droite François Fillon, juste derrière le centriste Emmanuel Macron et la dirigeante d’extrême droite Marine Le Pen.

Son pari: surfer sur la vague « dégagiste » qui appelle au renouvellement, « mobiliser les dégoûtés de la politique », résume son entourage.

Admirateur du révolutionnaire français Maximilien Robespierre comme du défunt président vénézuélien Hugo Chavez, « Méluche » a été un cadre du Parti socialiste (PS) pendant 30 ans, avant d’en claquer la porte. Il a cannibalisé le PS sur sa gauche tandis qu’Emmanuel Macron mordait sur sa droite le parti du président François Hollande.

A 65 ans, ce philosophe de formation n’a rien perdu de sa radicalité, mais se situe plus dans l’humour et les phrases choc, que dans les violents emportements qui furent longtemps sa marque de fabrique. « Je suis plus philosophe que jamais, moins impétueux. La conflictualité a montré ses limites », confie-t-il.

Sans pour autant rien renier: « On peut pas proposer ce que je propose avec une tête de premier communiant qui parle d’une voix flûtée. Des fois, y’a pas le choix, il faut ouvrir les portes à coups de pied ».

– Le Pen, sa bête noire –

La faconde de ce vétéran de la politique, adepte des vestes col Mao, lui vaut de crever l’écran sur Youtube où sa chaîne bat des records d’audience. Ses traits d’esprit sont suivis par plus d’un million d’abonnés sur Twitter.

Sa campagne numérique lui permet de propager ses idées sans passer par le filtre des médias, avec lesquels il entretient des rapports exécrables.

Cet orateur de talent a aussi labouré le terrain à pied, en camionnette, en péniche. Il sait captiver son auditoire sans notes et galvaniser les foules – avec ou sans son désormais célèbre hologramme qui lui permet d’animer plusieurs meetings en simultané.

« Il a inventé le stand-up politique, c’est devenu un showman. Ce style lui permet de ne plus avoir à faire ses saillies trop violentes. Il est dans la pédagogie, analyse un de ses anciens compagnons au PS, l’ex-député Julien Dray.

Né à Tanger au Maroc, passé par le militantisme étudiant, tendance trotskiste, Jean-Luc Mélenchon rejoint le Parti socialiste à 25 ans. Élu de l’Essonne, en banlieue parisienne, il entre au gouvernement entre 2000 et 2002, comme ministre délégué à l’Enseignement supérieur.

A couteaux tirés avec le Parti socialiste et son patron d’alors, François Hollande, il finit par créer son propre mouvement en 2008, le Parti de gauche. Il s’allie avec les communistes et remporte 11,1% des voix au premier tour de l’élection présidentielle de 2012.

Mais il échoue aux législatives dans le nord de la France, alors qu’il défie sur son terrain sa bête noire, la dirigeante de l’extrême droite Marine Le Pen, à qui il dispute l’électorat populaire.

« Le paradoxe de Jean-Luc Mélenchon se noue autour de la notion de peuple. Il essaie de faire coïncider son peuple idéal, celui pour lequel il se bat, les précaires, les chômeurs, les salariés… avec le peuple qui se rend réellement dans ses meetings, plus souvent issu de catégories socioprofessionnelles plus élevées: des employés, des fonctionnaires, des profs », souligne la chercheuse Cécile Alduy.

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