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Le jour où Poutine a provoqué une guerre: récit de ces 24 dernières heures historiques

Le Vif

Vladimir Poutine a lancé depuis hier l’invasion de l’Ukraine, avec des frappes aériennes et une pénétration de forces terrestres. Retour sur la chronologie d’un jeudi déjà historique et derniers updates de la situation.

« J ‘ai pris la décision d’une opération militaire spéciale » ayant pour but « une démilitarisation et une dénazification de l’Ukraine ».

Jeudi 24 février 2022, peu avant 6 heures du matin, le maître du Kremlin donne le signal de l’attaque de l’Ukraine par ses troupes dans une déclaration télévisée.

Juste après le discours de Vladimir Poutine, des explosions retentissent à Kiev, à Kramatorsk, ville de l’est qui sert de quartier général à l’armée ukrainienne, à Kharkiv (est), deuxième ville du pays, à Odessa (sud), sur la mer Noire, et à Marioupol, principal port de l’est du pays. Le président Zelensky, chef de l’Etat ukrainien, proclame la loi martiale et annonce la rupture des relations diplomatiques avec Moscou.

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A Kiev, dès l’aube, les habitants pris de court se pressent dans le métro pour s’abriter ou tenter de quitter la ville. Des voitures remplies de familles fuient la capitale, le plus loin possible de la frontière russe, située à 400 km.

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Tollé international

L’attaque russe, après des mois de tensions et d’efforts diplomatiques pour éviter une guerre, déclenche un tollé dans la communauté internationale et suscite une pluie de condamnations internationales, beaucoup redoutant qu’elle mène au plus grave conflit qu’ait connu l’Europe depuis 1945. Poutine tente de rassurer l’Occident. « Nous n’avons pas dans nos plans une occupation des territoires ukrainiens, nous ne comptons rien imposer par la force à personne », assure-t-il, appelant les militaires ukrainiens à « déposer les armes ». Il justifie l’intervention en répétant ses accusations, infondées, d’un « génocide » orchestré par Kiev dans les territoires séparatistes prorusses, et en arguant de la « politique agressive de l’Otan, qui instrumentaliserait l’Ukraine contre la Russie ».

De son côté, le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, indique que l’Alliance atlantique a activé « ses plans de défense » pour déployer des forces supplémentaires auprès de ses membres d’Europe de l’Est. La Chine, qui entretient des relations étroites avec Moscou, annonce qu’elle suit « de près » la situation » et appelle à « la retenue de toutes les parties ».

En fin de matinée, les deux camps font des déclarations invérifiables: l’armée russe affirme notamment avoir détruit onze aérodromes et dix-huit stations radars des systèmes de défense antimissile. Elle annonce également que ses troupes gagnent du terrain dans l’est ukrainien. Les autorités de Kiev indiquent que « plus de quarante militaires ukrainiens ont été tués, des dizaines blessés » et « près de dix civils tués ».

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Les autorités de la région d’Odessa annoncent, par ailleurs, que dix-huit personnes ont été tuées dans un village par des frappes aériennes. L’invasion provoque la panique sur les marchés mondiaux, faisant plonger les Bourses et s’enflammer les prix des matières premières, du pétrole au gaz en passant par les céréales. La Bourse de Moscou plonge de plus de 30 % et le rouble a touché un plus bas historique face au dollar, avant l’intervention de la banque centrale du pays. En milieu de journée, l’offensive semble viser directement Kiev, où un couvre-feu est imposé.

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Les autorités ukrainiennes signalent que les forces terrestres russes sont dans les environs de la capitale et qu’un avion militaire ukrainien s’est écrasé dans la région avec quatorze personnes à son bord, alors que des combats étaient en cours pour contrôler un aéroport militaire proche de Kiev.

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Sur les grands routes de l’est ukrainien, l’armée ukrainienne est partout. Un responsable de la défense civile indique que les opérations d’évacuation de civils sont entravées par des tirs d’artillerie nourris et des communications défaillantes. Dans l’après-midi, Kiev annonce que des combats ont lieu dans la zone de la centrale de Tchernobyl. Des militaires ukrainiens y « sacrifient leur vie » pour éviter une catastrophe nucléaire comme en 1986, déclare ainsi le Président Zelensky. Les forces russes prendront le contrôle de la centrale de Tchernobyl en soirée.

« Non à la guerre ! « En fin de journée, à Moscou comme à Saint Pétersbourg, plus de huit cents manifestants contre l’invasion russe sont interpellés pour avoir bravé l’interdiction de rassemblement décrétée par les autorités.

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Le Kremlin rappelle que l’opération militaire contre l’Ukraine durerait le temps nécessaire, en fonction de ses « résultats » et que les Russes soutenaient cette attaque. La première journée de l’invasion de l’Ukraine est un « succès », selon l’armée russe qui assure que « toutes les tâches assignées aux groupes de militaires des forces armées de la Fédération de Russie pour la journée ont été remplies ».

Le jour où Poutine a provoqué une guerre: récit de ces 24 dernières heures historiques

Dans une allocution particulièrement attendue, Joe Biden a annoncé en soirée des sanctions économiques et des restrictions d’exportation vers la Russie. Plus de la moitié des importations technologiques de la Russie seront supprimées et quatre banques russes supplémentaires seront sanctionnées. Le président américain a assuré qu’il défendrait « le moindre pouce de territoire de l’Otan » mais qu’il n’enverrait pas de troupes en Ukraine.

L’étau se resserre autour de Kiev

Dans la banlieue de Kiev, un avion non-identifié s'est écrasé.
Dans la banlieue de Kiev, un avion non-identifié s’est écrasé.© Reuters

Au deuxième jour de l’invasion, les forces russes resserraient vendredi leur étau autour de Kiev, avec des combats dans et aux abords de la capitale de l’Ukraine. Après la fuite de nombreux habitants jeudi, le centre de Kiev, capitale forte en temps normal de quelque trois millions d’habitants et désormais sous couvre-feu, ressemblait à une ville-fantôme. Hommes en armes et blindés étaient postés aux principaux carrefours proches des bâtiments gouvernementaux.

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De rares passants s’arrêtaient pour échanger les dernières nouvelles, alors que sirènes et explosions retentissaient dans un ciel chargé de nuages. La nuit dernière, depuis environ 3h30 heure belge, des explosions ont de nouveau été entendues dans Kiev. Des échanges de tirs et des explosions ont été entendus dans le quartier d’Obolon. Plusieurs détonations sourdes ont aussi entendues depuis le centre-ville. Les forces ukrainiennes ont également rapporté combattre des unités de blindés russes dans deux localités au nord de Kiev, Dymer (45 km) et Ivankiv (80 km). Des troupes russes approchaient aussi la capitale depuis le nord-est et l’est, selon l’armée ukrainienne.

Des milliers de personnes ont passé la nuit dans les stations de métro de Kiev à la suite d’un appel lancé par le maire Vitali Klichko, un couvre-feu a également été instauré. Selon plusieurs sources des groupes spécialisés dans le sabotage seraient entrés dans Kiev. Le ministère ukrainien de la Défense a appelé les civils à Kiev « à nous informer des mouvements ennemis: faites des cocktails molotov, neutralisez l’occupant! ».

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Dans la nuit, des sources militaires occidentales ont indiqué que les forces russes avaient déjà acquis « une supériorité aérienne totale » en Ukraine. Selon l’armée ukrainienne, des combats ont eu lieu dans la partie sud-ouest de la mer Noire et que plusieurs ports ont dû être défendus. Il a également été signalé que des forces militaires avaient été envoyées à Kiev. De violents combats ont eu lieu la nuit dernière à Sumi, à quelque 50 kilomètres de la frontière russe.

Plus de 100.000 Ukrainiens en fuite

A la suite des attaques, des milliers de personnes ont déjà quitté Kiev. Ils se déplacent vers l’ouest de l’Ukraine. Lorsque la situation s’aggravera, ils pourront franchir la frontière plus rapidement. Aux frontières de l’Ukraine avec l’UE, notamment avec la Pologne, la Hongrie et la Roumanie, les réfugiés affluent par centaines. Environ 100.000 personnes ont fui leur foyer en Ukraine et des milliers ont quitté leur pays, selon le Haut-commissariat de l’Onu pour les réfugiés. Des témoins ukrainiens affirment que ce sont principalement des familles avec de jeunes enfants qui traversent la frontière. Des centaines de réfugiés sont déjà arrivés en Pologne. Quelque 200 personnes ont passé la nuit dans la gare polonaise de Przemysl (sud-est), transformée en centre d’accueil.

Des milliers d'Ukrainiens fuient le pays
Des milliers d’Ukrainiens fuient le pays © Reuters

Selon le président ukrainien Volodimir Zelensky depuis l’attaque russe de jeudi, au moins 137 personnes ont été tuées du côté ukrainien. Il y a eu des victimes civiles et militaires.

Volodimir Zelensky
Volodimir Zelensky© Belga

Il a aussi annoncé qu’il ne quitterait pas l’Ukraine. Il a dénoncé l’OTAN pour son refus d’envoyer des troupes et demandé le soutien de l’Union européenne pour le déploiement d’une mission de maintien de la paix des Nations unies dans son pays. « Nous sommes les seuls à défendre notre pays. (…) Tout le monde a peur » a-t-il précisé dans une vidéo. Dans la foulée il a signé un décret ordonnant la mobilisation générale. Les hommes âgés de 18 à 60 ans ne sont plus autorisés à quitter le pays.

Moscou n’annonce pas les victimes au sein de ses forces et Vladimir Poutine a menacé les Occidentaux de riposte « immédiate » s’ils tentaient « d’interférer ».

Pour l’instant, le camp occidental se concentre sur le durcissement des sanctions contre la Russie, en compliquant l’accès aux marchés financiers internationaux de ses principales institutions financières, et en restreignant drastiquement son accès aux technologies.

Joe Biden a promis de faire de Poutine « un paria sur la scène internationale » et les Nations unies ont annoncé qu’elles allouaient 20 millions de dollars (environ 17,9 millions d’euros) pour intensifier les opérations humanitaires de l’ONU en Ukraine après l’invasion russe.

« Les dirigeants russes devront faire face à un isolement sans précédent », a aussi affirmé la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. Les Vingt-Sept ne sont cependant pas allés jusqu’à exclure la Russie du système d’échanges bancaires internationaux Swift, comme Kiev le demandait.

Après avoir plongé jeudi matin, les Bourses mondiales reprenaient du poil de la bête vendredi.

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