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« Le G8 se doit d’aider les pays arabes »

Les leaders du G8 réunis à Deauville veulent soutenir les pays arabes en transition. Peut-on espérer des mesures concrètes? LEXPRESS.fr a interrogé Pascal Boniface, directeur de l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS).

Le G8 est-il encore un acteur décisionnaire dans les évolutions en cours dans le monde arabe ?

Oui et non. Le G8 n’a jamais été un directoire mondial et la montée en puissance des pays émergents a fait perdre au G8 son quasi-monopole sur la direction du monde. Mais s’il s’agit de donner un coup de pouce financier aux pays arabes qui ont pris la voie des réformes, principalement à l’Egypte et la Tunisie, cela reste possible, au moins pour une partie des membres de l’organisation. Il n’est en effet pas certain que la Russie s’engage à contribuer à cette aide. Mais les autres grands pays occidentaux ne devraient pas avoir trop de mal à réunir des fonds pour soutenir les économies égyptienne et tunisienne.

Le modèle de la transition en Europe de l’Est au début des années 1990 est évoqué à titre de comparaison avec les pays arabes. Qu’en est-il?

On ne peut pas faire l’analogie entre les deux phénomènes. En Europe de l’Est, il y a eu un changement complet de modèle économique: on est passé d’économies dirigées à des économies libérales. En Egypte et en Tunisie, on est déjà dans ce cadre-là. Il s’agit cette fois de répondre à une demande d’urgence liée à la baisse des revenus, principalement touristiques, et à l’afflux de réfugiés de Libye dans ces deux pays. Le but est d’empêcher qu’ils ne soient trop fragilisés. Il faut faire en sorte que la population ne jette pas l’opprobre sur une transition démocratique qui s’accompagnerait d’un fort recul de l’économie.

Risque-t-on d’assister à des discours peu suivis d’effet ou peut-on au contraire imaginer des retombées concrètes dans les pays en transition?

C’est toujours le risque. On a souvent vu, par le passé, des promesses d’aide qui n’étaient par la suite pas respectées. Mais je pense que, dans le contexte actuel, les pays du G8 ne peuvent pas prendre des engagements et ne pas les tenir. On leur reprocherait d’avoir été aveugles, égoïstes, de ne pas avoir été à la hauteur des événements.

Autre sujet au programme du G8, la relance des négociations israélo-palestiniennes, a-t-elle une chance d’avancer, quelques jours après le discours remarqué d’Obama?

Cela semble peu probable après la fin de non recevoir apportée par Benyamin Netanyahu au discours d’Obama en faveur d’un Etat palestinien sur la base des lignes de juin de 1967. Surtout après les applaudissements qui ont salué la réponse du Premier ministre israélien au Congrès américain. L’attitude du Congrès, autant qu’un encouragement à Netanyahu, a constitué un désaveu pour Barack Obama. Il y a peu de chance pour une percée sur le processus de paix dans les quinze mois qui viennent, avant la prochaine élection présidentielle. Raison de plus pour que le G8 annonce des actions concrètes en faveur de la Tunisie et de l’Egypte; c’est bien un des seuls domaines où des mesures peuvent être objectivement mises en oeuvre.

Propos recueillis par Catherine Gouëset, L’Express.fr

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