Bolsonaro saluant la foule sur l'Esplanade des ministères. © Andressa Anholete

Le Brésil connaît l’une des pires épidémies de coronavirus au monde, surtout pour les jeunes

Antoine Denis Journaliste

Ce 22 mai, le Brésil a confirmé plus de 310 087 cas positifs et 20 047 décès, ce qui en fait le troisième pays le plus touché au monde. Aujourd’hui, les jeunes sont particulièrement touchés, le président est toujours contre les lockdowns et promeut l’hydroxychloroquine.

Le coronavirus tue plus de jeunes au Brésil

La proportion de jeunes adultes morts du coronavirus est plus élevée au Brésil que dans la plupart des autres pays, notamment chez les plus pauvres, qui ont plus de mal à respecter les règles de distanciation sociale. Dans ce pays de 210 millions d’habitants, d’une moyenne d’âge bien plus jeune qu’en Europe, 69 % des personnes décédées du Covid-19 avaient plus de 60 ans, contre 95 % en Espagne ou en Italie, selon les derniers bilans officiels.

Cette différence s’explique tout d’abord par la pyramide des âges : 13,6 % des Brésiliens seulement ont plus de 60 ans, contre 25 % en Espagne et 28 % en Italie. Mais d’autres facteurs entrent en ligne de compte. Le taux de confinement, mesuré à partir du signal des téléphones mobiles, est en baisse constante depuis un mois, alors que le président d’extrême droite Jair Bolsonaro, coronasceptique, ne cesse de remettre en cause les mesures restrictives prises par les gouverneurs des États.

La part des moins de 60 ans dans les décès liés au coronavirus, qui était de 19 % début avril, est passée à 31 % cette semaine, alors que le pays a franchi la barre des 1 000 morts quotidiens pour la première fois mardi et que la courbe s’accélère. Le Brésil déplore officiellement 20 047 décès.

Pour Mauro Sanchez, épidémiologiste de l’Université de Brasilia, « la plupart de ceux qui ne respectent pas le confinement sortent de chez eux parce qu’ils n’ont pas le choix », une allusion aux millions de travailleurs pauvres dont les revenus dépendent exclusivement du secteur informel, comme les vendeurs ambulants. « Si le gouvernement avait mis en place une politique d’aide massive des personnes les plus vulnérables, peut-être que les gens resteraient davantage chez eux », poursuit-il.

Une allocation de 600 réais (environ 100 euros) est prévue pour les travailleurs informels. Mais beaucoup d’entre eux ont eu du mal à s’inscrire et des foules se sont agglutinées pour affronter de longues files d’attente de plusieurs heures devant les succursales de la banque publique Caixa.

Bolsonaro contre le reste du pays

L’attitude de Bolsonaro a sapé les tentatives de contrôle du virus et a bloqué toute chance d’une réponse fédérale coordonnée. Les gouverneurs des États l’ont défié et ont mis en place des mesures de lockdown strictes. São Paulo et Rio de Janeiro, deux des États les plus durement touchés, ont renforcé les restrictions ces dernières semaines, notamment en prolongeant les ordonnances de séjour à domicile et en rendant les masques obligatoires. La Cour suprême du Brésil a soutenu le pouvoir des États qui mettent en oeuvre des mesures de confinement. Pendant ce temps, le président tente de repousser les efforts des États.

Avec un discours contradictoire de la part du président, des gouverneurs et des maires, certaines personnes se retrouvent dans le flou. Elles peuvent choisir de suivre qui elles veulent. Cela entraine un défi majeur pour l’adhésion aux mesures.

Comme Donald Trump, Bolsonaro promeut l’hydroxychloroquine

L’hydroxychloroquine et la chloroquine sont des médicaments antipaludiques qui ont été considérés dès le début de la pandémie comme un traitement possible contre le coronavirus. Aujourd’hui, son efficacité est controversée. Pourtant, Donald Trump a déclaré en prendre de manière préventive. Bolsonaro quant à lui, a adopté une approche similaire en promouvant le médicament sans prendre en compte les conseils des responsables de la santé publique.

La semaine dernière, le président brésilien a ordonné à son ministre de la santé, Nelson Teich, de publier de nouvelles directives fédérales pour permettre une utilisation plus large des médicaments antipaludiques pour traiter le Covid-19. Cependant, ce dernier, en désaccord avec Bolsonaro sur l’utilisation de l’hydroxychloroquine, a préféré démissionner.

Nelson Teich avait pris la tête du ministère de la Santé en avril, après que Bolsonaro ait renvoyé le précédent ministre de la Santé, Luiz Henrique Mandetta. Ce dernier l’avait publiquement contredit, prônant des mesures de distanciation sociale et soutenant les ordres de fermeture des gouverneurs de l’État.

Sur Twitter, Bolsonaro a déclaré mercredi que bien que la chloroquine n’ait pas été scientifiquement prouvée comme traitement, « elle est étudiée et utilisée au Brésil et dans le monde entier ». « Nous sommes pourtant en guerre : pire que d’être vaincu, ce serait la honte de ne pas avoir combattu », a-t-il écrit.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire