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La France formalise sa première vente à l’export du Rafale, malgré les critiques

La France formalisera lundi la première vente à l’export de son emblématique avion de chasse, le Rafale, au profit de l’Egypte, une bonne nouvelle sur le plan économique qui fait toutefois grincer quelques dents chez les défenseurs des droits de l’homme.

Le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian se rend au Caire pour la cérémonie de signature avec le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi. Le contrat, d’un montant de 5,2 milliards d’euros, porte sur la vente de 24 avions Rafale à l’Egypte, fabriqués par Dassault Aviation, une frégate FREMM du groupe naval DCNS, ainsi que des missiles, fabriqués par MBDA.

L’opération a été bouclée en moins de trois mois, après que le président égyptien a fait part de son intention d’acheter du matériel militaire français. « Avec l’Égypte, ça s’est fait très rapidement », a souligné le président de la République François Hollande. « D’abord parce que l’Égypte voulait un avion de grande qualité » et « rapidement compte tenu des menaces qui existent autour de ce pays ».

L’inquiétude grandit en effet dans les capitales occidentales et dans certains pays de la région face à l’expansion du groupe Etat islamique (EI) en Syrie et en Irak, et aux risques de déstabilisation régionale que cela engendre.

Confrontée sur son flanc est à des attaques de djihadistes liés à EI et, sur son flanc ouest à la situation explosive en Libye, Le Caire estime avoir besoin d’un avion de combat éprouvé afin de renforcer ses capacités d’intervention.

« Dans le contexte actuel, c’est très important que l’Égypte puisse agir pour la stabilité et être en sécurité », a justifié M. Hollande jeudi à Bruxelles. « La sécurité était également nécessaire compte tenu de la frontière commune (de l’Égypte) avec la Libye et de la lutte contre le terrorisme, et compte tenu de ce qui se passe aussi dans le Sinaï », a-t-il ajouté.

Cette vente, cruciale à plusieurs titres pour Dassault et l’Etat français, est pourtant critiquée au vu du bilan en termes de droits de l’homme du régime égyptien. Juste avant qu’elle ne soit bouclée, Amnesty International France a appelé Paris à « suspendre tous les transferts d’armes » à l’Égypte en raison de la « répression, sans précédent depuis 30 ans » dans le pays.

La secrétaire nationale du parti écologiste EELV, Emmanuelle Cosse, s’est pour sa part étonnée de la « priorité » accordée par l’Égypte à l’achat de ces avions vu « la difficulté économique et sociale dans laquelle elle est, une Égypte qui, a-t-elle rappelé, il y a une semaine, n’a pas hésité à tirer sur des manifestants ».

Interrogé sur le sujet, M. Le Drian a répondu: « à ma connaissance, le président Sissi a été élu par le peuple et, d’ailleurs, il y aura bientôt des élections législatives dans le pays. C’est tout ce que j’ai à dire ».

La France est engagée depuis septembre dernier dans la lutte contre EI en Irak, avec notamment des Rafale. Elle est également présente depuis 2013 contre les mouvements islamistes au Mali. Sur le plan économique, ce contrat est une aubaine pour Paris et l’avionneur, qui n’étaient pas parvenus jusque-là à vendre le Rafale à l’export.

Pour Dassault, cette première vente était très attendue afin d’assurer la cadence de la chaine de production de l’appareil. Pour l’État français aussi, alors que le budget de la défense, qui comprend une longue liste de matériels à acquérir au profit des armées, est tendu et s’appuie sur la vente de l’appareil à l’exportation.

Economie et géopolitique ont donc convaincu Paris de consentir « un certain nombre d’efforts » sur le financement, a précisé M. Hollande. Elle permet par ailleurs d’en espérer d’autres, a souligné le PDG de Dassault Aviation, Eric Trappier. « Cette vente à un grand pays arabe va faire boule de neige », a-t-il dit.

Parmi eux, le Qatar et les Émirats arabes unis, ou la Malaisie à plus long terme. M. Trappier s’est également montré optimiste sur la vente de 126 Rafale avec l’Inde, avec lequel Dassault est en négociations exclusives depuis 2012, mais dont la complexité retarde la conclusion.

L’appareil « a été engagé dans de nombreux théâtres d’opération et les observateurs que sont l’ensemble des pays de la région en particulier ont pu voir son efficacité opérationnelle aux mains de l’armée de l’air française », a-t-il fait valoir. Il est également en lice pour le remplacement des F-16 belges, pour laquel un contrat est attendu en 2018.

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