Image d'illustration. © Reuters

Israël : taxé de traître, car il dénonce l’absurdité de l’occupation des Territoires palestiniens

Le Vif

Ancien militaire, Achiya Schatz est le porte-parole de Breaking The silence, une organisation qui souhaite relayer les témoignages anonymes de militaires israéliens ayant servi dans les territoires occupés. Une initiative qui réveille la hargne d’une partie de la classe dirigeante israélienne.

Achiya Schatz n’a pas le profil d’un « traître à Israël ». Il a servi dans les troupes d’élite de Duvdevan et était connu pour sa célérité à passer des menottes aux Palestiniens. Suite à son service militaire, il a travaillé comme émissaire de l’Agence Juive, une Agence sioniste qui  » oeuvre afin de créer un avenir radieux pour les Juifs » selon son site. Pas vraiment le « pedigree » d’un traître donc . Et pourtant on l’accuse, lui et l’organisation dont il est le porte-parole, Breaking The silence, de poignarder l’État d’Israël dans le dos et de mettre en danger la vie des citoyens israéliens.

Breaking the Silence est une organisation pacifiste qui dénonce les exactions de l’armée israélienne dans les Territoires palestiniens occupés. Elle a été fondée en 20014 par d’anciens militaires. Ils témoignent d’abus auxquels ils ont assisté ou ont pris part dans le cadre de leur service militaire dans les territoires palestiniens occupés. Ils ne s’en prennent pas aux militaires, mais bien aux politiciens qui perpétuent l’occupation.

Comme l’ONG écorne l’image d’Israël à l’étranger, elle est devenue ces derniers temps la principale cible de la vindicte de l’aile droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu selon The Independent. Et la vague de dénigrement est puissante puisqu’en quelques jours, l’ONG a été dénoncée au sein de la Knesset par Netanyahu en personne. Le ministre de la Défense lui a interdit tout contact avec les soldats et le ministre de l’Éducation lui refuse l’accès aux écoles au motif que l’ONG répand des « mensonges ». Les réservistes le traitent de traître et on accuse ses membres de monter de toutes pièces les témoignages. L’ancien ministre de la Défense Moshe Arens trouve que l’ONG Breaking the Silence ferait mieux de simplement rapporter aux autorités ces incidents plutôt que de les publier. Et déplore le peu de confiance qu’ils accordent à l’armée.

Malgré les pressions, Schatz reste persuadé que la meilleure chose qui puisse arriver à Israël est de mettre fin à l’occupation des territoires. « Car aussi civilisé qu’on soit, on ne peut occuper un territoire proprement. Il est inévitable qu’à un moment on s’en prenne à la population. Donc il n’y a d’autre issue que de mettre fin à cette même occupation » dit-il dans The Independent.

Projet de durcissement de la loi sur les ONG financées par l’étranger

Un texte controversé prévoyant de durcir la législation sur les ONG recevant des fonds de l’étranger a été adopté fin décembre en Israël, une initiative dénoncée par les organisations de gauche comme une chasse aux sorcières. Ce texte prévoit d’obliger les ONG israéliennes recevant au moins 50% de leurs fonds de la part d' »entités étatiques à l’étranger » à mentionner l’identité et l’adresse de leurs donateurs dans leurs déclarations financières aux organismes publics israéliens. Il impose également aux membres de ces ONG de porter des badges spéciaux les identifiant lorsqu’ils se présenteront devant des comités parlementaires, comme c’est déjà le cas pour les membres de lobbies.

« C’est une avancée préoccupante dans les efforts de la droite pour délégitimer ces organisations et les réduire au silence », affirmait dans son éditorial le quotidien Haaretz, proche du centre gauche. Le projet, porté par la ministre de la Justice Ayelet Shaked, étoile montante de la droite nationaliste religieuse, « porte un rude coup à la liberté d’expression », estime le journal.

Le projet de loi doit encore être soumis au Parlement en trois lectures avant d’être définitivement adopté. Lors de la publication du texte, Mme Shaked l’a justifié en affirmant que « les interférences flagrantes de gouvernements étrangers dans les affaires internes israéliennes sont nombreuses et sans précédent ». Elle a notamment pris comme exemple une enquête de l’ONU sur la guerre de l’été 2014 qui a conclu à de possibles crimes de guerre d’Israël dans la bande de Gaza.

Lire aussi : Gaza: « Il n’y a plus de civils, tirez sur tout ce qui bouge »

Selon la ministre, les Nations unies se sont basées sur des preuves recueillies par B’Tselem, Adalah et Breaking the Silence, des ONG israéliennes qui reçoivent des fonds étrangers. « Nous demandons aux Etats qui souhaitent intervenir dans les affaires internes d’Israël de le faire publiquement par la voie diplomatique », a affirmé dimanche la ministre dans un communiqué. Nombre d’ONG israéliennes de gauche reçoivent une part importante de leur financement de gouvernements occidentaux. Cinq d’entre elles ont récemment déclaré à l’AFP se sentir visées par l’actuel gouvernement de droite en raison de leurs critiques envers la politique gouvernementale.

Les ONG de droite, elles, préfèrent chercher leur financement auprès de particuliers, souvent à l’extérieur d’Israël aussi, mais ne sont donc pas concernées par les restrictions proposées.

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