Privés d’électricité, beaucoup d’Ukrainiens redoutent les affres d’un hiver rude. D’où l’urgence de pouvoir réparer les installations électriques. © getty images

Guerre en Ukraine: les limites de la stratégie russe

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Depuis début octobre, la Russie a entrepris de détruire des infrastructures énergétiques ukrainiennes pour désorganiser le pays. Si elle voulait poursuivre cette tactique, les moyens pourraient faire défaut. Au contraire de ceux de Kiev pour s’en prémunir.

Pendant une semaine à partir du 10 octobre et durant quelques jours après le 31 octobre, la Russie a procédé à deux vagues de bombardements en de multiples endroits de l’Ukraine. Objectif: détruire des infrastructures énergétiques et terroriser la population – directement en frappant aussi des bâtiments civils et indirectement en la privant d’alimentation en électricité. Ces opérations répondaient à des attaques, prêtées aux Ukrainiens mais jamais revendiquées par eux, contre le pont de Kertch reliant la Russie à la Crimée, le 8 octobre, et contre la flotte russe stationnée aux abords de la base navale de Sébastopol, le 29 octobre.

Elles inauguraient surtout une nouvelle phase de la guerre où, en prévision d’un hiver rude, affaiblir la population en la démoralisant pourrait, selon les stratèges à Moscou, constituer un tournant dans le conflit. Faute de pouvoir en établir un sur le terrain comme le démontrent la progression, lente mais constante, de l’armée ukrainienne sur le front de Kherson dans le sud du pays, et sa résistance aux offensives russes dans l’est de l’Ukraine, autour de la ville de Bakhmout notamment.

Les autorités ukrainiennes se montrent circonspectes après l’annonce par la Russie du retrait de ses forces de Kherson, s’attendant à devoir continuer à se battre pour conquérir cette capitale régionale prise par Moscou au début de son offensive.

Selon le commandant en chef des forces armées ukrainiennes, Valeri Zaloujny, 278 avions russes ont été abattus depuis le début du conflit.

Considérant qu’un tiers au moins des installations énergétiques de l’Ukraine a été détruit, l’enjeu pour les Russes est de pouvoir poursuivre cette stratégie par d’autres attaques de sites sensibles ; pour les Ukrainiens, il est de les prévenir et de réparer au plus vite les infrastructures endommagées. Dans cette course contre la montre, il n’est pas sûr que la Russie puisse encore imposer longtemps l’ évidente domination aérienne dont elle pouvait se prévaloir à l’entame du conflit.

Dans son bulletin du 7 novembre, l’Institut pour l’étude de la guerre (ISW), à Washington, explique en substance que la Russie a grandement épuisé son arsenal d’armes de haute précision, que son aviation a subi des pertes significatives, et qu’elle aura probablement du mal à maintenir le rythme actuel de la campagne coordonnée contre les infrastructures critiques ukrainiennes. L’ analyse du centre d’études se fonde sur les données fournies, le 3 novembre, par le commandant en chef des forces armées ukrainiennes, Valeri Zaloujny, qui a assuré que 278 avions russes avaient été abattus depuis le début du conflit, et par celles livrées à l’hebdomadaire The Economist par le chef adjoint du renseignement militaire ukrainien, Vadym Skibitsky, selon lequel la Russie aurait déjà utilisé plus de 80% de ses missiles modernes.

A ces perspectives s’ajoutent le renforcement de la défense ukrainienne permis par l’arrivée, annoncée par Kiev le 7 novembre, de nouveaux systèmes antiaériens occidentaux, et l’effort de remise en état des installations électriques, envisagée aux alentours du 15 novembre pour la région de Kiev et le nord de l’Ukraine. La nouvelle stratégie de la Russie pourrait donc être passablement entravée.

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