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Guerre en Ukraine: comment se positionnent les puissances mondiales?

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Outre la Russie et l’Ukraine, de nombreux acteurs ont un rôle à jouer. Si certains se cantonnent à une alliance de longue date, d’autres hésitent davantage à prendre publiquement position. Entre alliés de toujours, soutiens d’aujourd’hui et stratégie géopolitique, Le Vif fait le tour des protagonistes impliqués dans la guerre en Ukraine.

Parmi les principaux protagonistes, on retrouve Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky.

Vladimir Poutine, président de la Russie

Sa position : souhaite la neutralité de l’Ukraine, « dénazifier » le pays par la chute de son gouvernement et la reconnaissance des régions séparatistes.

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Son implication : en Russie, l’invasion est officiellement appelée « opération militaire spéciale ».

Sa petite phrase : « Nous nous efforcerons d’arriver à une démilitarisation et une dénazification de l’Ukraine. (…) Nous n’avons pas dans nos plans une occupation des territoires ukrainiens, nous ne comptons imposer rien par la force à personne »

Volodymyr Zelensky, président de l’Ukraine

Sa position : défendre l’Ukraine à tout prix face à l’invasion russe

Son implication : son objectif principal, c’est se montrer sur le terrain et interpeller les Occidentaux pour les pousser à agir davantage en faveur de l’Ukraine.

Sa petite phrase : « Si nous disparaissons, que Dieu nous protège, ensuite ce sera la Lettonie, la Lituanie, l’Estonie etc… Jusqu’au mur de Berlin, croyez-moi »

Alexandre Loukachenko, président du Bélarus

Sa position: voisin et allié de la Russie, déjà sous le coup de sanctions européennes.

Son implication : avant le début de la guerre, le Bélarus a autorisé les forces armées russes à effectuer des exercices militaires sur son territoire, que les Russes n’ont finalement pas quitté. Le pays est utilisé en quelque sorte comme rampe de lancement pour l’invasion des troupes russes, sans opposition du régime en place. Le Bélarus a dans un premier temps nié son rôle dans le conflit, mais a depuis admis avoir autorisé les lance-missiles russes stationnés sur son territoire à tirer sur des cibles ukrainiennes.

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L’implication du Bélarus a été condamnée par les pays occidentaux, avec des sanctions à la clé.

La frontière biélorusse sert également de lieu de pourparlers entre la Russie et l’Ukraine, avec pour l’instant un succès très mitigé. Les discussions ont eu lieu dans l’une des résidences du président, sur la frontière ukraino-bélarusse.

Sa petite phrase : « Il ne faut en aucun cas permettre une invasion des forces de l’Otan sur le territoire bélarusse, ni leur moindre opération sur notre territoire »

Bachar al-Assad, président de la Syrie

Sa position: la Syrie est historiquement liée à l’Union soviétique puis à la Russie par des accords militaires, la Russie étant impliquée depuis 2015 dans le conflit syrien aux côtés du régime du président Bachar al-Assad

Son implication : Bachar al-Assad a personnellement salué l’invasion de l’Ukraine lors d’un entretien téléphonique avec Vladimir Poutine. La Syrie a confirmé son soutien, son président étant convaincu du bien-fondé de sa quête. Selon Assad, la Russie est en droit de faire face à l’élargissement de l’Otan

Selon les USA, la Russie recrute des mercenaires syriens ayant l’expérience de la guérilla urbaine pour combattre en Ukraine.

Sa petite phrase : « Ce qui se passe aujourd’hui est une correction de l’Histoire et un rétablissement de l’équilibre de l’ordre international après la chute de l’Union soviétique »

Nicolas Maduro, président du Venezuela

Sa position: soutien de la Russie, c’est le plus important partenaire commercial et militaire de la Russie en Amérique latine. La Russie a reconnu Nicolás Maduro comme président, à la place de Juan Guaidó, lors de la crise vénézuélienne, un de ses rares alliés sur la scène internationale.

Son implication : le président a clairement condamné les sanctions occidentales dont la Russie fait l’objet, les qualifiant de « crime » et de « folie ». Il estime que c’est la Russie qui est menacée, ainsi que son peuple, mais se positionne néanmoins en faveur de négociations pour rétablir la paix dans la région.

Son prédécesseur et mentor Hugo Chavez avait déjà soutenu la Russie lorsque celle-ci était intervenue en Géorgie, y volant au secours de la république autoproclamée d’Ossétie du Sud.

Sa petite phrase : « C’est un crime ce qu’ils [les Occidentaux] font contre le peuple russe, une guerre économique »

Ramzan Kadyrov, leader de la Tchétchénie

Sa position : bras armé et fidèle du Kremlin, dont il reprend l’argumentaire

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Son implication : après l’invasion russe de l’Ukraine, des images ont circulé sur les réseaux sociaux montrant une place de Grozny, capitale tchétchène, noire de soldats affirmant être sur le départ pour l’Ukraine. Le leader a lui-même partagé des vidéos de combattants tchétchènes en Ukraine et a déclaré que certains avaient été tués dans les combats.

Sa petite phrase : « L’armée russe n’attaque pas (…) elle souhaite que les Ukrainiens puissent déterminer leur propre destin »

Xi Jinping, président de la Chine

Sa position : Le président Xi Jinping avait offert son soutien à Vladimir Poutine peu avant l’offensive russe. Mais aujourd’hui, sa position est plus floue. La Chine ne condamne pas l’invasion et se montre prudente, mais refuse le mot « invasion » et rejette volontiers la faute du conflit sur les Occidentaux et « l’expansion » de l’Otan.

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Son implication : La Chine a choisi l’abstention plutôt que le veto lorsque le Conseil de sécurité de l’ONU a « déploré » l’agression russe. Elle appelle à des négociations, et exprime auprès de Kiev son « profond regret » face à cette guerre. La Chine a envoyé une aide humanitaire d’une valeur de 720.000 euros vers l’Ukraine.

Sa petite phrase : « La position fondamentale de la Chine est le respect de la souveraineté et l’intégrité territoriale de tous les pays »

Recep Tayyip Erdogan, président de la Turquie

Sa position : la Turquie est membre de l’Otan, mais n’a ni adopté de sanctions ni fermé son espace aérien à la Russie. Aussi alliée de l’Ukraine, la Turquie tente de maintenir ses relations avec la Russie dont elle dépend pour nombre de ses importations.

Son implication : la Turquie veut jouer un rôle de médiation et prône une résolution pacifique du conflit. Erdogan est prêt à attribuer sa contribution « sous toutes ses formes ». Les premiers pourparlers directs entre ministres des Affaires étrangères russe Serguei Lavrov et ukrainien Dmytro Kuleba ont d’ailleurs eu lieu ce jeudi à Ankara.

Sa petite phrase : « Ouvrons ensemble la voie de la paix »

Les Emirats arabes unis

Leur position : les Emirats, soutien de longue date des Etats-Unis, ont été jusqu’à présent réticents à condamner l’invasion russe.

Leur implication : autrefois perçu comme « la marionnette des USA », le géant pétrolier semble de plus en plus indépendant sur la scène internationale. Les Emirats se sont abstenus lors d’un vote du Conseil de sécurité des Nations. Ils s’abstiennent également d’appuyer l’administration Biden dans ses sanctions contre Moscou.

Le conflit fait grimper les coûts de l’énergie mais les pays du Golfe résistent pour le moment aux pressions occidentales visant à augmenter la production de pétrole pour faire baisser les prix.

Sa petite phrase : « Nécessité d’une solution pacifique à la crise de façon à garantir les intérêts de toutes les parties et leur sécurité nationale »

Narendra Modi, Premier ministre de l’Inde

Sa position : l’Inde se veut plutôt neutre entre la Russie et l’Occident, ayant des intérêts dans les deux camps. Proche de l’Union soviétique pendant la Guerre froide, l’Inde est considérée par Moscou comme un allié « sûr ». La Russie est son premier fournisseur d’armes. L’Inde fait également partie du « Quad », une alliance stratégique informelle avec les Etats-Unis, le Japon et l’Australie pour contrer l’influence chinoise.

Son implication : l’Inde s’est abstenue sur une résolution déplorant l’agression russe au Conseil de sécurité de l’ONU. Elle espérait ainsi montrer sa neutralité, mais ce geste est vu comme un soutien de facto à Moscou. C’est le seul membre du « Quad » qui s’est pour l’instant gardé de condamner la Russie, se contentant d’exhorter les deux parties à cesser les hostilités.

Sa petite phrase : « Les différends entre Russie et Otan ne peuvent être résolus que via un dialogue honnête et sincère »

Emmanuel Macron, président de la France

Sa position : Européen convaincu, il a clairement affiché sa solidarité avec l’Ukraine. Il tente toutefois de garder des liens diplomatiques avec Vladimir Poutine pour tenter de mettre fin au conflit, tout en incitant à durcir les sanctions contre la Russie.

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Son implication : le président français est très impliqué dans la crise. Déjà avant l’invasion, il avait des contacts réguliers avec Vladimir Poutine pour le dissuader de passer à l’action, sans succès. Il continue néanmoins à jouer le rôle de « médiateur », contactant les deux parties et étant à l’origine de rencontres européennes pour discuter de la situation et de ses conséquences pour l’Union européenne. Un rôle qui lui confère pour l’instant un élan dans les sondages, à un mois de la présidentielle.

Sa petite phrase : « Nous appuierons l’Ukraine sans hésiter, et nous prendrons toutes nos responsabilités pour protéger la souveraineté et la sécurité de nos alliés européens »

Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne

Sa position : l’UE donne son plein soutien à l’Ukraine et condamne la Russie. Von der Leyen parait plutôt favorable à l’adhésion de l’Ukraine, mais le sujet divise les Etats membres.

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Son implication : le conflit a en quelque sorte donné nouveau souffle à l’Union européenne. Dans un coup d’accélérateur à cette Europe de la défense voulue par Paris mais longtemps dans les limbes, les vingt-sept ont se sont entendus, vite, et sur des sanctions d’une ampleur inédite. Objectif : isoler la Russie. Une dynamique qui surprend, tant elle contraste avec les atermoiements traditionnels. Certains pays de l’est, Pologne en tête, poussent pour s’affranchir très rapidement des approvisionnements russes. La Pologne est par ailleurs particulièrement impactée par la guerre avec la gestion de l’accueil de milliers de réfugiés. Selon les derniers chiffres, 2.645.877 d’entre eux sont entrés en Pologne depuis le 24 février.

Sa petite phrase : « Le destin de l’Ukraine est en jeu, mais notre propre destin est également dans la balance. Nous devons montrer la puissance qui réside dans nos démocraties »

Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’Otan

Sa position : l’Otan se positionne clairement du côté de l’Ukraine, avec une surveillance accrue de la situation dans les pays voisins membres de l’Alliance.

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Son implication : si Poutine refuse d’avoir un pays de l’Otan à ses portes, l’invasion russe a finalement eu pour effet de renforcer l’Alliance et de resserrer l’alignement transatlantique, retrouvant sa raison d’être.

L’Alliance n’a pas de troupes en Ukraine et n’a pas l’intention d’en envoyer, mais les forces armées des pays de l’Otan ont été placées en état d’alerte et des unités font mouvement pour renforcer les défenses des alliés sur le flanc Est. La Force de réaction de l’Otan, un corps de 40.000 militaires mobilisables rapidement, a été mobilisée. Objectif : renforcer encore son dispositif de défense et être en mesure de réagir rapidement à toute éventualité.

Sa petite phrase : « Le président Poutine a brisé la paix en Europe »

Boris Johnson, Premier ministre du Royaume-Uni

Sa position : il a directement et vivement condamné Vladimir Poutine, le qualifiant de « dictateur », et a affiché son soutien à l’Ukraine

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Son implication : il a été très entreprenant depuis l’invasion russe, appelant à des réunions d’urgence de l’Otan, du Conseil de sécurité de l’ONU et du Conseil de l’Europe. Le gouvernement a rapidement pris des sanctions, tout en étant accusé de fermer les yeux sur l’origine de l’argent russe affluant à Londres. Il est également régulièrement en contact avec le président ukrainien et incite à plus de sanctions.

Dans une posture intra-britannique délicate, le conflit lui permet de retrouver un caractère rassembleur après les scandales de fêtes à Downing Street pendant le confinement.

Sa petite phrase : « Diplomatiquement, politiquement, économiquement et, en fin de compte, militairement, cette entreprise atroce et barbare de Vladimir Poutine doit se solder par un échec »

Antony Blinken, secrétaire d’Etat des Etats-Unis

Sa position : les Etats-Unis ont longtemps tiré la sonnette d’alarme avant l’invasion russe. Le chef de la diplomatie américaine se dit prêt à soutenir des efforts diplomatiques pour obtenir un cessez-le-feu.

Son implication : en plus de l’aide humanitaire, les Etats-Unis fournissent de l’aide militaire à l’Ukraine pour des centaines de millions de dollars. Le chef de la diplomatie américaine a rapidement suggéré d’exclure la Russie du Conseil des droits de l’homme des Nations unies.

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Dans ses diverses communications, Blinken s’est également adressé directement au peuple russe, en lui disant qu’il ne « méritait pas » une guerre menée contre ses « voisins » ukrainiens et lui assurant que personne n’essayait de « mettre en péril » sa sécurité. Il s’est également rendu en Pologne pour constater sur place, notamment, la situation des réfugiés qui fuient l’Ukraine.

Sa petite phrase : « Nous avons vu des informations très crédibles concernant des attaques délibérées sur des civils qui constitueraient un crime de guerre »

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