Les postes de pouvoir de l’UE : une équipe encore fragile

Le Vif

Les dirigeants de l’Union européenne ont brisé le plafond de verre avec la désignation mardi de deux femmes aux postes de pouvoir, mais la candidate pour la présidence de la Commission européenne, l’Allemande Ursula von der Leyen, pourrait être recalée par le Parlement européen.

« Ce n’est pas acquis pour Ursula von der Leyen (membre de la CDU-droite), car le Parti Populaire Européen (PPE-droite) n’est pas unanimement derrière elle et elle rencontre une résistance très importante chez les socialistes », a estimé mercredi un responsable européen sous couvert de l’anonymat.

La nomination du chef de l’exécutif bruxellois est une compétence partagée. Le candidat choisi par les chefs d’Etat et de gouvernement doit être approuvé par un vote du Parlement européen.

Les trois autres nominations relèvent de la seule décision des dirigeants européens.

Or, le Parlement européen est le grand perdant du processus de nominations. Ses candidats, l’Allemand Manfred Weber pour le PPE, et le Néerlandais Frans Timmermans pour les Socialistes, ont tous deux été recalés par les chefs d’Etat.

Les élus ont le sentiment d’être appelés à valider un choix qui n’est pas le leur, et certains vont s’y opposer. Le groupe socialiste, deuxième force du Parlement avec 154 élus, a annoncé être « très déçu » par les chefs d’Etat et les Verts, quatrième force avec 74 élus, ont d’ores et déjà annoncé qu’ils ne lui donneraient pas leurs suffrages.

L’élection mercredi du social-démocrate italien David Sassoli à la présidence du Parlement européen pourrait permettre de panser les blessures de certains socialistes, mais le SPD allemand reste très remonté contre l’élimination de Frans Timmermans. Et le groupe du PPE n’a pas digéré celle de Manfred Weber.

Pour être élue, Ursula von der Leyden aura besoin d’une majorité de 376 voix, impossible à obtenir si les Socialistes et les Verts refusent de lui donner leurs voix. Le groupe du PPE et les libéro-centristes de Renew totalisent 290 voix.

– « Godillot » –

Le vote sur la nomination d’Ursula von der Leyen est programmé pour la deuxième session du mois, du 15 au 18 juillet. Mais il pourrait être reporté à septembre pour lui permettre de s’assurer une majorité.

« Elle risque d’être très courte », a estimé Sébastien Maillard, directeur de l’institut Notre Europe, un centre de réflexion fondé par l’ancien président de la Commission Jacques Delors.

« L’institution est plutôt godillot. Elle hurle, et à la fin elle se couche. Mais qui sait ? », a confié à l’AFP un élu européen expérimenté.

La France et l’Allemagne ont pris les commandes des institutions clefs de l’UE avec la désignation de deux femmes de droite, Ursula von der Leyen à la Commission et Christine Lagarde à la BCE. Le Premier ministre libéral belge Charles Michel dirigera le Conseil européen et le socialiste espagnol Josep Borrell la diplomatie.

Les pays de l’Est de l’Europe ont été évincés dans la répartition des postes de pouvoir. « Leurs dissensions les ont empêchés de proposer des candidats », souligne Jonathan Faull, un ancien haut fonctionnaire européen, membre du Brunswick group, un centre de conseil aux entreprises. « C’est le prix pour s’être opposés à tout », explique un diplomate européen de haut rang.

Les votes de leurs élus au Parlement européen pourraient manquer à Mme von der Leyen, candidate des pays fondateurs de l’Union européenne.

La mise à l’écart de l’Est de l’Europe pourrait également poser de sérieux problèmes au moment où l’UE est profondément divisée face aux migrations et aux menaces pour sa sécurité et sa défense, sans oublier la lutte contre le réchauffement du climat. Sur ces trois grands thèmes, les pays de l’Est s’opposent à la vieille Europe.

Les nouveaux dirigeants de l’Europe sauront-ils faire face à ces défis? « On verra dans le feu de l’action », a commenté Jonathan Faull.

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