Emmanuel Macron © BELGAIMAGE

A Paris, un Forum sur la paix où l’on parle peu de la guerre

Le Vif

A mi-chemin entre Davos et la COP21, Emmanuel Macron a voulu réunir chefs d’Etat et société civile à l’occasion du Forum de Paris sur la paix. Une initiative plutôt applaudie, qui assume de laisser sur la touche certains conflits actuels.

Dans la grande halle de la Villette, dans le nord de la capitale française, une centaine d’associations ou d’entreprises présentent jusqu’à mardi des initiatives pour améliorer la « gouvernance mondiale ».

« Comptez sur mon soutien », sourit le président kényan Uhuru Kenyatta, en quittant le stand de Kumekucha, une association de son pays qui lutte contre les violences dans les communautés rurales.

« C’est un lien qu’on essaie d’établir depuis 18 mois et là, le président est venu et nous a demandé de quel soutien nous avions besoin. Ce genre de forum a rendu la rencontre possible », se réjouit Angela Yoder-Maina, directrice de Green String Environment, une ONG partenaire du projet.

Cours de taekwondo pour réfugiés, charbon « écologique » dans l’est de la République démocratique du Congo ou fonds des Nations unies contre la malnutrition chronique (UnitLife), la diversité des stands donne au forum certains airs de foire aux projets.

Comme Uhuru Kenyatta, plusieurs chefs d’Etat ont déambulé dimanche dans le salon, pour aller à la rencontre des organisations présentes.

« C’est une double interpellation, à la fois très politique et par les porteurs d’initiatives très concrètes », souligne Rémy Rioux, directeur de l’Agence française de développement (AFD), partenaire de l’évènement.

– « pas un forum géopolitique » –

Si les chefs d’Etat n’ont passé que quelques heures sur place dimanche, le temps d’écouter Emmanuel Macron et Angela Merkel plaider pour le multilatéralisme, le forum se poursuit autour de plusieurs tables rondes sur des thèmes comme la cybersécurité, l’immigration et la guerre commerciale.

« Arriver à rassembler autant de chefs d’Etat sur une thématique de paix, sur un plan symbolique, dans une période de grande tension, je trouve que c’est important », note Pierre Servent, spécialiste des questions de défense et auteur du livre « Cinquante nuances de guerre ».

« Il y a une partie où il y a des beaux discours, de l’affichage qui a du sens mais qui ne débouche sur rien de concret. Mais ensuite il y a des ateliers qui sont utiles pour que les experts se rencontrent et approfondissent des discussions », poursuit-il.

Si le caractère symbolique de la manifestation a été quasi unanimement salué, plusieurs observateurs regrettent que l’accent n’ait pas été davantage mis sur les conflits en cours.

« Cela a du sens de se réunir, de discuter des enjeux de la planète et de pouvoir connecter des mondes qui ne se connectent pas facilement. Mais les sujets qui fâchent, le Yémen, la Syrie, les grandes crises humanitaires oubliées ne sont pas à l’ordre du jour », regrette Florent Geel, directeur Afrique pour la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH).

« La diplomatie, ce n’est pas simplement des projets, c’est une vision globale. Or aujourd’hui, ce forum n’est pas une étape sur un chemin d’un projet plus politique », dit-il, déplorant notamment l’absence de déclaration finale à l’issue de l’évènement.

Un choix assumé par Justin Vaïsse, président de l’événement.

« Ce n’est pas un forum géopolitique, cela porte sur la gouvernance mondiale, pas sur la culture de la paix ou les efforts diplomatiques. Pour ça, il y a d’autres endroits comme l’ONU. On exclut tous les cas régionaux, on a fait ce choix éditorial », justifie t-il à l’AFP.

« On met sur l’agenda des leaders le fait que chaque année, on va parler ici du multilatéralisme, des intérêts collectifs », poursuit-il.

« Les populations directement concernées ne sont pas forcément là. Mais le forum est un outil pour remettre la paix à l’honneur, or il y a trop peu d’occasions comme celle-là », concède Pauline Chetcuti, d’Action contre la faim.

Mardi, en clôture du forum, plusieurs projets seront sélectionnés et bénéficieront d’un « accompagnement spécial » jusqu’en 2019, où une nouvelle édition de l’évènement est déjà prévue.

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