Elections françaises 2022: vers un scénario Macron-Le Pen, saison 2?

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Le contexte de la guerre en Ukraine suggérait que le président sortant pourrait être aisément réélu. Mais la montée en puissance de la question du pouvoir d’achat rebat les cartes. Un tiers des Français voteront probablement pour un candidat d’extrême droite.

D’un côté, il y a les impondérables, comme dans toute élection présidentielle en France. L’édition 2022 aura été marquée par deux crises internationales. La fin de la phase critique de l’épidémie de Covid a ouvert la voie à ses conséquences sociales et économiques, augmentation du prix de l’énergie et inflation, déjà. Avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie à partir du 24 février, la peur d’une extension du conflit et du recours éventuel à l’arme nucléaire, la nécessaire solidarité avec les combattants et les réfugiés ukrainiens, le contrecoup des sanctions sur l’économie mondiale et européenne ont empli à leur tour l’espace politique et médiatique.

Ce contexte semblait servir les intérêts du sortant et de la personnalité dotée de la plus grande expérience politique et diplomatique, à seulement 44 ans, Emmanuel Macron. Mais c’était sans compter la soif non assouvie de débats des Français, l’inscription de la question du pouvoir d’achat en tête de leurs priorités, la révélation du recours dispendieux du gouvernement à des cabinets de conseil sous le quinquennat, une certaine lassitude peut-être à l’égard des images de guerre et d’exode.

Du coup, une dose de suspense s’est insinuée dans les derniers jours de la campagne. Si, le 10 avril, Emmanuel Macron passe le premier tour de l’élection en tête, quel écart aura-t-il creusé sur sa principale rivale Marine Le Pen, intronisée « candidate du pouvoir d’achat »? Celle-ci accédera-t-elle bien au second tour alors que Jean-Luc Mélenchon, candidat de l’extrême gauche, opère depuis quelques semaines une lente et ininterrompue remontada? Qui, de Valérie Pécresse, la prétendante des Républicains, ou d’Eric Zemmour (Reconquête! ) remportera la bataille des droites pour la quatrième place?

Le scénario de la répétition annoncée du duel Macron-Le Pen de 2017 est donc encore suspendu à quelques incertitudes.

Effondrement des partis anciens

De l’autre côté, il y a les tendances de fond que cette élection met en évidence. L’affaissement des partis traditionnels de gouvernement d’abord. Au premier tour du scrutin présidentiel de 2012, François Hollande, qui en sortira finalement vainqueur, et Nicolas Sarkozy comptabilisaient 55,81% des suffrages (28,63% + 27,81%). Cinq ans plus tard, François Fillon et Benoît Hamon récoltaient, à eux deux, 26,37% des votes (20,01 + 6,36%). Cette année, si l’on en croit les sondages, les résultats cumulés de Valérie Pécresse et d’Anne Hidalgo atteindront environ 12% (10% + 2% selon l’enquête Ifop-Fiducial pour LCI du 4 avril). Et ce n’est pas, en l’occurrence, la conséquence d’une erreur de casting.

Les Républicains et le Parti socialiste, familles qui, sous ce nom ou sous un autre, ont structuré la vie politique française pendant des décennies, sont en passe de disparaître. Leurs électeurs se réfugient, pour les socialistes, chez Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron ou dans l’abstention, et, pour les Républicains, auprès d’Eric Zemmour, Emmanuel Macron ou Marine Le Pen. Le vote d’extrême droite pourrait donc s’établir au premier tour dans une fourchette entre 30 et 35% des suffrages. Si elle déjoue la surprise Mélenchon le 10 avril, Marine Le Pen pourrait donc accéder à l’Elysée. Cette perspective n’est plus un mirage.

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