Donald Trump © AFP

Donald Trump n’est pas prophète en son pays…

Le Vif

Le candidat républicain Donald Trump hué à son arrivée dans un bureau de vote de Manhattan: la scène est inhabituelle, et en dit long sur les relations difficiles du milliardaire avec l’île qui a fait sa fortune.

« New York te déteste! », ont hurlé électeurs et passants en le voyant débarquer mardi matin avec sa femme et sa fille de sa limousine, pour aller voter dans une école de la 56e rue, dans un quartier pourtant très distingué de la mégapole américaine.

Quelques-uns l’ont néanmoins applaudi, mais ils étaient beaucoup moins nombreux et moins bruyants, ont constaté des journalistes de l’AFP sur place.

On ne fait pourtant pas plus New-Yorkais que Donald Trump: né dans le district du Queens, d’un père qui avait déjà prospéré dans l’immobilier, c’est à Manhattan que Trump s’est fait un nom et une fortune: son nom s’affiche aujourd’hui fièrement en lettres géantes sur la façade de plus d’une quinzaine de gratte-ciel de Manhattan.

C’est aussi à New York que sa célèbre émission de télé-réalité, « The Apprentice » a été enregistrée des années durant.

Donald Trump est également présent depuis des années sur la très active scène mondaine de la mégapole américaine. Via les dîners en ville, mais aussi via la presse people, qui a longtemps documenté les frasques de ses mariages et infidélités.

Mais même s’il est un « enfant du pays », bien plus qu’Hillary Clinton, parachutée à New York après son départ de la Maison Blanche avec Bill, la campagne électorale qu’il a menée, qui a notamment stigmatisé l’immigration, est pour beaucoup de New-Yorkais une insulte à la diversité qu’incarne leur ville aux yeux du monde.

« L’Amérique doit être représentée par quelqu’un qui est conscient de sa diversité, quelqu’un qui la reprend à son compte », faisait valoir Erica Herreros, une jeune infirmière, après avoir voté Clinton mardi dans le Queens, un district ethniquement très mélangé aujourd’hui mais qui était blanc lorsque Trump y habitait dans les années 1950.

« Tout le discours clivant que Trump crache depuis le début de sa campagne ne correspond pas à ce que nous sommes », soulignait aussi Aaraon Kliner, en votant à Harlem.

‘Un exode massif’

Pas surprenant alors que ce soit à Manhattan, bastion démocrate qui plus est, qu’en cette journée d’élections plusieurs électeurs aient utilisé des qualificatifs particulièrement peu flatteurs pour le magnat de l’immobilier, qui se présente comme le porte-voix des laissés pour compte de la mondialisation.

« Fasciste », « dangereux », « stupide »: autant de termes revenus plusieurs fois mardi dans la bouche d’électeurs new-yorkais interrogés dans le chic quartier de l’Upper East Side.

« Croyez-moi, je suis New-Yorkais, je connais Trump depuis 30 ans et je ne tiens pas à le voir à la Maison Blanche », a lancé Pat Crow, un entrepreneur qui votait dans le quartier résidentiel de l’Upper East Side.

Mais l’hostilité de New York pour Trump a sans doute aussi d’autres causes.

Si la ville a toujours attiré les grandes fortunes, ces dernières ont aussi pour tradition de racheter leur train de vie dispendieux par une philanthropie généreuse au profit d’organisations caritatives et du monde de l’art. A l’image des Rockefeller ou, plus récemment, de Michael Bloomberg, fondateur de l’entreprise d’informations financières du même nom et maire de New York de 2002 à 2013.

Or Trump, qui n’a jamais eu de mandat électif, n’a jamais joué ce rôle et est pour cela considéré « persona non grata » dans la haute société new-yorkaise, soulignait récemment un article du New York Times.

Il y a bien une fondation Trump, mais une enquête du Washington Post a montré que la fortune de Donald Trump y était peu mise à contribution. La justice new-yorkaise enquête même pour déterminer si Trump a utilisé sa fondation à des fins personnelles, ce qui est interdit pour les associations caritatives.

Les New-Yorkais se sentiront-ils plus proches de Trump s’il est élu à la Maison Blanche ?

« Je ne serais pas surprise qu’y ait un exode massif », a réagi Charmaine Smith, électrice noire à Harlem. Avant de se reprendre, philosophe: « Si on ne peut pas partir, il faudra juste attendre quatre ans ».

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