Ginni Thomas et son mari © Getty

Cour suprême: la femme d’un juge obsédée par Trump et partisane de QAnon

Le Vif

Ginni Thomas est une partisane fanatique de Trump et de QAnon. Il se trouve que c’est aussi la femme d’un juge de la Cour suprême. Dans un mélange de genres guère reluisants pour la démocratie, elle a usé de toute son influence pour diffuser les théories du complot les plus folles.

Dans quelle mesure la Cour suprême des États-Unis est-elle indépendante ? Les derniers soubresauts de l’enquête liés à l’invasion du capitole ont remis cette question au coeur de l’actualité. Elle était déjà controversée depuis que trois nominations de Donald Trump l’ont fait basculer radicalement à droite, mais elle vient de reprendre un coup depuis qu’il est ressorti que le plus ancien des neuf juges, Clarence Thomas (73 ans), est marié avec un fanatique qui diffuse les théories de QAnon et a tenté d’empêcher la victoire électorale de Joe Biden « par tous les moyens ».

Elle a ainsi envoyé des SMS fantasques envoyés à Mark Meadows, chef de cabinet de Donald Trump, l’implorant de se battre contre les résultats de la présidentielle de 2020. « Aidez ce grand président à tenir bon Mark!!! (…) La majorité des gens savent que Biden et la gauche tentent le plus grand hold-up de l’Histoire ». Dans plus de 20 messages envoyés entre novembre 2020 et janvier 2021, révélés jeudi par le Washington Post, Virginia Thomas, militante conservatrice assumée, pousse le plus proche conseiller du président à bloquer la victoire de Joe Biden à l’élection. Cette femme de 65 ans, surnommée « Ginni » par ses proches, est le dernier personnage d’une galerie de portraits hauts en couleur de la capitale américaine, alors persuadée — comme des millions d’Américains — que la présidentielle de 2020 avait été volée à Donald Trump.

La femme du juge le plus conservateur de la Cour suprême

Mais « Ginni » est aussi l’épouse de Clarence Thomas. Le juge Thomas est Afro-Américains et conservateur. Il est membre de la Cour suprême depuis 1991 et est connu pour sa ligne dure, peu enclin au compromis. Ce juge qui siège depuis le plus longtemps dans le temple du droit américain, chargé de trancher les grands débats de société… et les litiges électoraux.

Avant que l’enquête sur le capitole ne mette en avant les agissements de sa femme et ses SMS fantasques, son impartialité avait déjà été mise en doute, car les événements auxquels il accompagnait son épouse étaient souvent controversés. Dénonçant un mélange des genres malsain, des élus démocrates appelaient vendredi le juge à se récuser de tout dossier lié aux élections.

« !!!!! »

Car durant des semaines, son épouse a détaillé auprès de Mark Meadows la stratégie à suivre pour conserver le pouvoir. « Ne concédez pas » la défaite, lance-t-elle dans un message au haut responsable de la Maison Blanche. « Il faut du temps pour qu’une armée se forme ». Sans jamais lésiner sur la ponctuation, Virginia Thomas interpelle Mark Meadows directement. « Je pleure et prie pour vous les gars !!!!! », écrit-elle. Le chef de cabinet est moins bavard dans ses réponses, invoquant Dieu pour décrire les efforts déployés pour renverser l’élection. La sexagénaire pousse aussi pour que l’avocate Sidney Powell soit chargée de mener la bataille contre ces supposées fraudes, maintes fois démenties. « Mark (je ne veux pas vous réveiller)… », écrit-elle le matin du 19 novembre 2020. « Mais il semblerait que Sidney et son équipe soient inondés de preuves de fraude, assure-t-elle.

Teinture capillaire

Quelques heures plus tard, l’équipe juridique de Donald Trump tient une conférence de presse des plus déroutantes. Sidney Powell, portant un cardigan pailleté aux motifs léopard, accuse pêle-mêle le Venezuela, Cuba et les démocrates d’avoir ourdi un complot électoral. A ses côtés, l’avocat du président Rudy Giuliani, ancien maire de New York, dénonce « un scandaleux rideau de fer de censure ». Sous la chaleur des projecteurs, un liquide marron, de la teinture capillaire, commence à dégouliner sur ses tempes.

Trop froid

Les nombreux messages de Virginia Thomas sont aujourd’hui examinés par une commission parlementaire, chargée de faire la lumière sur le rôle de Donald Trump et de cette galaxie conservatrice sur les événements du 6 janvier 2021, quand des milliers de personnes avaient envahi les rues du Washington et attaqué le Congrès américain pour tenter de bloquer la certification de la victoire de Joe Biden. « Ginni » Thomas était présente à cette manifestation, entourée de gens venus de tout le pays. Elle assure toutefois être partie avant les violences… parce qu’elle avait trop froid.

Obligation de se récuser en cas de conflit d’intérêt

Les juges fédéraux doivent se récuser s’ils doivent statuer sur des affaires qu’ils ne peuvent pas trancher de manière indépendante. Clarence Thomas ne l’a pas fait et a même soutenu Trump contre vents et marées. Ainsi lorsque la Cour suprême a rejeté une nouvelle plainte contre le vote par correspondance en février 2021, Thomas a rédigé un « avis contraire » qualifiant la décision d' »incompréhensible ». Et en janvier, il a été le seul juge à soutenir Trump lorsque celui-ci a refusé de remettre à la commission d’enquête ses textos et ses appels téléphoniques du 6 janvier.

Cela donne au minimum l’impression que le juge partage les opinions de sa femme et qu’il ne serait pas apte à juger de façon impartiale. Mais le juge n’a pour l’instant pas encore réagi. Il est à l’hôpital.

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