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Bientôt une protection temporaire pour les Ukrainiens fuyant la guerre

Le Vif

Les ministres européens de l’Intérieur ont soutenu dimanche à une « grande majorité » le projet d’octroyer une protection temporaire aux Ukrainiens fuyant l’offensive russe, qui pourraient se chiffrer par « millions ».

Plusieurs centaines de milliers de réfugiés ukrainiens fuyant l’invasion de leur pays par la Russie de Vladimir Poutine ont afflué depuis jeudi dans des pays frontaliers, selon les autorités de ces pays d’accueil.

Selon une estimation de l’Onu, l’Union européenne doit se préparer à une crise humanitaire « de proportions historiques » en Ukraine, qui pourrait aboutir à « plus de 7 millions » de personnes déplacées à l’intérieur du pays si l’offensive russe se poursuit. Jusqu’à présent 300.000 Ukrainiens sont arrivés dans l’UE, selon la Commission européenne, dont la moitié en Pologne selon Varsovie. Ce nombre « est basé sur les données mises à disposition par les autorités nationales », a souligné le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) dans un tweet.

Les ministres réunis en urgence ont discuté de la possibilité d’apporter une protection temporaire à ces Ukrainiens, en recourant à une directive de 2001, qui leur permettrait de séjourner jusqu’à trois ans dans l’UE et d’y travailler.

Pologne

Près de 200.000 personnes venant d’Ukraine sont entrées en Pologne depuis le début jeudi de l’invasion russe de cette ex-république soviétique, selon les gardes-frontières polonais.

Pour la seule journée de samedi, les gardes-frontières polonais ont précisé avoir recensé 77.300 personnes arrivées en Pologne en provenance d’Ukraine. Et dimanche matin, jusqu’à 11H00 (10.00 GMT), ils ont recensé encore plus de 44.000 personnes supplémentaires.

La Pologne, qui abritait déjà environ 1,5 million d’Ukrainiens avant l’invasion russe et qui a exprimé son soutien indéfectible au pays envahi, a jusqu’à présent vu une grande partie de ceux qui fuient l’Ukraine entrer sur son territoire.

Dans tout le pays, les gens s’organisent sur les réseaux sociaux, font des collectes d’argent, de médicaments, offrent des logements, des repas, du travail ou un transport gratuit pour les réfugiés.

Roumanie

Selon le porte-parole du gouvernement, 47.000 Ukrainiens au total sont entrés en Roumanie depuis jeudi. Parmi eux, 22.000 ont déjà quitté le pays, tandis que 25.000 sont restés en Roumanie.

Le poste-frontière le plus sollicité est celui de Siret (nord), suivi de Sighetul Marmatiei, également dans le Nord.

Deux camps ont été mis en place, un à Sighetul, vide pour l’instant, et l’autre à Siret, dont la quarantaine d’occupants doit être transférée vers des centres d’accueil.

Hongrie

Selon la police hongroise, plus de 71.000 réfugiés sont arrivés dans le pays depuis jeudi.

Le pays compte cinq postes-frontières avec l’Ukraine et plusieurs villes frontalières, comme Zahony, ont aménagé des bâtiments publics en centres de secours, où des civils hongrois viennent proposer vivres ou assistance.

Moldavie

Plus de 41.000 personnes venant d’Ukraine sont arrivées sur le territoire moldave, selon le HCR.

Slovaquie

Plus de 17.600 Ukrainiens ont franchi la frontière slovaque depuis jeudi, selon le HCR. 6.514 sont arrivés dans la seule nuit de samedi à dimanche, selon le ministère de l’Intérieur.

« J’ai constaté une très grande majorité pour que nous puissions très rapidement utiliser cette possibilité », a déclaré le ministre français Gérald Darmanin, dont le pays exerce la présidence du Conseil de l’UE, lors d’une conférence de presse à l’issue de la réunion.

La plupart des Ukrainiens qui arrivent ont des passeports biométriques et peuvent rester sans visa pendant 90 jours dans l’UE, mais il faut être prêt pour ce qui se passe après cette période, a souligné la commissaire européenne Ylva Johansson, chargée des Affaires intérieures, estimant qu’il fallait se préparer à des « millions » d’arrivées. Elle a précisé que la plupart des Ukrainiens ayant fui dans l’UE étaient hébergés par des proches et qu’un « nombre limité » avait déposé une demande d’asile.

Ils se rendent dans des pays accueillant déjà une importante population d’origine ukrainienne, citant la Pologne, l’Italie, le Portugal, l’Espagne, l’Allemagne, la République tchèque.

– « Moment historique » –

« Je pense qu’il est temps d’activer la directive de protection temporaire », a-t-elle déclaré.

Ce régime, institué en réponse au conflit en ex-Yougoslavie mais qui n’a jamais été utilisé, prévoit l’octroi d’une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées, et des mesures pour répartir entre pays de l’UE l’effort d’accueil de ces populations.

Cette protection temporaire confère des droits équivalents dans tous les Etats membres, notamment celui de travailler, a précisé la commissaire.

Le recours à cette directive était notamment réclamé par la Belgique. Nous sommes à « un moment historique pour l’Union européenne, un moment où on doit prendre des décisions courageuses », avait plaidé le secrétaire d’État belge à l’asile et la migration, Sammy Mahdi.

Cette proposition doit être entérinée par une majorité qualifiée au Conseil, soit un minimum de 15 Etats membres sur 27 représentant au moins 65% de la population européenne.

Lors de la réunion, la grande majorité des ministres se sont exprimés sur cette question et la plupart y étaient très favorables, a précisé la commissaire, ajoutant que certains se demandaient toutefois s’il ne fallait pas attendre.

Mme Johansson prépare une proposition pour activer ce dispositif, afin de la présenter au prochain conseil des ministres des Affaires intérieures prévu jeudi.

Gérald Darmanin a indiqué que l’adoption de cette proposition serait à l’ordre du jour et qu’il allait d’ici là contacter les pays qui ont exprimé « des réserves ».

Quelque 368.000 réfugiés ont fui les combats en Ukraine depuis l’invasion russe déclenchée jeudi, selon les Nations unies. Le HCR estime qu’une aggravation du conflit pourrait pousser « jusqu’à 5 millions de personnes à fuir » l’Ukraine.

Ylva Johansson se rendra lundi matin à la frontière entre la Roumanie et l’Ukraine pour évaluer les besoins, puis à la frontière slovaque.

L’UE doit se préparer à une crise humanitaire aux « proportions historiques » en Ukraine, a averti le commissaire européen chargé de la gestion des crises Janez Lenarcic. « Nous assistons à ce qui pourrait devenir la plus grande crise humanitaire sur notre continent depuis de très nombreuses années », a-t-il ajouté.

Il a indiqué que depuis 2014 (date de l’annexion de la Crimée), l’UE apportait à l’Ukraine 25 millions d’euros par an en moyenne d’aide humanitaire.

« En vue de la hausse exponentielle des besoins, nous avons décidé de plus que tripler cette allocation, à 90 millions d’euros, qui sera notre contribution à l’appel d’urgence de l’ONU » imminent, a-t-il dit.

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