Des militaires ukrainiens marchent dans un champ près du village de Velyka Dymerka, à 40 km à l'est de Kiev, le 10 mars 2022.

Aux portes de Kiev, des soldats ukrainiens guettent l’arrivée des Russes

Le Vif

Par un vent glacial, cinq soldats ukrainiens, équipés d’un missile antichar Javelin, montent la garde à Velyka Dymerka, sur le dernier barrage séparant la lisière nord-est de Kiev des véhicules blindés russes.

Soudain, une pluie de missiles Grad surgie de l’horizon s’abat à quelques centaines de mètres des militaires frissonnants, soulevant un énorme nuage de poussière.

A quelques mètres de là, Vasyl Popov sort la tête par la porte entrouverte d’une superette. Il soupire devant la perspective de voir la guerre arriver dans sa ville.

« Les Russes étaient là la nuit dernière, ils tiraient », raconte cet homme de 38 ans, les yeux pleurant à cause du froid. « Je dors à peine », souffle-t-il. « Dès qu’il y a le moindre bruit, on se rue vers la fenêtre pour voir ce que c’est, si quelqu’un est sur le point d’entrer. »

Deux semaines après le début de l’invasion en Ukraine, les Russes arrivent aux portes de Kiev.

Sur le flanc nord-ouest de la capitale, de féroces bombardements ont pendant plus d’une semaine détruit des parties entières de certaines localités.

Irpin, au nord-ouest de Kiev, le 7 mars 2022.
Irpin, au nord-ouest de Kiev, le 7 mars 2022.© AFP / Dimitar DILKOFF

Des dizaines de milliers de personnes ont bravé des tirs d’artilleries quasi-permanents pour fuir des villes ouvrières comme Boutcha et Irpin et rejoindre la capitale ukrainienne, plus calme.

Nouveau front

Jusqu’à récemment, les faubourgs du nord-est de Kiev étaient relativement épargnés.

Velyka Dymerka se situe à environ cinq kilomètres de Kiev. Non loin y passe une autoroute que les Russes tentent d’emprunter pour pénétrer dans la capitale.

Mardi, les forces ukrainiennes y ont repoussé une colonne de véhicules blindés russes, qu’ils ont partiellement détruite. Mais les adversaires n’ont pas reculé bien loin. Posé sous un arbre près du barrage, le missile antichar américain Javelin est l’ultime arme des soldats ukrainiens pour faire face aux troupes ennemies.

Les Etats-Unis et leurs alliés de l’Otan ont augmenté leurs livraisons d’armes à l’Ukraine pour les aider à repousser l’offensive russe. Mais ce soutien ne convainc pas les habitants.

Des militaires ukrainiens marchent dans un champ près du village de Velyka Dymerka, à 40 km à l'est de Kiev, le 10 mars 2022.
Des militaires ukrainiens marchent dans un champ près du village de Velyka Dymerka, à 40 km à l’est de Kiev, le 10 mars 2022.© Belga Images

« Si l’Otan est une organisation si puissante, pourquoi ne ferme-t-elle pas l’espace aérien au-dessus de l’Ukraine? », s’exaspère Grigoriy Kushka.

« Pourquoi ne pouvons-nous pas dormir la nuit? Pourquoi ma famille, ma petite fille, les enfants, pourquoi courons-nous de cave en cave? », demande ce retraité, non loin d’un groupe de soldats en train de se réchauffer les mains auprès d’un feu.

L’Alliance atlantique refuse d’envoyer des avions de combat, craignant que cela ne provoque une guerre plus vaste entre la Russie et les pays occidentaux.

Des militaires ukrainiens marchent dans un champ près du village de Velyka Dymerka, à 40 km à l'est de Kiev, le 10 mars 2022.
Des militaires ukrainiens marchent dans un champ près du village de Velyka Dymerka, à 40 km à l’est de Kiev, le 10 mars 2022.© Belga Images

Résistance

« Il y a eu des tirs de missiles Grad et des bombardements ici la nuit dernière », raconte Serguiy, un soldat se trouvant sur le barrage de Velyka Dymerka. « Nous essayons d’évacuer les grands-mères. Mais elles ne veulent pas sortir », dit-il.

Les personnes n’ayant pas fui passent la plupart de leur temps derrière de simples clôtures entourant leurs maisons de bois.

« Je n’ai pas peur de mourir », dit Valentyna Rut, une retraitée, tout en nourrissant ses poules. « J’ai peur pour mes enfants et mes petits-enfants, c’est tout », poursuit cette dame de 75 ans.

« S’ils entrent à Kiev, que vont-ils faire? Comment vont-ils réussir à rester au pouvoir? », s’interroge Roman Taranenko, un technicien de 47 ans. « Les gens vont tirer sur eux depuis chaque maison, brûler leurs véhicules », pronostique-t-il. « Ils ne resteront jamais au pouvoir, même avec des fusils d’assaut ».

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