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AstraZeneca : pas un problème de qualité du vaccin, mais des manquements en matière de logistique

Mailys Chavagne
Mailys Chavagne Journaliste Web

 » L’Union européenne n’achètera plus le vaccin d’AstraZeneca « , a déclaré le commissaire européen à la Justice, Didier Reynders. Une annonce qui interpelle à l’heure où la campagne de vaccination s’accélère en Belgique.

La Commission européenne a décidé de ne pas renouveler sa commande de vaccins anti-Covid auprès d’AstraZeneca après le mois de juin. Cette annonce a de quoi inquiéter : la vaccination reste l’un des outils indispensables de la lutte contre le covid, et la suppression d’un des trois (bientôt quatre) vaccins distribués actuellement pourrait bien ralentir la campagne belge.

La raison de cette décision ? « Un manque de confiance« , déplore Didier Reynders, qui souligne de nombreux problèmes avec AstraZeneca. Mais envers quoi ? Serait-ce dû à l’inefficacité du vaccin pour lutter contre les variants, les problèmes d’approvisionnement et le manque de fiabilité du laboratoire, ou cette peur constante de potentiels effets secondaires graves ? Le doute plane et un nouveau chapitre vient alimenter la saga AstraZeneca…

Inefficace contre les variants ?

Face à l’arrivée de certains variants, beaucoup se sont interrogés quant à l’efficacité des vaccins développés pour lutter contre le covid. Seront-ils efficaces ? Faut-il repartir de zéro et créer de nouveaux vaccins contre les variants ?

Les recherches ont montré que les vaccins à ARN messager, tels que le Pfizer, restaient une arme efficace contre la menace que font peser ces variants du covid. En outre, « la vaccination, en diminuant la quantité de virus en circulation, va permettre de diminuer la probabilité de l’émergence de ces nouveaux variants« , expliquait Sophie Lucas, immunologiste à l’Institut De Duve UCLouvain, sur le plateau de RTL le mardi 20 avril.

Pour autant, le vaccin AstraZeneca serait nettement moins efficace contre les variants. Et cela pourrait bien être l’une des raisons de l’annulation des commandes du vaccin. C’est en tous cas ce que sous-entend le président français Emmanuel Macron, interrogé sur l’avenir du contrat européen avec AstraZeneca. «  Le vaccin d’AstraZeneca nous aidera à la sortie de crise », a-t-il précisé. « Mais pour répondre aux variants, on voit que d’autres vaccins sont aujourd’hui plus efficaces ».

Néanmoins, la Commission européenne n’a jamais remis en question la qualité du vaccin. Et si l’Union européenne décide de miser principalement sur les autres vaccins pour lutter contre les variants (cfr article pfizer), ce n’est certainement pas la raison de la rupture du contrat avec AstraZeneca. Thierry Breton, le commissaire européen au Commerce intérieur, l’assure : « Il s’agit d’un très bon vaccin !« .

Une population (trop) hésitante

Entre les suspicions de lien entre le vaccin et des thromboses et des essais cliniques jugés trop peu représentatifs de certaines populations d’âge, le vaccin de la firme suédo-britannique a accumulé de nombreux détracteurs. Les déboires d’AstraZeneca ont entamé la confiance des Belges, et certains refusent même de se faire vacciner, de peur de se voir injecter cette dose tant redoutée.

La publicité « négative » faite à l’AstraZeneca peut avoir accentué certaines appréhensions, regrette Christian Massot, médecin épidémiologiste à l’Observatoire de la santé du Hainaut. « Si l’on est dans un pays où le virus circule beaucoup, le risque d’hospitalisation lié au virus ou à des effets secondaires est plus élevé », explique-t-il. « Prendre le risque de se faire vacciner est donc préférable. »

Le centre de vaccination de Namur a même lancé un appel aux volontaires pour venir se faire vacciner ce mardi. 1500 doses d’AstraZeneca sont en effet disponibles. Cette vaccination « last-minute » pourrait-elle être le signe de la méfiance des Belges ?

Les soignants et spécialistes défendent néanmoins ce vaccin en invoquant une balance positive entre les bénéfices et les risques. « Je ne comprends pas pourquoi ce vaccin a été autant décrié », s’interroge le docteur Dominique Henrion, directeur médical du centre de vaccination de Namur Expo. « L’AstraZeneca est un très bon vaccin. Déjà trois semaines après la première injection, il offre une très bonne protection. On le voit sur le terrain. On n’a plus de personne qui meurt du covid, plus de personne en soin intensif, si le patient a reçu une première dose d’Astra au minimum trois semaines avant ».

Une chose est sûre : si la méfiance de la population est bien réelle, ce n’est pas là la raison de la rupture du contrat avec AstraZeneca. La Commission européenne ne remet pas en question la qualité du vaccin d’AstraZeneca mais ses manquements en matière de logistique.

Non-respect du contrat établi

Le gros problème, c’est l’attitude d’AstraZeneca, jugée responsable de nombreux retards de livraison de doses du vaccin. L’exécutif européen considère en effet que la firme suédo-britannique a violé certaines clauses du contrat d’achat anticipé qui la lie à lui. « L’entreprise n’a pas été en mesure de présenter une stratégie fiable pour garantir la livraison à temps des doses de vaccins« , indiquait, à la fin du mois d’avril, un porte-parole de la Commission.

La Commission a même lancé le mois dernier des poursuites contre AstraZeneca pour non-respect du contrat établi. Plusieurs responsables européens avaient alors prévenu que le contrat avec le groupe anglo-suédois pourrait ne pas être renouvelé. Une menace qui a tout simplement été confirmée ce week-end.

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