© Thinkstock

Comment organiser votre succession

Le Vif

Le droit successoral nécessitait depuis longtemps une adaptation aux modes de vie et structures familiales actuels. Plusieurs mesures ont déjà été prise dans ce sens, et d’autres le seront encore bientôt.

En décembre 2011, l’accord de gouvernement prévoyait de réformer le droit successoral afin de tenir compte de l’évolution de la société. Depuis lors, plusieurs mesures ont été prises par le gouvernement fédéral en vue de modifier les règles successorales et plusieurs propositions sont sur la table du Sénat. Elles ne concernent que les règles régissant la transmission du patrimoine et non les droits de succession et donation, qui sont une matière régionale.

Deux grandes nouveautés

Parmi les principales nouveautés, on peut citer l’élargissement de la possibilité de la représentation. Jusqu’il y a peu, la représentation d’un enfant n’était possible que si son père ou sa mère était déjà décédé(e) au moment de l’ouverture de la succession. Dans ce cas, il pouvait hériter à la place d’un de ses parents. Depuis janvier 2013, les enfants peuvent prendre la place de leur parent dans le cadre d’une succession même si le parent concerné n’est pas prédécédé. Par exemple, auparavant, Jean et Pierre, deux frères, héritaient de leur père, mais Pierre refusait la succession, sa part allait à son frère Jean. En imaginant que Pierre a des enfants, désormais, ce sont eux qui recevront sa part s’il refuse la succession. Ce qui permet de sauter volontairement une génération de droits de succession et d’optimiser ainsi fiscalement la succession… Attention toutefois, un refus de succession ne peut pas être partiel : c’est tout ou rien. De plus, un grand-parent qui désire avantager ses petits-enfants ferait mieux de le prévoir par testament pour s’assurer qu’au moins une partie leur reviendra au cas où son fils change d’avis et ne refuse finalement pas la succession.

Depuis janvier 2013, il existe une nouvelle notion d’indignité fiscale élargie. Auparavant, un fils qui commettait, par exemple, un meurtre ou une tentative d’homicide sur son père ne pouvait pas héritier de lui. Cette règle est étendue à tous les actes qui entraînent la mort, comme les coups et blessures volontaires, l’empoisonnement, le viol et la violence conjugale. Un personne déclarée coupable qui n’a pas été condamnée, comme par exemple un père qui tue femme et enfants et se suicide ensuite, ne pourra plus non plus hériter. En pratique, la famille du bourreau n’héritera donc pas, ce qui était le cas précédemment.

A quoi s’attendre encore ?

Le groupe de travail Droit successoral de la commission Justice a également planché sur d’autres mesures pour moderniser cette matière… qui seront discutées au prochain gouvernement. Tout d’abord, un projet de loi prévoit de limiter la réserve des enfants à la moitié de la succession, peu importe le nombre d’enfants. Dans la pratique, cela permettrait de résoudre de nombreuses situations, notamment dans les familles recomposées. Mais pas toutes et tout dépendra du nombre d’enfants concernés. Il demeure donc primordial de mettre sur pied des constructions successorales durables afin d’avoir la garantie que vos dernières volontés en matière de répartition de votre patrimoine seront bel et bien exécutées. Si vous avez déjà mis en place des structures, vérifiez-les à nouveau si ce projet de loi est adopté pour vérifier si elle tient toujours la route.

Une autre mesure importante est la possibilité de conclure des pactes successoraux avant le décès, ce qui n’est pas possible aujourd’hui. En pratique, cela peut être utile lorsqu’il s’agit de créer une construction successorale qui implique le refus d’un héritier réservataire de sa réserve. Par exemple, lorsqu’il s’agit de sauter une génération. En pratique, un grand-père peut demander à son fils, s’il est d’accord, de ne pas réclamer sa part réservataire afin de privilégier son petit-fils. Si c’est le cas, la nue-propriété du patrimoine peut être léguée par testament au petit-fils tandis que l’usufruit est légué au fils, qui pourra quand même jouir des fruits du patrimoine de son père. Cette construction permettrait d’épargner beaucoup de droits de succession et serait possible si la proposition est adoptée. Actuellement, même s’il y a un accord, un héritier réservataire peut toujours réclamer sa part.

Enfin, un dernier projet important consiste à évaluer un bien rapporté dans la succession à sa valeur au moment de la donation et non à sa valeur au moment du décès. Si, par exemple, un père a donné de son vivant à ses trois fils une maison, des liquidités et un portefeuille de placement de même valeur, ces biens mobiliers et immobiliers peuvent avoir aujourd’hui une valeur tout-à-fait différente, ce qui risque de pénaliser dans la succession celui dont les biens ont le plus progressé alors qu’il a reçu exactement la même chose. Cette inégalité devrait être supprimée grâce à cette nouvelle mesure.

Julien Lheureux

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire