Le spécialiste des questions d'énergie Damien Ernst (ULiège) © belga

Faut-il rebasculer vers un contrat d’énergie fixe? L’avis de Damien Ernst et de la Creg

Noé Spies
Noé Spies Journaliste au Vif

Plusieurs fournisseurs d’énergie (Luminus, Mega) proposent à leurs clients de repasser à un contrat fixe. Faut-il franchir le pas ? Les avis de Damien Ernst (ULiège), spécialiste des questions énergétiques, et de la Commission de Régulation de l’Electricité et du Gaz (CREG).

1. Que nous disent les prix du marché de l’énergie ? « La volatilité s’avère être la nouvelle norme »

Le niveau de prix de l’énergie reste élevé, malgré les récentes baisses de prix sur les marchés de gros. « Nous ne pouvons pas et ne devons pas nous attendre à ce que les prix fixes soient soudainement beaucoup moins chers que les prix variables actuels », met en garde la CREG.

Si le prix du gaz est désormais bien en-deçà des pics atteints cet été, pour le régulateur fédéral, il est trop tôt pour parler de baisse structurelle. « Depuis plusieurs semaines, nous enregistrons des baisses importantes sur les marchés de gros, notamment pour le gaz naturel, mais celles-ci devront se confirmer dans les semaines et les mois à venir pour pouvoir parler d’une tendance structurelle », précise la CREG. « S’il y a une chose que nous avons apprise au cours des deux dernières années, c’est que la volatilité s’avère être la nouvelle norme. »

Le professeur Damien Ernst (ULiège), spécialiste des questions énergétiques, est également prudent sur la question d’une baisse structurelle. « C’est difficile à dire. Il y a encore beaucoup d’incertitudes à ce niveau-là », confirme-t-il.

2. Le consommateur doit-il repasser à un contrat d’énergie fixe?

La CREG se veut prudente et ne tranche pas réellement. « Le client devra suivre activement son contrat d’énergie pour éviter toute mauvaise surprise potentielle. Toutefois, le consommateur se réserve le droit de résilier le contrat fixe sans frais à tout moment, moyennant un préavis de 4 semaines », nous précise-t-on.

Pour Damien Ernst, la situation est claire. « Rebasculer vers un contrat à prix fixe est la meilleure option, sans hésitations. Cela permet de se protéger d’éventuelles hausses du prix du gaz. Car les hausses sont aussi liées aux événements géopolitiques, qui sont imprévisibles. »

Le spécialiste des questions énergétiques précise, à l’instar de la CREG, qu’il est toujours possible d’interrompre un contrat à prix fixe. « Si les prix diminuent encore, on peut repasser sur un contrat variable. Mais actuellement, il y a une opportunité à saisir pour obtenir une garantie qui protège contre la possible volatilité des prix dans le futur. Il faut exploiter cette opportunité. Ce serait idiot de ne pas le faire », tranche Damien Ernst. « Si dans trois ou quatre mois, les prix ont encore baissé, alors je conseille de quitter son contrat fixe pour un contrat variable, ou de prendre un contrat fixe plus avantageux chez un autre fournisseur », suggère-t-il.

Avec un contrat à prix fixe, le consommateur paiera légèrement plus cher son gaz endéans les 1 ou 2 mois, par rapport à un contrat variable. « En raison d’une prime d’assurance ajoutée par le fournisseur, qui est toutefois négligeable par rapport à ce qu’on pourrait payer en plus si les prix sur le marché raugmentaient. Pour moi, il n’y a pas d’hésitations à avoir : il faut opter pour un contrat fixe. Les gains potentiels sont énormes », prédit Damien Ernst.

Le professeur de l’ULiège opère toutefois une différence entre particuliers et industriels. « Pour un industriel, la question est différente, car il ne peut pas rompre le contrat. Mais il pourrait aussi avoir envie de se protéger, pour éviter de retomber dans un scénario catastrophique comme c’était le cas auparavant. »

3. Pourquoi Luminus et Mega proposent-ils à leurs clients de rebasculer sur un contrat fixe maintenant? Faut-il s’en méfier?

« Par rapport aux prix sur le marché, ils vont faire plus d’argent avec le contrat à prix fixe qu’ils proposent maintenant, en comparaison avec un contrat à prix variable. C’est sans doute pour cela qu’ils le proposent », estime Damien Ernst. Et d’ajouter : « Mais ils prennent aussi un risque, car ils font du back to back, ce qui veut dire qu’ils achètent les volumes qu’ils vendent directement. Si le prix du gaz chute à 15 euros/Mwh, les gens vont rompre leur contrat à prix fixe avec Mega, qui va se retrouver avec des gros volumes achetés à prix élevés, qu’ils n’arriveront plus à écouler au même prix. Donc, le fournisseur prend clairement un risque. C’est d’ailleurs pour cela qu’ils prennent une marge. « 

Pourquoi les fournisseurs reproposent-ils des contrats à prix fixe maintenant ? « Cela signifie qu’ils ne pensent pas nécessairement que les prix vont encore chuter. Parce que si les prix chutent, c’est trop dangereux pour eux d’offrir des contrats fixes », analyse Damien Ernst.

Le régulateur fédéral (CREG) se veut également rassurant sur la question. « Sur base des informations dont nous disposons actuellement, il semble qu’il s’agisse actuellement d’une offre non contraignante des fournisseurs à leurs clients et donc pas d’une modification unilatérale d’un contrat. »

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