Anne-Sophie Bailly

Grèves de Ryanair, Brussels Airlines: la ryanairisation n’est pas morte (édito)

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

Les grèves de Brussels Airlines ou de Ryanair annoncent-elles la mort du système low cost? En tous cas, a conscience environnementale pas davantage que la taxe kérosène n’ont jusqu’ici ni freiné ni supplanté l’envie de voyager vite, souvent, pas cher.

Files d’attente interminables, vols annulés, grèves annoncées… Les prochains départs en vacances ne se profilent pas comme un long fleuve tranquille pour les voyageurs qui ont choisi de se rendre sur leur lieu de villégiature en avion. C’est que le personnel navigant comme celui au sol en ont marre. Archi-marre. De la détérioration des conditions de travail, d’une flexibilité maximale, de salaires plancher, d’enchaîner les rotations, de payer trois euros une bouteille d’eau.

En d’autres mots, ils en ont marre de ce qui a permis aux compagnies low cost d’exister: rogner sur tous les coûts sans exception pour pouvoir proposer des billets d’avion à moins de 50 euros.

Le ras-le-bol est à ce point généralisé que certains estiment que la «ryanairisation» du transport aérien montre enfin ses limites et prédisent sa mort imminente. C’est au mieux un vœu pieu.

En effet, le modèle répond encore à au moins trois réalités.

D’abord, la demande. Après deux années de confinement, de tourisme local, de frontières fermées, de tests PCR et de Passenger Locator Form (PLF), l’envie de voyager est marquée. Le secteur prédit un taux de réservation presque équivalent à celui de la prépandémie. L’effet d’aubaine – voler pas cher pour consacrer une plus large part du budget vacances à autre chose – n’a pas disparu. Quant à la clientèle d’affaires, saturée de visioconférences et preneuse d’allers-retours dans la journée, elle revient en cabine.

Ensuite, la main-d’œuvre. Malgré la pénurie qui sévit actuellement pour les fonctions de support, le contexte reste favorable pour les compagnies qui veulent payer leurs pilotes au barème minimal. La faillite de concurrents ou le dégraissage dans leurs effectifs a laissé sur le carreau du personnel navigant prêt à accepter des conditions moins favorables pour retrouver un job. Une main-d’œuvre abondante, disponible, concurrentielle.

Enfin, l’environnement économique. La structure même des low cost leur permet de rebondir plus rapidement que les compagnies traditionnelles. Si le résultat de Ryanair est toujours rouge foncé, ses chiffres d’affaires et de fréquentation reprennent déjà une courbe ascendante. Et puis, quel acteur local voudrait perdre un tel pôle d’attraction économique, même s’il doit le subsidier, le soutenir, limiter sa taxation?

La conscience environnementale pas davantage que la taxe kérosène n’ont jusqu’ici ni freiné ni supplanté l’envie de voyager, vite, souvent, pas cher. La «ryanairisation» du transport aérien de passagers n’appartient pas encore au passé.

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