Louise d'Orléans, immortalisée par le peintre Gustave Wappers, avait pour époux Léopold Ier et pour père Louis-Philippe, le dernier roi français. © DR

Le 7 novembre 1841, la reine des Belges fait appel au roi des Français

« Nous avons de bons renseignements […]. Il y aura encore une tentative de restauration. Il faut être prêt à nous prêter main-forte. » écrit Louise, la Reine des Belges à son père, roi des Français. Un appel qui ne sera pas sans conséquence dans une Belgique indépendance depuis plus d’une décennie.

« Nous avons de bons renseignements […]. Il y aura encore une tentative de restauration. Il faut être prêt à nous prêter main-forte. » Elle a peur, Louise. La reine des Belges craint que des conspirateurs tâchent de renverser la Couronne. Elle s’inquiète pour l’indépendance du pays. Alors, puisque la reine des Belges est aussi la fille du roi des Français, c’est vers son père qu’elle se tourne. Dans une lettre datée du 7 novembre 1841, elle lui demande son soutien. Bonne idée? Sa lettre, en tout cas, va provoquer une sérieuse crise.

Certes, la Belgique est indépendante depuis plus d’une décennie. Mais son existence demeure fragile. Il faut dire que c’est du bout des lèvres que les grandes puissances ont avalisé la sécession de ce petit pays. Et même en Belgique, certains, les « orangistes », sont nostalgiques de la période hollandaise.

A l’automne 1841, le climat social est tendu. La rumeur d’une conspiration contre Léopold Ier se fait tenace. A Gand, notamment, les incidents se multiplient. La Cour s’inquiète pour sa position et pour le pays. Voilà pourquoi, avec l’accord probable de son mari, Louise écrit à son père. A Paris, la lettre fait impression. Louis-Philippe souhaite-t-il protéger sa fille? Soutenir l’indépendance belge? Ou accroître l’influence française à Bruxelles? Peut-être tout cela à la fois. Sur-le-champ, il poste 20.000 hommes à la frontière franco-belge. Prêts à intervenir.

Surprise totale! Dans les capitales européennes, on s’insurge: de quel droit Paris se permet-il d’ainsi mobiliser ses troupes? A Bruxelles, la stupéfaction n’est pas moindre. En conseil de cabinet, on s’interroge et on se scrute l’un l’autre: pourquoi cette démarche? Quelqu’un était-il au courant? A quelques officiels étrangers, Camille de Briey, ministre des Affaires étrangères, confesse humblement qu’il n’y comprend rien.

Léopold n’a d’autre choix que de se dévoiler. D’avouer qu’il a lui-même pris les devants. Mais lorsque Jean-Baptiste Nothomb, le chef du gouvernement, l’accuse d’avoir outrepassé son rôle, le roi ne se démonte pas. En son for intérieur, il en est convaincu: bien plus qu’aux ministres, c’est à lui que revient le droit de diriger la diplomatie de son pays. Reste à sauver les apparences. Au Parlement, de Briey s’efforce de voir dans la mobilisation française « une nouvelle preuve de la bienveillance d’une puissance qui nous a déjà donné tant de marques de bon vouloir ». Et lorsque l’opposition demande à connaître la vérité sur l’origine de l’opération, Nothomb botte en touche: « Que le mouvement ait été provoqué ou non, là n’est pas la véritable question. » Ni mensonge ni vérité: c’est par la grâce de l’omission que la Couronne ne sera pas découverte.

Et Louise dans tout ça? Sans doute avait-elle exagéré l’imminence d’une menace. Mais elle a en tout cas été rassurée par l’efficacité de son père. « C’est l’arrivée des troupes françaises qui a, seule, empêché un coup d’Etat », écrira-t-elle à sa mère. Sans doute, surtout, pour se donner bonne conscience.

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