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Zelensky au Parlement belge: « La paix a plus de valeur que les diamants, les navires, le pétrole et le gaz »

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’est adressé par vidéo au Parlement belge, nouvel arrêt d’une série d’allocutions devant les parlements occidentaux, en quête de soutien face à l’invasion russe. La paix a beaucoup plus de valeur que les diamants, les accords (économiques) avec la Russie, les bateaux russes dans les ports, le pétrole et le gaz russes, a-t-il lancé devant l’assemblée.

Le Parlement a acueilli ce jeudi après-midi, par visioconférence, le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Son intervention était précédée d’un discours introductif de Mme Tillieux qui a précisé que la Belgique accueillait, « pour la première fois au Parlement belge, le président d’un pays en guerre ». Des représentants de l’ambassade d’Ukraine à Bruxelles sont présents dans la salle, de même que les membres du Sénat, les ministres-présidents des Communautés et des Régions, ainsi que les présidents des parlements des entités fédérées.

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La séance de la Chambre a débuté par une introduction par la présidente Eliane Tillieux: « Monsieur le président Zelensky, bienvenue », a-t-elle entamé en le remerciant pour sa présence, quelques mots en ukrainien à l’appui, et condamnant « avec la plus grande fermeté » l’invasion russe. « La démocratie ne s’accommode pas de la violence, que ce soit celle des hommes, des régimes politiques ou d’idéologies », a déclaré la présidente de la Chambre Eliane Tillieux.

Zelensky au Parlement belge:
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La présidente de la Chambre a fait référence à la chute du rideau de fer à la fin des années 80. « La politique menée par le dernier président de l’URSS, Mikhail Gorbatchev, avait rendu possible la destruction du mur qui séparait l’Est et l’Ouest. Force est hélas de constater que Vladimir Poutine vient d’ériger en Europe, par la force, un nouveau mur, comme vous l’avez souligné dans votre message à nos collègues du Bundestag allemand. Aujourd’hui, l’Europe est confrontée à une nouvelle dimension de sécurité. Il était vain de croire que toute menace avait disparu avec l’effondrement des blocs. La menace était toujours présente et d’autant plus complexe à appréhender qu’elle s’inscrit dans un cadre régional, et non plus strictement national. Face à ces incertitudes, l’Europe devra contribuer davantage à la sécurité, à la stabilité et aux équilibres mondiaux. Ceci passe notamment par une défense européenne davantage intégrée dans le cadre d’une alliance atlantique plus indispensable que jamais », a-t-elle souligné.

« La taille d’un pays n’a jamais empêché de relever de grands défis. Depuis plusieurs semaines, la Belgique accueille des ukrainiens qui n’ont pas d’autre choix que de fuir votre patrie. De nombreuses personnes se mobilisent. » La présidente de la Chambre a également partagé l’émotion belge, notamment par rapport à la situation des enfants ukrainiens ou encore l’état dramatique de la ville de Marioupol. Deux musiciennes polonaises ont ensuite joué l’hymne ukrainien, devant une assemblée debout.

Zelensky: « Je pense que la paix a plus de valeur que les diamants »

C’est ensuite le président ukrainien lui-même qui a pris la parole devant le Parlement belge. Il a appelé les Européens à faire preuve du même courage que les défenseurs de Marioupol et d’autres villes d’Ukraine assiégées par les Russes. »Cela fait 8 ans que l’Ukraine est en guerre, 36 jours depuis que la Russie nous a envahi. Peu de personnes pensaient que nous tiendrions, mais nous avons tenu, en défendant notre liberté. Au Sud du pays, 80% de la ville de Marioupol a été détruite, des milliers de personnes sont mortes. Cela fait plus de 4 semaines que la ville est bloquée. Les accès sont bloqués, il n’y a pas d’eau, de nourriture, de médicaments… rien de ce qui est nécessaire pour la survie. Et malgré cela, Marioupol résiste. Chaque jour, nous essayons de faire notre possible pour pouvoir évacuer ceux qui restent. Nous y arrivons partiellement. C’est l’un des endroits les plus horribles en Europe, un enfer sur Terre », faisant une référence à la bataille d’Ypres.

Il a répété ses demandes d’instaurer une zone d’exclusion aérienne au-dessus de son pays et de faire rentrer l’Ukraine dans l’Union européenne. « Les Européens n’ont pas suffisamment de courage pour fermer l’espace aérien. Les Ukrainiens combattent pour la sécurité de toutes les villes européennes. Ici, on lutte contre la tyrannie, qui veut diviser l’Europe, détruire ceux pour qui la liberté importe. Mais il y a ceux pour qui les diamants russes, parfois vendus à Anvers, sont plus importants, pour qui accepter les revenus des bateaux russes dans les ports est plus important que notre lutte ». Il indique également le besoin d’armement: « Nos militaires ont le droit d’obtenir cette aide, ils en sont dignes.« 

Apparaissant dans la chemise kaki qu’il arbore depuis l’assaut russe du 24 février dernier, Zelensky a aussi remercié la Belgique pour les armes fournies et l’accueil des réfugiés d’Ukraine. « Nous sommes reconnaissants pour votre soutien. Vous étiez un des premiers pays à nous donner de l’aide, notamment militaire. Vous êtes au coeur de l’Europe, vous pouvez devenir un exemple, pour faire plus, pour nous aider à faire reculer les russes et faire revenir la paix. Et je pense que la paix a plus de valeur que les diamants, que les accords commerciaux, le pétrole et le gaz. Aidez-nous: les armements, les sanctions, la possibilité d’intégré l’UE… Nous vous le rendrons très vite », a-t-il conclu, suivi de très longs applaudissements de l’audience.

Zelensky au Parlement belge:
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De Croo: « Nous formons une seule et même famille européenne »

« Nous sommes à vos côtés, et nous resterons à vos côtés », a répondu le Premier ministre Alexander De Croo dans un discours en réponse à celui du président ukrainien. « Nous continuerons à vous soutenir tant que c’est nécessaire, tant que votre pays est assailli. Nous sommes appelés à choisir un camp. La Belgique l’a fait et elle continuera à le faire. Un soutien politique, en infligeant des coûts économiques élevés à la Russie. Un soutien diplomatique, en isolant ce pays. Un soutien militaire et humanitaire, en accueillant les personnes qui fuient les missiles et les bombes russes. » Il précise que de nouvelles aides de la Belgique sont en route.

Il a cependant justifié l’absence de réponse à la demande ukrainienne d’instaurer une zone d’exclusion aérienne : « Je comprends votre frustration. (…) Disons-le sans détour: cela signifierait abattre des avions russes et enclencher ainsi une escalade qui pourrait faire basculer toute l’Europe. Il y aurait encore plus de victimes, la guerre s’étendrait et nous éloignerait d’autant plus d’une solution. L’OTAN n’est pas partie prenante à ce conflit. Et elle ne doit pas le devenir. »

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« Nous formons une seule et même famille européenne, vous partagez nos valeurs de liberté, de démocratie, de progrès… L’Europe ferait une erreur si elle attendait l’adhésion à l’UE, qui est un processus long. Nous devons mettre en place une solution plus rapide et plus directe, pour grandir ensemble. Une intégration économique accélérée de l’Ukraine et de l’Europe. Mais nous devons également donner le droit aux Ukrainiens de devenir pleinement européens », a-t-il plaidé.

« Les Belges admirent votre courage et votre sang-froid. Nous admirons votre dignité face à tant d’inhumanité », a-t-il conclu en finissant par quelques mots en ukrainien, lui aussi largement applaudi.

Le tour des parlements en quête de soutien

Ce jeudi matin, le président ukrainien avait demandé aux Pays-Bas d’être prêts à boycotter l’énergie russe. « Soyez prêts à arrêter les exportations d’énergie en provenance de Russie pour ne pas payer des milliards pour la guerre », a-t-il dit lors d’une intervention en visioconférence. Lors de son discours, il a par ailleurs demandé des sanctions « plus fortes » et « l’arrêt de tout commerce » avec la Russie.

Ces dernières semaines, le président ukrainien s’est déjà adressé à plusieurs parlements, notamment les parlements italien, français, danois et allemand, le Parlement européen et le Congrès américain. Il s’exprime chaque fois en visioconférence dans sa langue (traduite en simultané) et apparaissant en chef de guerre assis devant le drapeau de son pays.Volodymyr Zelensky appelle au soutien des États membres de l’OTAN et de l’UE depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine. L’Occident a déjà imposé de lourdes sanctions au Kremlin et envoie également des armes et de l’aide humanitaire à l’Ukraine. Il n’est cependant pas question d’une zone d’exclusion aérienne, ce que M. Zelensky réclame depuis des semaines.

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