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Uyttendaele: « Pour prévenir un retour de l’épidémie, c’est le bordel institutionnel »

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Marc Uyttendaele, professeur de droit constitutionnel à l’ULB, explique pourquoi il est impossible de prendre en ce moment des mesures coercitives pour imposer la quarantaine ou les tests au retour des vacances.

Les Belges qui reviennent de vacances depuis une zone à risque, où l’épidémie de coronvirus repart à la hausse, devront idéalement se mettre en quarantaine et se faire tester. C’est que préconisait le Risk Management Group, lundi soir. C’est ce que le ministre flamand Wouter Beke (CD&V) exprimait et ce que le ministre-président wallon Elio Di Rupo (PS) préconise à son tour ce mardi. En réalité, à part compter sur le civisme des citoyens, tous sont en réalité bien démunis: il est impossible de contraindre les Belges d’agir en ce sens.

« Le grand problème, c’est que le gouvernement Wilmès ne dispose plus de pouvoirs spéciaux, explique Marc Uyttendaele, professeur de droit constitutionnel à l’ULB. Pour prendre des mesures potentiellement attentatoires aux libertés, il faudrait au minimum un acte législatif. »

La question se pose alors de savoir qui est compétent, entre le fédéral et les entités fédérées. « C’est la quadrature du cercle,poursuit Marc Uyttendaele. On considère qu’en cas de pandémie aiguë, les compétences résiduelles dépendent du fédéral. Mais si ce n’est pas le cas, cela concerne la prévention à la santé qui est une mesure communautaire transférée à la Région en Wallonie. »

Traduction: au moment où nous parlons, en ce 7 juillet, alors que l’épidémie a moins de vigueur, ce serait aux entités fédérées d’agir. Mais il leur est impossible de prendre d’éventuelles mesures vigoureuses qui s’imposeraient. De même, théoriquement, d’éventuels contrôles aux frontières des gens revenant de vacances, par exemple, devrait être effectués par des agents assermentés par les autorités ayant pris la décision.

De qui s’agit-il? Accrochez-vous. En Wallonie, ce serait à la Région. En Flandre, la Communauté (qui est fusionnée à la Région, ce qui règle tout).A Bruxelles, la Commission communautaire commune, qui réunit Flamands et francophones pour les compétences communauaires et est seule à même de s’dresser à tous les citoyens, contrairement à la Cocof ou à la Cocon. Ouf…

Bien sûr, un dialogue est toujours possible au sein du Comité de concertation, qui réunit le gouvernement fédéral et les enttités fédérées, mais on sait combien cela s’avère souent compliqué.

« Ce que cette affaire démontre, c’est que c’est en réalité le grand bordel institutionnel, regrette le professeur de droit constitutionnel. Il est manifeste que le découpage en dentelle des compétences en matière de santé avait du sens quand il a été décidé pour apporter des réponses concrètes à des problèmes concrets. Mais tout cela a explosé avec la crise que nous venons de traverser. »

Cela nécessiterait, estime-t-il, que l’on remette de l’ordre à l’occasion d’une discussion franche sur l’avenir de l’Etat.

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