La statue de Léopold II située sur la place du Trône © BELGA IMAGE

Un groupe de travail à Bruxelles pour la difficile question de la décolonisation de l’espace public

Une large majorité des député(e)s bruxellois(e)s de la commission des Affaires générales s’est prononcée lundi en faveur d’une résolution visant à entamer la décolonisation de l’espace public dans le cadre d’un large travail de dialogue et de mémoire. Cette démarche sera étroitement liée au travail d’un groupe de pilotage constitué d’académiques et de membres du réseau associatif lié à la diversité.

Dans ce contexte, le secrétaire d’Etat bruxellois en charge du Patrimoine et de l’Urbanisme, Pascal Smet (one.brussels/spa) a annoncé lundi, de son côté, le lancement par urban.brussels d’un appel à candidatures pour « le groupe de travail sur la décolonisation des espaces publics à Bruxelles », dont il avait souhaité la mise en place, il y a quelques semaines.

Au parlement, la résolution a été introduite par les partis de la majorité (PS – Ecolo – Défi – Groen – Open VLD – one.brussels) auxquels se sont joints le CD&V, le cdH, le PTB et la députée indépendante Victoria Austraet. Ensemble, ces formations plaident pour que l’espace public bruxellois fasse l’objet d’un travail d’analyse critique et d’adaptation visant à le rendre plus inclusif.

Le groupe de pilotage sera chargé de faire un inventaire et de formuler des propositions concrètes et sans exclusive à propos de la place et du traitement des vestiges coloniaux à Bruxelles (contextualisation, muséification, créations artistiques etc) et de réfléchir à comment prendre en considération les enjeux décoloniaux de façon permanente dans les décisions politiques à l’avenir.

Les partis signataires plaident aussi pour que des noms de rues, de lieux, de bâtiments et d’infrastructures publiques soient donnés à des personnages ayant résisté à la colonisation et à des militant(e)s des droits humains. La résolution insiste ainsi en particulier pour que soient mises en avant des figures féminines, rendues peu visibles jusqu’ici, « alors qu’elles ont joué et jouent toujours un rôle important pendant et parfois après la période coloniale ».

Le MR regrette le flou entourant les objectifs poursuivis

Le texte a été approuvé au sein de la commission Affaires générales par 11 voix pour, 1 voix contre (N-VA) et 2 abstentions (MR).

Pour les libéraux francophones, Gaëtan Van Goidenshoven a regretté le flou entourant les objectifs poursuivis, en particulier sur le sort réservé aux monuments. Le député a répété qu’aux yeux du MR, la possibilité, évoquée par certains, de déboulonner certaines statues ou de retirer de l’espace public les éléments iconographiques liés au passé colonial, ne peut être accueillie favorablement.

De plus, le texte de la majorité appelle également à la création d’un groupe de travail bruxellois, alors qu’un autre groupe de travail commence seulement à être mis en place au niveau fédéral. Pour quoi dédoubler les moyens et rendre le risque d’être confronté à différentes versions du passé colonial entre entités fédérées, se demande Gaëtan Van Goidsenhoven.

« Ce ne sont pas aux politiques d’écrire l’Histoire mais bien aux historiens », a-t-il conclu, rappelant que le MR est défavorable au déboulonnage des statues, et à leur déplacement vers des musées.

Il est par contre favorable à un travail de contextualisation des statues déjà présentes à travers l’ajout de plaques explicatives, de plaques mémorielles et de QR codes ainsi qu’à l’enseignement de l’histoire de la colonisation dès l’école secondaire.

Plusieurs actions aux niveaux fédéral et régional

Le secrétaire d’État Pascal Smet avait annoncé récemment qu’il allait soumettre au gouvernement bruxellois une proposition visant à créer un groupe de travail sur la décolonisation des espaces publics à Bruxelles. Etant donné que plusieurs actions sont entreprises tant au niveau fédéral que régional, le groupe de travail pour lequel un appel à candidatures a été lancé « tiendra également compte des conclusions soumises à ces commissions » a dit M. Smet.

Ce groupe de travail de dix à vingt membres aura pour tâche de rédiger un rapport intermédiaire et de le présenter au gouvernement bruxellois avant la fin de 2020. Ce rapport sera suivi en 2021 d’un rapport final qui devrait proposer des mesures concrètes et un plan d’action pouvant être mis en oeuvre à court et à long terme.

Selon le secrétaire d’Etat, les candidat(e)s doivent être en mesure de faire preuve de leurs connaissances et de leur expertise dans les différents domaines pertinents pour le groupe de travail au moyen d’une lettre de motivation et d’un curriculum vitae. Comme, entre autres, la diaspora burundaise, congolaise et rwandaise, le patrimoine, le passé colonial, la décolonisation, les études scientifiques sur le sujet, etc.

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