Sophie Wilmès a été désignée formatrice... en respectant les règles de distanciation avec le roi. © Belga

Un gouvernement Wilmès II renforcé pour une lutte à mort contre le coronavirus. Avec confinement généralisé?

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Il dispose de pouvoirs spéciaux pour six mois avec le soutien extérieur de sept partis. Un budget d’un milliard débloqué. L’unité nationale déjà fragilisée par la N-VA. Vers des mesures renforcées en Belgique à partir de mercredi?

Il y a un peu plus d’un mois, Sophie Wilmès était considérée comme une Première ministre de transition, faible à la tête d’un gouvernement minoritaire en affaires courantes. On la décrivait discrète. A partir de ce lundi, la libérale francophone de Rhode-Saint-Genèse, propulsée au gouvernement par Charles Michel alors qu’elle était inconnue, va se retrouver pour les six prochains mois à la tête d’un gouvernement aux pouvoirs spéciaux pur lutter contre le coronavirus.

Le gouvernement Wilmès II devrait prêter serment ce lundi, a précisé ce matin le vice-Premier ministre Open VLD Alexander De Croo, avant un vote de confiance à la Chambre, sans doute jeudi. Il sera composé des mêmes ministres et des mêmes partis que l’actuel gouvernement minoritaire (MR, CD&V et Open VLD), mais il sera soutenu de l’extérieur par sept partis : PS, SP.A, Ecolo, Groen, CDH, DéFI et, normalement, la N-VA. « Il y avait un impératif de continuité, a insisté ce matin Georges-Louis Bouchez, président du MR. Garder la Première ministre, la ministre de la Santé, le ministre de l’Intérieur, d’où le choix de maintenir le gouvernement en place. » Ce fut aussi l’analyse ce week-end du président du PS, Paul Magnette, lors du long round de négociations qui a mené à cette issue.

Mission accomplie pour les missionnaires royaux, Patrick Dewael (Open VLD, président de la Chambre) et Sabine Laruelle (MR, présidente du Sénat). Tous deux se sont rendus au palais vers 10h avec cette bonne nouvelle pour le roi, avant que la Première ministre Sophie Wilmès ne soit elle-même reçue en audience pour être désignée formatrice de cet exécutif à mettre rapidement en place. Ce sera bel et bien un gouvernement de plein exercice, insiste le président du MR. Même si cette solution est transitoire et fragile. Et même si, bien sûr, le plus difficile commence : la lutte qui s’annonce terrible contre le coronavirus. Sans oublier son impact économique.

Un budget d’un milliard

Après une réunion au parlement entre le gouvernement et les présidents des partis qui le soutiennent, il a été décidé de voter rapidement le budget ainsi qu’un fonds d’un milliard d’euros pour lutter contre le coronavirus, a annoncé Kristof Calvo (Groen). Le vote est déjà prévu cet après-midi en commission parlementaire. « Ce n’est qu’un début, mais c’est un signal fort de cohésion et de collaboration », souligne le chef de file écologiste flamand. « S’il devait apparaître par la suite que le milliard d’euros est insuffisant, nous pourrons bien entendu encore augmenter le montant, en accord avec le Parlement, souligne le ministre du Budget, David Clarinval (MR). Mais au moins, le gouvernement disposera immédiatement des moyens financiers dont il aura besoin pour assurer la protection de la santé de nos habitants, ainsi que pour aider les secteurs et travailleurs impactés par les mesures importantes mais nécessaires déjà décidées. »

Selon Le Soir, une réunion est prévue à 17h entre le kern et les représentants des sept partis qui ont décidé de soutenir le gouvernement minoritaire dans la lutte contre le coronavirus. But: définir les contours des pouvoirs spéciaux octroyés à l’exécutif, ainsi la méthode de travail pour les prochaines semaines

Une unité nationale fragile

https://twitter.com/aruyssen/status/1239437316650938368Arnaud Ruyssenhttps://twitter.com/aruyssen

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Ce gouvernement Wilmès aux pouvoirs spéciaux a en effet les coudées franches pour mener à bien la lutte, avec une capitaine renforcée et une coopération avec les entités fédérées au sein du Conseil national de sécurité. PS, Ecolo, N-VA et DéFi sont donc associés à ce titre-là aussi aux décisions les plus importantes. Mais la gestion ne sera guère aisée pour autant. « Curieux de voir comment le soutien extérieur des sept autres partis va se dérouler, interroge toutefois le politologue Dave Sinardet (VUB) sur Twitter. Dans un gouvernement porté par dix partis, des différences idéologiques apparaîtront rapidement. Parce que la gestion des conséquences socio-économiques de la crise ne sera pas seulement une affaire d’expertise, mais supposera aussi des choix difficiles. »

L’unité nationale se fissure d’ailleurs, déjà. Bart De Wever, président de la N-VA, se multiplie en interviews pour dénoncer l’absence de volonté du PS de mettre en place un véritable gouvernement de plein exercice. « Nous sommes face à une crise énorme, la plus grave du siècle, qui sera sans doute suivie d’une récession. Dans n’importe quel pays normal, les deux plus grands partis seraient montés dans un gouvernement, avec deux fois cinq ministres mais le PS n’a pas osé et Ecolo et le cdH l’ont suivi. »

Le vote de confiance, qui doit avoir lieu jeudi à la Chambre pour faire entériner ce gouvernement, ne serait d’ailleurs pas acquis. La N-VA et le SP.A, estiment ne pas être engagées à voter la confiance. Voilà ce que disent des sources au Soir et au Standaard: « Nous avons donné notre accord sur les pouvoirs spéciaux, ce qui nous parait logique vu que le parlement risque de ne plus pouvoir se réunir à cause du virus. Mais nous ne nous sommes pas engagés à voter la confiance ». Dans ce cas, nous serions dans une situation singulière avec un gouvernement en affaires courantes disposant de pouvoirs spéciaux. « Je suis formel, tous les partis ont donné leur accord », rétorque Georges-Louis Bouchez (MR) au Soir.

Vers un confinement généralisé?

Le président de la N-VA, toujours lui, fait de la surenchère en appellant à un couvre-feu le soir à partir de 22h et l’interdiction de rassemblements à partir de dix personnes. Comme en France, où le président Emmanuel Macron s’exprime ce soir à 20h, il n’est pas exclu que des mesures plus coercitives soient prises chez nous dans les prochains jours.

En France, selon Le Figaro, on s’oriente ce soir vers un confinement à l’italienne, avec des mesures de surveillance, et par ailleurs un report du second tour des élections municipales au 21 juin. Chez nous, L’Echo s’interroge sur la possibilité d’un confinement généralisé et il semble inéluctable que l’on s’oriente rapidement vers un passage à la phase 3 de gestion de la crise. Certaines sources évoquent une entrée en vigueur de ce confinement renforcé à partir de mercredi matin.

Dans une carte blanche publiée ce lundi matin sur notre site, Etienne et Marc Decroly, virologiste et médecin SAMU, tiraient la sonnette d’alarme au sujet de l’évolution de l’épidémie: il faut absolument respecter les mesures de confinement!

La photo qui fait le buzz

Le président de la N-VA déplore de n’avoir encore vu aucun texte définisssant la situation et regrette la « joepijeesfeer » qui aurait prévalu ce week-end après la conclusion de l’accord. Une photo prise dans les coulisses fait le buzz sur les réseaux sociaux: on y voit les présidents du MR et de l’Open VLD, Georges-Louis Bouchez et Gwendolyn Rutten, accolés pour un selfie, tandis que le présidente de Groen, Meryem Almaci, semble crier ‘victoire’ en arrière-plan.

https://twitter.com/GeertNoels/status/1239442754268270592Geert Noelshttps://twitter.com/GeertNoels

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Gwendolyn Rutten a tenu à s’excuser sur les réseaux sociaux: « Il est peut-être inhabituel mais bien nécessaire de dire qu’il y a parfois des choses erronnées, écrit-elle. Que les politiques, comme les autres personnes, font aussi des erreurs, même si ce n’est pas intentionnel.Je ne suis certainement pas une exception. Et mon mari non plus (Ndlr -actif dans l’horeca, il a organisé une « coronaparty »). Il y a beaucoup à dire au sujet de la photo partagée par mon collègue président Bouchez sur les réseaux sociaux. C’est malheureux. Nous aurions dû tenir davantage de distance, mes excuses pour cela. Les politiques doivent donner le bon exemple. Il y avait évidemment de la satisfaction après que nous ayons trouver une bonne solution pour le pays. La politique fait ce qu’elle doit faire: se réunir. Mais même là, il faut faire attenttion. »

Georges-Louis Bouchez n’est pas exactement dans le même registre. En réponse à une inernaute, il écrit: « Sur les 4 derniers jours, j’ai pris bien plus de risques via ces négociations. Vous avez vu le nombre de journalistes à l’entrée de la Chambre ou la table de négociations à laquelle j’étais distant de quelques centimètres de mes collègues ? Il fallait négocier ce #begov … »

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