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Un canon historique ? « La Flandre est avant tout un carrefour d’influences »

Walter Pauli
Walter Pauli Walter Pauli est journaliste au Knack.

Qu’est-ce que la Flandre ? Un petit point sur la carte du monde, à peine 0,009 % de la surface de la Terre. Professeure d’histoire à la KuLeuven, Leen Van Molle se demande : « Pourquoi et comment faut-il construire un canon? »

Le canon alternatif : alors que le gouvernement Jambon prépare un canon flamand, nos confrères de Knack ont décidé de ne pas s’attarder aux points d’ancrage bien connus. Quels sont les faits et les événements inconnus, mais indispensables pour ceux qui veulent vraiment connaître l’histoire de la Flandre ?

La Flandre est un carrefour, c’est l’essentiel. Le Carrefour des Quatre Bras est situé au centre du pays, presque symboliquement à la frontière de la Flandre et de Bruxelles. Quatre-Bras, c’est aussi le nom du hameau du Brabant wallon où s’est déroulée en 1815, deux jours avant Waterloo, la première bataille contre Napoléon, avec des troupes britanniques, hollandaises et prussiennes, et cela aussi est symbolique. Les grandes puissances ont alors redessiné la carte, créant les tensions dont la Belgique est issue. Et les tensions en Belgique ont créé la Flandre.

Qu’est-ce que la Flandre alors ? Une langue ? Non, elle la partage avec les Pays-Bas. Une ethnie ? Plutôt un mélange génétique, un lieu de fuite (au 19e siècle, même en masse, vers la Wallonie, la France et l’Amérique), un refuge pour les réfugiés politiques et religieux (attirés par les libertés constitutionnelles) et une zone d’immigration (surtout depuis la Seconde Guerre mondiale). Une nation ? Peut-être, mais entrecoupé de bouffées de francophilie chez certains, de sympathies hollandaises chez d’autres ou encore d’une dose de collaboration pro-allemande. Une conviction philosophique ou politique ? Non, c’est un mélange d’idées et d’idéaux. Au 19e siècle, un arrière-pays économique étiqueté pauvre, paysan et papiste. Au 20e siècle une région de croissance économique, mais sur les vagues du marché mondial. Autonome, oui, mais sous les ailes de la Belgique, de l’Union européenne, de l’OTAN, et une série d’accords intergouvernementaux.

Une nature flamande ? La nature n’a pas de frontières et le geai (NDLT : Vlaamse gaai en néerlandais) n’est pas flamand. Une culture alors ? Les polyphonistes, les primitifs et les impressionnistes flamands n’étaient pas aussi clairement flamands que leur nom ne le suggère, et les humanistes sillonnaient l’Europe. Et du côté des femmes ? La première femme médecin de Belgique, Isala Van Diest, était originaire de Louvain, mais a obtenu son diplôme en Suisse (en 1879). Et les bien-aimées boulettes à la sauce tomate doivent leur sauce aux Espagnols qui ont apporté la tomate d’Amérique centrale, avant qu’elle ne trouve lentement son chemin vers nos tables.

La Flandre est donc avant tout un carrefour d’influences venant des quatre points cardinaux, les Quatre Bras, le résultat d’un processus lent et complexe, de nombreux compromis, d’une grande flexibilité et d’une grande diversité. Qui sont précisément son identité et sa force.

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