Gérald Papy

Tentative d’attentat : mieux vaut trop de vigilance que pas assez

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

La Commission européenne visée par une attaque islamiste ? Le contexte justifie une surveillance accrue. Pas de psychose. Mais la Belgique est exposée

Tout projet d’attentat, s’il a été déjoué et est révélé, suscite désormais son lot d’interrogations avec, en filigrane, le soupçon que les services de sécurité l’instrumentalise ou le surévalue à des fins internes ou politiques. La tentative d’attentat contre la Commission européenne à Bruxelles n’échappe pas à cette règle; c’est le jeu de la démocratie. Peu d’informations ont filtré sur le cadre de l’attaque déjouée : l’arrestation de deux personnes au début du mois d’août, un couple de ressortissants turcs venus des Pays-Bas, un appartement à Bruxelles, des explosifs « prêts à l’emploi », des contacts présumés avec des membres de l’organisation dissoute Sharia4Belgium à Malines et à Courtrai…Les informations sont parcellaires; ce qui peut accroître le sentiment d’incrédulité. Mais il n’est pas non plus illégitime que les services concernés voient la nécessité de garder un certain secret sur un dossier, ne fût-ce que pour les besoins de l’enquête.

Tout projet d’attentat, s’il a été déjoué, suscite désormais son lot d’interrogations avec, en filigrane, le soupçon que les services de sécurité l’instrumentalise

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Les relations entre citoyens et services de sécurité dépendent donc du climat de confiance qui s’établit entre eux. Et en l’occurrence, une suspicion maladive serait malvenue. Car que nous dit le contexte dans lequel est révélée cette tentative d’attentat ? 1. La Belgique est un des pays européens qui, proportionnellement, fournit le plus grand nombre de djihadistes européens en Syrie et en Irak. 2. Ce phénomène pose automatiquement la question du retour programmé de ces miliciens enrôlés pour la plupart dans le plus extrémiste des groupes, l’Etat islamique, et de leur réinsertion dans notre société. 3. L’attentat contre le Musée juif de Belgique à Bruxelles a démontré qu’une attaque spectaculaire était réalisable avec relativement peu de moyens. 4. Bruxelles, en tant que siège d’institutions comme l’OTAN et l’Union européenne ou de grandes sociétés américaines, est potentiellement une cible de choix, pour les islamistes radicaux.

Quand la rébellion syrienne a pris une forte connotation islamiste, les pays européens ont sous-estimé l’influence qu’elle prendrait dans le combat contre Bachar al-Assad, l’extrémisme et le danger de déstabilisation régionale qu’elle portait en germe et la menace qu’elle représenterait, dans un effet boomerang, pour la sécurité et la cohésion sociale en Europe. Le procès des membres de l’organisation dissoute Sharia4Belgium, qui s’ouvre le 29 septembre à Anvers, devrait notamment mettre en exergue les lacunes de l’anti-terrorisme à cette époque. Faute d’avoir entravé les départs de volontaires belges parallèlement à la montée du djihadisme armé en Syrie, les autorités sont contraintes aujourd’hui de resserrer la surveillance des milieux concernés et de renforcer la prévention de projets terroristes. En vertu de cette menace, réelle, on ne peut pas leur reprocher de faire preuve de trop de vigilance, si le droit et les libertés publiques sont respectés.

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