Michèle Hirsch

Ségrégation des enfants métis: appel interjeté et audition devant la commission spéciale

Le Vif

Cinq femmes victimes de la ségrégation des enfants métis au Congo ont interjeté appel contre un jugement rendu en décembre dernier par le tribunal civil de Bruxelles, qui a rejeté leur plainte contre l’État belge pour crime contre l’humanité.

Durant les débats, les avocats de l’État belge avaient contesté la demande estimant qu’il y a prescription, mais la commission spéciale du Parlement chargée d’examiner le passé colonial belge a souhaité entendre l’une des avocates de ces cinq femmes, Me Michèle Hirsch, au sujet précisément des réparations. Cette audition aura lieu lundi après-midi à 13h30.

Le dossier judiciaire a été introduit devant la cour d’appel de Bruxelles, qui doit désormais déterminer un calendrier d’échange de conclusions avant de fixer une date d’audience. Dans le même temps, l’affaire intéresse la commission spéciale chargée d’examiner le passé colonial de la Belgique et ses conséquences. Elle a sollicité l’audition de l’avocate Michèle Hirsch sur la question des compensations, des réparations et de la réconciliation. L’avocate avait plaidé, devant le tribunal, une condamnation de l’État belge à verser des indemnités à ses clientes pour avoir été responsable du système de ségrégation des enfants métis, mis en place au Congo durant la période où ce vaste pays d’Afrique était une colonie belge.

   En décembre dernier, le tribunal civil de Bruxelles a estimé que cette ségrégation n’était pas incriminée en tant que crime contre l’humanité durant la période où la Belgique avait la tutelle de ce pays. Il a également établi, qu’en tout état de cause, l’affaire, visant une faute de l’État belge déduite d’une violation des droits fondamentaux, est prescrite. Il a ainsi déclaré non fondée l’action des cinq plaignantes.

   Celles-ci, nées au Congo entre 1946 et 1950, avaient déposé plainte contre l’État belge pour crime contre l’humanité et avaient introduit une action en responsabilité civile devant le tribunal civil de Bruxelles. Elles réclamaient des dommages et intérêts pour l’important préjudice causé, mais aussi la production d’archives concernant leurs origines et leur histoire.

   Nées de l’union d’un Belge et d’une Congolaise, durant la période où le Congo était colonie belge, elles ont été arrachées à leur foyer pour être placées dans des orphelinats, comme de nombreux autres enfants métis. Selon des documents officiels issus des archives coloniales, fournis par les avocats des plaignantes, des rapts d’enfants métis ont été organisés par des officiers de l’État belge et mis en œuvre avec le concours de l’Église.

   Les fonctionnaires de l’État colonisateur recevaient des instructions pour organiser les enlèvements des enfants issus d’une union mixte, en contraignant les mères à se séparer d’eux. Les enfants étaient placés dans des missions catholiques qui se trouvaient sur le territoire du Congo belge. Dès leur plus jeune âge – certains avaient entre deux et quatre ans -, les métis furent ainsi arrachés à leur mère et à leur village natal par le recours à la force, aux menaces ou à des manœuvres trompeuses alors que ces enfants n’étaient ni abandonnés ni délaissés, ni orphelins, ni trouvés.

   En 2018, Charles Michel, alors Premier ministre, avait présenté ses excuses au nom de l’État belge pour la ségrégation des enfants métis au Congo, au Rwanda et au Burundi. Mais pour les plaignantes, cela ne suffit pas.

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