Un avis de recherche en France, à l'époque des attentats

Salah Abdeslam purgera-t-il sa peine en Belgique ou en France ?

Noé Spies
Noé Spies Journaliste au Vif

Déjà condamné en Belgique et devant comparaître cet automne à Bruxelles, Salah Abdeslam a donc été condamné en France à la perpétuité incompressible. Mais purgera-t-il sa peine en Belgique ou en France ?

C’est une sanction rarissime: mercredi soir, Salah Abdeslam a été condamné à la prison à perpétuité incompressible. Ce qui ne signifie pas forcément qu’il restera toute sa vie en prison, mais qu’il y restera au moins 30 ans.

Mais où exécutera-t-il sa peine, exactement ? Car puisqu’il a déjà été condamné en Belgique et qu’il va comparaître cet automne à Bruxelles pour les attentats commis dans la capitale en 2019, cette question se présentera naturellement. Pour Dan Kaminski, expert en fonctionnement du système pénal (UCLouvain), le contexte est quelque peu particulier. « Il n’y a pas de règles convenues à l’international pour ce genre de situation. Cela peut faire l’objet de négociations entre les instances judiciaires des deux pays et peut-être également entre les ministres de la Justice. Ce sont, à mon sens, des négociations au cas par cas. »

« Une chose est certaine, quelle que soit la peine qui soit infligée à Salah Abdeslam en Belgique, elle sera probablement absorbée par la peine qu’il a reçue en France. »

Dan Kaminski

« Une chose est certaine, quelle que soit la peine qui soit infligée à Salah Abdeslam en Belgique, elle sera probablement absorbée par la peine qu’il a reçue en France. Car la peine belge ne pourra être que plus réduite, car la notion d’incompressible n’existe pas en Belgique.« 

« Tendance à penser que la France va garder Salah Abdeslam »

Dans ces négociations entre la France et la Belgique, quels facteurs pourraient intervenir ? Des considérations de régime pénitentiaire, d’une part. « Un pays pourrait dire à l’autre: ‘Nous avons un régime plus solide que le vôtre’ », illustre Dan Kaminski. Et d’ajouter : « De la même façon, on pourrait imaginer des enjeux symboliques. Est-ce que dans un pays, on pourrait s’émouvoir que l’exécution de la peine puisse se passer dans l’autre pays, comme si on perdait le contrôle sur l’ennemi ? Il pourrait également y avoir des considérations financières. La France pourrait par exemple se dire que le coût de la détention d’Abdeslam pourrait lui revenir cher. Car le coût de la détention est évidemment important. J’ai du mal à imaginer qu’on fasse exécuter en Belgique une peine qui n’existe pas. J’aurais donc tendance à penser que la France va conserver Salah Abdeslam. Il s’agirait là d’un motif juridique.

Par ailleurs, au vu de la condamnation française, on pourrait se demander à quoi « sert » le procès de Bruxelles pour Abdeslam. Pour l’expert, il convient de raisonner autrement. « Un procès ne sert pas uniquement à exécuter une peine. Même lorsqu’un procès conclut à l’acquittement, il rend d’autres services. C’est un espace de discussions, de construction, dans lequel les parties civiles et les autorités judiciaires sont amenées à collaborer. Cela produit des effets d’apaisement et de métabolisation qui peuvent être indépendants de la peine infligée. Les effets du procès en lui-même, indépendamment de la peine, sont importants. »

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