Mandela lokondo

Réfugiés: une politique à court terme, mais après ?

Mandela lokondo Étudiant en 2e master 'information et communication' à l'Université Libre de Bruxelles.

Les vagues de migrants en effraient certains, en émotionnent d’autres. Un tel bouleversement démographique divise, forcément, mais ne doit pas nous empêcher d’envisager l’après.

D’aucuns ne veulent pas de réfugiés, s’insurgent contre leur venue et vitupèrent sans retenue. Nous avons l’exemple de la Hongrie de Viktor Orban, hostile à cet afflux, qui édifie une clôture aux portes de la Serbie. En face, beaucoup font état de solidarité, de commisération, d’abnégation. De toute part, les gestes d’ouverture et de mansuétude vont des plus modestes aux plus farfelus: l’Allemagne, par le truchement de ses dirigeants et même de ses clubs de football, offre des refuges et lève des fonds. Naguib Sawiris, homme d’affaires égyptien fortuné, se dit désireux d’acheter une île en Méditerranée pour recevoir les réfugiés. Et, on ne compte plus les dons en vêtements et victuailles…

Réfugiés: les solutions à court terme pullulent. Mais qu’en est-il de la vision à long terme ?

Les solutions à court terme pullulent et servent. Mais qu’en est-il de la vision à long terme ? Comment penser l’après ?

Soit les réfugiés restent soit ils repartent. Dès lors, ne conviendrait-il pas de considérer ces deux situations afin de s’organiser au mieux ?

Si les zones à risque connaissent une accalmie, et que ces centaines de milliers d’hommes et de femmes ont la possibilité de rentrer chez eux en toute sécurité, les questions de l’après, précédemment mises en exergue n’auraient pas lieu d’être posées. Rappelons au passage, à ceux qui l’ignoreraient, qui auraient une mémoire défaillante ou qui feindraient de ne pas connaître notre histoire, qu’un scénario identique s’est produit sur le Vieux Continent au début de la Seconde Guerre mondiale, notamment avec ces deux millions de Belges qui firent exode vers la France pour ensuite regagner le royaume quelques mois plus tard.

Si, au contraire, la situation de guerre s’éternise, obligeant les Irakiens, Syriens, Afghans, Érythréens, etc. à tirer un trait définitif sur leur foyer d’origine et à s’installer durablement dans les pays d’accueil, il conviendra de penser et de mettre en place une série de mesures favorables au bon fonctionnement de cette éventuelle nouvelle société hybride. Que ce soit par oubli naïf ou par contournement volontaire, les enjeux socio-économiques, culturels, religieux, les thèmes de l’intégration et du vivre-ensemble ressurgiront sans aucun doute au moment où il sera déjà trop tard, à l’instant où la communauté connaîtra une division irréversible. Du moins, c’est ce qu’il adviendra si l’anticipation de ces possibilités n’est pas d’ores et déjà à l’ordre du jour de nos dirigeants.

L’urgence migratoire à laquelle la Belgique est soumise aujourd’hui surpasse celle des années soixante. En effet, l’année 1964 fut celle où notre pays signa une convention avec le Maroc et la Turquie pour officialiser l’envoi de travailleurs. Bien que préparée et organisée au moment de la signature de cette convention, la Belgique n’a pas toujours su gérer la suite de cette immigration, reléguant, involontairement, les enfants des générations suivantes aux classes sociales les moins favorisées. De ce fait, comment pourra-t-elle éviter de commettre les mêmes erreurs dans cette précipitation, dans ce présent prégnant et égocentrique, dans un contexte d’arrivée de rescapés de la mort non préparé et non organisé ?

Les politiques et les acteurs « courtermistes » prennent-ils le temps de considérer l’avenir dans le cas de cette seconde option ? Le défi de la bonne gestion de l’accueil de ces réfugiés est grand, les enjeux qui en découlent le sont davantage.

Notre époque, celle des réseaux sociaux criards, des chaînes d’informations en continu, des médias traditionnels glosant, des déclarations politiques permanentes, nous engonce dans un désordre inextricable. Si l’individu lambda est asphyxié, imaginons ce que les têtes pensantes au sommet des États européens doivent subir. Réunions, prises de décisions, conférences de presse se multiplient. L’ébullition est permanente. L’arrivée des migrants est constante. Il faut agir ici et maintenant, et ils le font. Cette actualité se révèle contraignante, pesante. Les marges de manoeuvres pour y faire face avec dextérité apparaissent courtes. Le présent nous oblige à le regarder droit dans les yeux et nous pouvons le concevoir au regard de la conjoncture, de l’état d’urgence.

L’effervescence des semaines écoulées et des jours à venir pèse et compte. Faut-il pour autant que le brouhaha actuel nous empêche de réfléchir au surlendemain ?

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