© Image Globe

RDC : Reynders à la rencontre d’un Kabila isolé

Isolé sur la scène internationale, privé de plusieurs piliers de son régime, le président congolais a tout intérêt à se rapprocher de Bruxelles.

Didier Reynders s’envole aujourd’hui pour Kinshasa. Le Congo n’est pas tout à fait une terra incognita pour le chef de la diplomatie belge. Il y avait séjourné le week-end de la Pentecôte 2006, juste avant la précédente campagne électorale, et avait été reçu par Joseph Kabila à Lubumbashi en compagnie d’Armand De Decker, alors en charge de la Coopération.

« Ce sont les deux seuls jours de ma vie que j’ai passés au Congo, rappelle Reynders. L’ambiance entre les candidats était celle d’une guerre civile. » Alors ministre des Finances, il n’était pas venu au Katanga les mains vides : il avait annulé 10 % de la dette d’Etat du Congo à l’égard de la Belgique. Un geste destiné à encourager la stabilité du pays en vue du scrutin présidentiel.

Près de six ans ont passé. Kabila a été réélu à l’issue d’un scrutin émaillé d’irrégularités et la fraude a été encore plus flagrante lors des législatives. « Elle a même dépassé les instructions du pouvoir central, glisse une source belge à Kinshasa : les gouverneurs et les échelons inférieurs, dans les provinces, ont fait de l’excès de zèle, et pas seulement au Katanga. Dans certaines régions, faute de résultats crédibles, les partis se sont arbitrairement répartis les parts du gâteau ! »

Pourtant, Reynders a estimé que les « déficiences » électorales n’étaient « pas de nature à remettre en cause l’ordre des résultats » à la présidentielle. Il avait même envisagé, en décembre dernier, de se rendre au Congo afin d’assister à la prestation de serment du « raïs ». Ce voyage « a été annulé de justesse, sous la pression de Londres et Paris », affirment Peter Luyckx et Karl Vanlouwe, deux parlementaires N-VA, observateurs lors des élections.

Le ministre des Affaires étrangères a finalement reconnu, ce mois-ci, que « la légitimité des scrutins a été sérieusement mise en cause » et que « des fraudes ont été commises à l’issue de la fermeture des bureaux. » Le ministre propose qu’à l’avenir les missions d’observateurs internationaux se prolongent après le vote pour contrôler le dépouillement et la compilation des résultats. Reste à voir si la Belgique, appelée à participer au financement des élections provinciales et locales en RDC – aucune décision en ce sens n’a encore été prise -, aura des exigences fortes de transparence et de régularité.

Le président Kabila a, pour sa part, tout intérêt à jouer le carte « belge ». « Il est complètement isolé sur la scène internationale, constate le député CDH Georges Dallemagne. Le seul chef d’Etat à s’être déplacé à Kinshasa pour la prestation de serment de Kabila est l’infréquentable Robert Mugabe, président du Zimbabwe. Le président congolais est en outre affaibli par la perte de plusieurs piliers du régime. » Certains ont été désavoués par l’électeur. D’autres ont perdu la vie ou ont été grièvement blessés lors du crash du jet Katanga Express près de Bukavu, au Sud-Kivu. Parmi les disparus : Augustin Katumba Mwanke, l’éminence grise, l’homme des contrats passés avec la Chine, la Corée du Sud, le Brésil, l’Afrique du Sud… Sous l’influence de Katumba, le régime s’était détourné des Européens.

Olivier Rogeau

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire