Carte blanche

Quand « accueil » rime avec « porte close » !

Le Gouvernement a décidé de fermer, d’ici fin 2016, 10 000 places d’accueil pour les demandeurs d’asile. Les 8 centres régionaux pour l’intégration (CRI) et le CIRÉ ne peuvent rester silencieux face à pareille décision !

Les demandeurs d’asile et les réfugiés ne sont pas des « accessoires automobiles » que l’on gère comme des stocks, pas plus que les travailleurs sociaux qui les encadrent ne sont des « kleenex » que l’on jette après usage. La décision du Gouvernement de fermer 10 000 places d’accueil pour demandeurs d’asile démontre à elle seule aussi bien la méconnaissance, voire le mépris, du travail social dans son ensemble, que la dévalorisation du sens même de l’accueil et l’hypothèque fondamentale que cela fait peser sur l’intégration à court, moyen et long terme de ces populations.

En effet, les conséquences de cette décision seront multiples. Pour les réfugiés, elle entrainera une précipitation de leur sortie des centres d’accueil pour se retrouver sur le marché saturé et discriminant du logement. Elle provoquera des déplacements de demandeurs d’asile d’un centre vers un autre, avec des effets négatifs sur les acquis en termes de réseau, d’insertion et d’apprentissage de la langue. Quant aux travailleurs sociaux, les fermetures de places sont synonymes, pour eux, de suppressions d’emploi et d’éventuelles délocalisations.

Pour le Gouvernement, les réfugiés et les travailleurs sociaux qui s’en occupent ne sont que des vulgaires stocks de marchandise dont on gère le flux

Bref, ceci démontre que pour le Gouvernement, les réfugiés, les demandeurs d’asile et les travailleurs sociaux qui s’en occupent ne sont que des vulgaires stocks de marchandise dont on gère le flux. Aucun lien n’est fait entre accueil et inclusion sociale… Et pourtant c’est bien de cela dont il est question : l’accueil d’aujourd’hui conditionne l’intégration de demain.

De plus, ceci intervient dans un contexte international où les mouvements migratoires ne sont évidemment pas à l’arrêt. Les places d’accueil « libres » ou « vides » en Belgique sont la conséquence de la fermeture honteuse et meurtrière des frontières européennes.

Qui peut croire que cette situation est définitivement figée ?

Il doit être clairement entendu que cette décision s’ajoute à une campagne de mesures de dissuasion organisée de longue date par le Secrétaire d’État à l’asile et à la migration (visites dans les « pays à risque », page Facebook, courriers de dissuasion envoyés aux demandeurs d’asile…) et sous-entend un sens très particulier de l’accueil qui pourrait se résumer ainsi : « Amis migrants, soyez les bienvenus… surtout ailleurs ».

C’est à dessein que cette politique de gestion de stocks est organisée, mettant à mal l’intégration même des réfugiés. Et ce seront probablement les mêmes qui crieront bientôt haut et fort que « l’intégration est un échec » et que tous les dangers et ennuis viennent des populations étrangères, de ces fameux « migrants » qu’il faut éviter de « nourrir » de peur qu’ils ne s’installent durablement.

Les CRI et le CIRÉ s’indignent de cette gestion chaotique de l’accueil des demandeurs d’asile et de ses répercussions sur les travailleurs sociaux. Une autre politique d’accueil, en lien plus étroit avec les acteurs de l’intégration et avec une vision à long terme est tout à fait réalisable et souhaitable.

Notre vision de l’inclusion sociale ne comporte ni cynisme, ni a priori, ni angélisme. Cependant, nous considérons, à l’appui de dizaines d’études, qu’au-delà de ce que réclame notre devoir de solidarité, les apports des populations étrangères à nos sociétés européennes sont indispensables. Nous demandons à ce que les politiques d’accueil soient concertées avec le secteur de l’intégration et les réseaux locaux d’inclusion, dans le respect des demandeurs d’asile, des réfugiés, des associations et des travailleurs sociaux qui les encadrent.

Thierry Tournoy, directeur du CRIC / Président du DSCRI

Daniel Martin, directeur du CRVI

Benoite Dessicy, directrice du CAI

Régis Simon, directeur du CRIPEL

Michline Liebin, directrice du CERAIC

Piera Micciche, directrice du CIMB

Nicolas Contor, directeur du CRILUX

Patrick Monjoie, directeur du CRIBW

Malou Gay, co-directrice, Coordination et initiatives pour réfugiés et étrangers (CIRÉ)

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