Pascal Baurain et André Gilles © Belga

Publifin: « On peut après coup juger que c’était trop élevé (…) mais la loi était imprécise »

Le président du holding financier public Publifin, le député provincial André Gilles (PS), pointé du doigt ces dernières semaines pour sa responsabilité présumée dans le scandale des rémunérations de mandataires publics, a défendu vendredi la structure du groupe liégeois, rappelant que toutes les décisions stratégiques avaient toujours été le fruit d’un large consensus politique.

Brossant l’historique de la construction du groupe, il a insisté sur le fait que les fusions et absorptions successives avaient amené à une réduction drastique du nombre de mandats d’administrateurs.

Le Sérésien de 52 ans, déjà président de l’intercommunale liégeoise d’électricité (ALE/Teledis) en 1990, avant qu’elle ne devienne Tecteo puis Publifin, a rappelé que son groupe avait toujours sauvegardé l’emploi et les centres de décision à Liège, là où des concurrents féroces délocalisent.

Il a dressé des parallèles entre la structure de son groupe et d’autres entreprises détenues par les pouvoirs publics, comme la FN ou la Sonaca, et rappelé que, le costume de l’intercommunale étant devenu inadapté aux réalités de marché, il avait fallu le faire évoluer.

« Cette nouvelle structuration du groupe l’a été selon un large consensus politique, exposé aux décideurs politiques wallons, notamment au travers des décrets » passés devant le parlement wallon, a souligné M. Gilles.

« En une dizaine d’années, la petite ALE s’est transformée en un acteur économique majeur et en un groupe diversifié », s’est-il félicité. Il a défendu le modèle qui fait profiter les secteurs déficitaires des bénéfices d’autres secteurs. « Comme toute société qui se développe, on réserve une part de ses bénéfices pour investir. » Et dans des secteurs très concurrentiels, pour conserver l’emploi et le rendement, « il y a deux solutions: soit sortir des frontières territoriales pour décrocher de nouvelles parts de marché, soit organiser la diversification, nous avons combiné ces deux solutions, de sorte que les associés, communes et provinces, ont d’excellents rendements sur investissements. »

Des comités de secteurs, « parce qu’on nous l’imposait »

Le président de Publifin André Gilles a par ailleurs affirmé que l’installation des comités de secteur à l’origine du scandale des rémunérations de mandataires publics avait été organisée « parce qu’on nous l’imposait » de la part des intercommunales cessionnaires de leurs activités lors des opérations d’absorption du groupe.

Ces comités de secteur, organes purement consultatifs chez Publifin, ont permis à des mandataires locaux de toucher d’importantes rémunérations fixes sans obligation de prester.

Leur transposition dans Publifin répondait à une « nécessité éprouvée par les intercommunales cessionnaires de leurs activités, qui exigeaient une continuité » de leur pouvoir de vérification, a commenté M. Gilles (PS).

« Je suis le premier à critiquer le manque d’assiduité de certains, pas tous, car d’autres ont participé (aux réunions) On l’a organisé parce qu’on nous l’imposait. Et quand on nous l’a imposé, on a dit qu’on terminerait ça à l’issue des élections (locales), en 2013 ». Les comités de secteur se sont toutefois prolongés, notamment grâce à un vote du parlement wallon en 2015.

Les émoluments qui y ont été versés n’ont pas été décidés « n’importe comment », mais « en regard des articles du Code de la démocratie locale », bien que Publifin n’y était pas soumis à ce moment, a assuré M. Gilles.

« On peut après coup juger que c’était trop élevé et qu’on aurait dû lier ça à la présence, mais la loi était imprécise », a balayé André Gilles. Il s’est référé au rapport de l’administration qui a conclu de la même manière il y a peu.

Et de rappeler que lorsque le scandale Publifin a éclaté, le parlement wallon a immédiatement réduit ces émoluments aux seuls jetons de présence, tandis que Publifin décidait, le lendemain, de supprimer les comités de secteur sans attendre l’échéance légale de juillet 2017.

« Chacun a son éthique »

Quant aux rémunérations des administrateurs et gérants du groupe, M. Gilles a refusé de les détailler, renvoyant à l’enveloppe globale consultable à la Banque nationale. Il a défendu la nécessité de préserver les talents dans des secteurs concurrentiels.

Mais « on peut encore concevoir » qu’un homme politique – et M. Gilles de citer le CEO de Nethys Stéphane Moreau – « peut se flageller et être considéré comme différent » par rapport à d’autres membres du management qui ne sont pas des politiques, pour des raisons éthiques.

Faire une telle différence serait toutefois « injuste » aux yeux d’André Gilles, car « le travail est fait comme il est fait par d’autres membres du management, à même intensité d’intelligence, de créativité ».

« Chacun a son éthique », avait glissé peu auparavant M. Gilles.

C’est le Comité de nomination et de rémunérations de Nethys qui établit le montant des rémunérations des administrateurs et gérants, a indiqué M. Gilles, l’information étant uniquement communiquée au CA de Nethys. Ces rémunérations ont été établies à la suite d’un benchmarking réalisé en juin 2012 par deux cabinets internationaux, Hays et McKinsey.

André Gilles a rappelé les nombreuses réformes qu’il proposera pour améliorer la gouvernance du groupe après le scandale.

La commission se poursuivait en soirée, des députés demandant comment les responsables de Publifin n’avaient pas compris le caractère excessif des rémunérations au regard de l’absence d’obligation de prester.

André Gilles avait été sollicité par la commission spéciale pour dresser un tableau du groupe Publifin/Nethys.

Contenu partenaire