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Opération Calice: Les faits sont prescrits selon le parquet fédéral

L’ensemble des faits visés par l’Opération Calice, l’enquête du parquet fédéral chargée de faire la lumière sur des faits d’abus sexuels présumés commis au sein du clergé et la tentative d’étouffement de ces affaires par la hiérarchie catholique, sont prescrits et plus personne ne peut être poursuivi, selon le point de vue que défendra le parquet fédéral dans son réquisitoire final devant la chambre du conseil de Bruxelles. Cette dernière doit se pencher sur l’affaire le 28 avril prochain.

Le parquet demande ainsi de constater l’extinction de l’action publique étant donné la condamnation antérieure de 4 prévenus pour les faits dénoncés, les décès de 37 suspects et la prescription de presque tous les autres faits. En ce qui concerne les accusations d’abstention coupable, le parquet constate de même que les faits concernés sont manifestement prescrits.

L’Opération Calice avait débuté en juin 2010 par de spectaculaires perquisitions menées au siège de l’archevêché à Malines, à la cathédrale Saint-Rombaut, au domicile privé du cardinal Danneels, au siège de la commission dirigée par le pédopsychiatre Peter Adriaenssens, qui se penchait alors sur les faits de pédophilie au sein de l’Eglise, ainsi qu’aux Archives générales du Royaume.

L’enquête était alors entre les mains du parquet de Bruxelles et du juge d’instruction Wim De Troy et tant l’avocat de l’archevêché que du cardinal Danneels, Me Fernand Keuleneer, que le parquet général de Bruxelles avaient contesté la légalité de ces perquisitions. Les perquisitions menées au siège de la commission Adriaenssens, chez le cardinal Danneels ainsi qu’à l’archevêché ont finalement été déclarées nulles par la chambre des mises en accusation, alors que celles menées aux Archives générales du Royaume et à la cathédrale Saint-Rombaut étaient jugées légales, les pièces saisies devant pour leur part être écartées du dossier.

L’Opération Calice avait entretemps été reprise par le parquet fédéral, qui s’était vu attribuer un rôle de coordination depuis septembre 2010, et le juge d’instruction Wim De Troy s’était retrouvé à enquêter sur des faits d’abstention coupable. Le parquet est dès lors intervenu dans 619 dossiers et a servi de point de contact central pour les 27 parquets locaux impliqués. Le magistrat du parquet fédéral a eu contact avec 261 victimes.

Le 8 mars 2011, l’instruction Calice a été fédéralisée. Entre les mois d’août 2010 et décembre 2012, 83 plaintes avec constitution de partie civile ont été déposées. Au printemps 2012, une série de perquisitions ont été exécutées dans tous les évêchés, et ce même après le remplacement du juge De Troy par la juge Calewaert en mars de la même année. Quelques mois plus tard, en octobre, la disparition de 445 pièces du dossier était constatée mais l’enquête avait pu se poursuivre après leur remplacement par des copies.

La juge Calewaert a bouclé son instruction en septembre 2014. Un an et demi plus tard, le réquisitoire dans lequel le parquet fédéral estime que les faits sont prescrits est prêt. La chambre du conseil de Bruxelles doit se pencher maintenant sur le dossier.

Le parquet précise qu’il s’agit d’un point de vue technico-juridique de nature pénale, non d’une réponse à des questions de nature civile, éthique ou déontologique. Seul le volet de l’enquête portant sur une personne résidant actuellement au Brésil, est encore en cours. Le parquet fédéral décidera ultérieurement, lorsque cette partie de l’enquête sera terminée, s’il existe des éléments suffisants pour demander un renvoi devant le tribunal correctionnel.

Me Fernand Keulenner, l’avocat de l’archevêché et du cardinal Danneels, n’a pas désiré faire de commentaire pour l’instant.

Me Walter Van Steenbrugge, avocat de plusieurs victimes, n’est lui pas du tout satisfait du point de vue du parquet fédéral et que des éléments de son réquisitoire se retrouvent dans la presse. Il déplore que celui-ci communique avant le moment où il est censé le faire, ce qu’il qualifie d' »inacceptable » et constate que ce n’est que maintenant que les victimes ont accès à l’entièreté du dossier, qui est très volumineux, selon lui.

Cet avocat rappelle qu’il reviendra finalement à la chambre du conseil de se prononcer et qu’il y a cinq ans, le ministère public avait déjà essayé d’enterrer ce dossier en toute discrétion via la chambre des mises en accusation. Il craint à présent que l’histoire se répète.

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