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« Les médias peuvent contribuer à inverser le sentiment de peur et de malaise en relayant des nouvelles positives »

Stefanie Van den Broeck Journaliste Knack

Une avalanche en France, un attentat de l’EI, une bévue politique… Les raisons ne manquent pas de se sentir moroses. Mais regarder le JT nous rend-il vraiment malheureux ? Et si oui, vaut-il mieux ne pas regarder?

« Les médias ne s’intéressent absolument pas au progrès, ou à l’évolution de l’esprit humain. C’est presque toujours négatif, sarcastique et non constructif. Les infos dévorent les gens et les détruisent. » Il y a quelques années, le philosophe britannique Alain de Botton déclarait déjà que les journaux, les magazines, la radio et la télévision nous submergent de mauvaises nouvelles.

L’explication est même évolutionnaire, déclare le psychologue social Alain Van Hiel (Université de Gand). « Une étude révèle que les gens retiennent beaucoup plus facilement les mauvaises nouvelles que les bonnes. Même si nous n’en voyons qu’un éclair, nous sommes plus marqués par le négatif. En outre, on s’attarde plus longtemps aux mauvaises nouvelles. C’est probablement logique. Si les nouvelles sont positives, cela signifie que tout va bien et nous ne sommes plus attentifs. »

Cependant, les mauvaises nouvelles exigent immédiatement notre attention. Et à l’époque de la préhistoire, c’était encore plus pressant. Van Hiel : »Il fallait voir immédiatement le mammouth ou les flammes jaillissantes, ou on n’était plus là pour en parler. »

Si nous n’avons plus rien à craindre des mammouths, il faut évidemment redouter les incendies, les attentats et la guerre, ce qui ne nous rend pas heureux. « Il me semble exagéré de dire que cela nous rendrait dépressifs », nuance Van Hiel. « Il y a plusieurs facteurs en jeu. Mais les mauvaises nouvelles peuvent absolument attiser les sentiments d’angoisse et de malheur. »

La solution semble simple: ignorez l’actualité. « Cela produirait l’effet inverse. Celui qui n’est au courant de rien se sent plus impuissant et malheureux, car s’informer mène aux connaissances. Et celui qui a les connaissances, comprend mieux le monde et va croire qu’il peut faire la différence. En votant ou en manifestant, par exemple. En mettant sa tête dans le sable, on perd les connaissances, l’intelligence et le pouvoir. À moins de le faire consciemment, comme forme de protestation : ‘La coupe est pleine, je ne veux plus rien à voir avec ce monde.’ C’est aussi une forme de pouvoir, évidemment. Mais ces gens-là courent de toute façon moins de risques de faire une dépression. »

Pour Alain Van Hiel, les médias doivent prendre leurs responsabilités. « L’hypothèse veut que le cynisme grandissant soit dû en grande partie aux journalistes. Ces derniers éprouvent un intérêt disproportionnel pour les jeux politiques et les intrigues alors que la plupart des citoyens s’intéressent plutôt aux décisions de fond. Les médias peuvent contribuer à inverser ce sentiment d’angoisse et de malaise en relayant également des nouvelles positives aussi. »

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