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Le conseil de classe, souverain dans l’obtention du CEB et du CESS ?

Julie Nicosia
Julie Nicosia Journaliste

Après l’annulation des examens, la nouvelle circulaire de la ministre de l’Enseignement, Caroline Désir, aux pouvoirs organisateurs et aux établissements scolaires annonce l’annulation des épreuves certificatives externes (CEB ou CESS). Quelles conséquences sur l’évaluation de fin d’année de l’élève ?

Dans la circulation signée de la main de la ministre d’Éducation, on peut lire « le Gouvernement a décidé de l’annulation des épreuves externes certificatives (NDLR, le CEB ou le CESS). L’octroi du certificat reposera donc sur le jury d’école ou le conseil de classe. » Les modalités n’ont pas encore été spécifiées.

« La décision qu’il fallait prendre »

Faouzia Hariche est Echevine de l’Instruction publique à la Ville de Bruxelles (pouvoir organisateur des écoles de la Ville), et selon elle, l’annulation des épreuves externes certificatives est « la décision qu’il fallait prendre ». Elle explique : « il faut comprendre que les épreuves externes (CEB, CE1D, CESS) sont rédigées par des fonctionnaires qui travaillent à la Fédération Wallonie-Bruxelles sur base du programme imposé. Il aurait été difficile de mettre en place des épreuves certificatives en sachant que les établissements ne voient pas le programme de la même manière et qu’avec la suspension des cours, les écoles ne doivent pas être au même niveau. Par ailleurs, on ne sait pas quand on va rouvrir les écoles. Jusqu’à présent, le mot d’ordre a été de faire des révisions de la matière. »

Le tout pouvoir aux professeurs en conseil de classe ?

Comme les épreuves certificatives externes sont annulées, il revient aux professeurs de décider si oui ou non l’élève a le droit d’obtenir le diplôme certifiant (CEB pour le primaire et CESS pour le secondaire) par le biais d’une évaluation continue du parcours scolaire. D’après Faouzia Hariche, Echevine de l’Enseignement à la Ville de Bruxelles, il s’agit d’une bonne option : « Les enseignants connaissent bien leurs élèves. Dès lors, favoriser une évaluation continue n’est pas une mauvaise chose. Il est préférable de privilégier l’apprentissage de la matière non vue en mai-juin (en fonction des décisions qui seront prises par le Conseil national de sécurité) plutôt que de se concentrer sur des examens. C’est mieux pour l’élève ».

Un instituteur dans l’enseignement fondamental va également dans ce sens : « Il aurait été très difficile d’organiser des examens. Rattraper la matière jusque fin juin est la décision la plus cohérente à prendre afin que les problèmes de matière ne se reportent l’année prochaine. » Il ajoute : « En sachant que le programme de la cinquième et la sixième année est étalé sur deux ans, je pense qu’il faudra prendre en compte les deux années pour réaliser l’évaluation continue la plus juste. Généralement, le conseil de classe prend les décisions les plus justes possible. » Même écho pour une de ses collègues d’une autre école : « Dans notre école, nous avons introduit les bulletins sans points en première et deuxième année primaire. L’objectif est d’éviter la comparaison et se concentrer sur l’apprentissage des compétences via des ateliers. On connaît nos élèves et les résultats du CEB ne reflètent pas ce que l’enfant est capable de faire en classe. L’annulation du CEB ne pose pas de problème. Nous jugerons l’élève via une évaluation continue. »

Du côté du secondaire, c’est plutôt à double tranchant : « Je pense que l’évolution continue va avantager les élèves, surtout dans les matières les plus importantes. Pour certains qui misaient sur la troisième période et les examens, il y a peut-être un risque d’être défavorisé. Imaginons qu’un élève avait déjà 6 ou 7 échecs en deuxième période, on devra le prendre en compte », indique une professeure de mathématiques dans le secondaire. Cependant, « il reste la seconde session (NDLR : qui reste à déterminer). En ce qui concerne les rhétos, c’est plus délicat pour les élèves qui doivent obtenir une diplôme de qualification (comme dans le technique ou le professionnel) que pour les élèves du général. », ajoute-t-elle.

Vers plus de recours ?

À la question de savoir s’il n’y a pas un risque que l’obtention ou non du diplôme soit décidée uniquement en conseil de classe augmentera le nombre de recours, l’édile bruxelloise répond : « je n’ai pas d’inquiétude à ce sujet. Même s’il y avait eu des épreuves externes et qu’elles avaient été ratées, le conseil de classe peut lever cet échec au cas par cas. » « J’ai confiance aux enseignants. Ils motivent leur décision quand il s’agit de faire ou non passer un élève à l’année supérieure. Les enseignants prendront en compte le travail réalisé pendant l’année. Le conseil de classe est toujours plus favorable pour l’élève« , ajoute-t-elle.

Du côté de l’enseignement fondamental, la confiance des parents au jugement des titulaires semble primer : « Je pense que les parents font confiance à l’évaluation réalisée par les titulaires de classe. L’augmentation des recours reste un gros point d’interrogation chez nous. » Mais tout le monde n’est pas du même avis : « Il y aura surement plus de recours concernant le CEB. À l’exception de la sixième primaire, les décisions finales reviennent aux parents pour la réussite des autres années malgré la décision du conseil de classe. Il risque, donc, d’avoir plus de contestations avec le CEB, surtout qu’il s’agit d’un diplôme qui donne accès au secondaire.« , répond un instituteur.

En ce qui concerne le CESS, la certification qui donne l’accès aux études supérieures, « ce ne serait pas un cadeau de donner accès à l’enseignement supérieur surtout dans l’état actuel de la situation », déplore Madame Hariche. Selon l’Echevine bruxelloise, le conseil de classe doit « tenir compte du cas de l’élève et du contexte. Il vaut peut-être mieux doubler sa rhéto que de doubler sa première supérieure ». Pour une professeure de mathématiques dans le secondaire, « les recours devront toujours être justifiés. »

« Nous sommes dans un État de droit et les personnes qui souhaitent réaliser un recours ont la possibilité de le faire en le motivant. C’est un organisme externe qui regroupe d’autres pouvoirs organisateurs qui traite le dossier en toute impartialité », conclut la responsable de l’Instruction publique de la Ville de Bruxelles.

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