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La Cour des comptes s’interroge sur la neutralité de la réforme de l’impôt des sociétés

La Cour des comptes a épinglé dans son rapport sur le budget 2018 la façon dont avaient été calculées les conséquences de la réforme de l’impôt des sociétés pour les finances publiques. Elle juge à ce titre « faible » la marge de sécurité de 208,1 millions d’euros constituée par le gouvernement pour l’an prochain et s’interroge sur la neutralité budgétaire de l’opération.

La réforme de l’Isoc, pièce maîtresse de l’accord budgétaire de l’été, prévoit une diminution des taux d’imposition compensée par des mesures élargissant la base imposable. L’effet d’un telle réforme est difficile à évaluer, reconnaît la Cour, car il dépend du caractère cyclique des entreprises et de leur comportement parfois imprévisible. Or, l’opération est censée être neutre pour le budget.

D’après le SPF Finances, l’objectif sera atteint et un léger excédent est même prévu de 2018 à 2020. La Cour est beaucoup plus réservée. Les calculs d’incidence ne prêtent pas suffisamment attention aux facteurs incertains « dont la répercussion sur la base imposable peut mettre en cause la neutralité budgétaire ». Aux yeux de la Cour, une partie des données utilisées sont « obsolètes » et se fondent sur des « situations dépassées », remontant à 2015, parfois à 2012.

« Considérant l’ampleur de cette réforme, la Cour des comptes recommande d’actualiser le calcul sur la base des données de l’exercice d’imposition 2016 actuellement disponibles », conclut-elle. A propos d’autres mesures, la Cour épingle un manque de transparence car elles sont réparties dans différentes rubriques du budget. Le renforcement de la taxe « Caïman » sur les constructions juridiques à l’étranger, censée rapporter 50 millions de plus des 460 millions déjà annoncés, est impossible à évaluer. « Aucun chiffre n’est disponible quant à la recette actuelle de l’impôt », note le rapport.

La Cour souligne aussi la « difficulté » d’estimer la taxe sur les comptes-titres à partir de 500.000 euros, pierre angulaire de l’accord budgétaire. Le gouvernement s’appuie sur une base imposable de 169 milliards d’euros mais les estimations de la Banque nationale et de Febelfin divergent et aucune information précise n’est disponible sur certains éléments. Il est difficile aussi de chiffrer l’effet des changements de comportement, notamment pour faire passer la valeur imposable du compte en-dessous de 500.000 euros. La mesure est censée rapporter 254 millions.

La Cour des comptes envoie le gouvernement en seconde session, selon Ecolo-Groen

Le rapport de la Cour des comptes sur le budget 2018 équivaut à une « seconde session » pour le gouvernement, estime le député Kristof Calvo (Ecolo-Groen). « La Cour se plaint d’un manque total de transparence et confirme que l’on a bricolé pour conclure l’accord de l’été », a-t-il dit.

Le député écologiste vise notamment les remarques formulées à propos de la réforme de l’impôt des sociétés. « La Cour dit que l’impact de la réforme doit être recalculé et doute qu’elle soit neutre budgétairement », a-t-il souligné.

« Ni surprise, ni désaveu » pour Sophie Wilmès

La ministre du Budget, la MR Sophie Wilmès, a estimé vendredi soir que le rapport de la Cour des comptes à propos du budget 2018 composé par le fédéral ne comporte « ni surprise, ni désaveu ». « Le Gouvernement prendra en considération ces observations », assure-t-elle, « particulièrement en ce qui concerne la neutralité budgétaire de la réforme de l’impôt des sociétés qui est soumise à l’analyse de la BNB et dont nous attendons les conclusions ».

« L’opposition semble encline à répéter ses erreurs du passé, en utilisant de façon abusive ce rapport pour faire croire que le budget est établi sur du sable », note encore amèrement la ministre. Du côté d’Ecolo-Groen, notamment, Kristof Calvo avait indiqué plus tôt dans la soirée que le rapport de la Cour des comptes équivaut à une « seconde session » pour le gouvernement, qui aurait donc raté son examen en « bricolant » pour conclure un accord accusé de manquer de transparence.

La Cour des comptes a en effet épinglé dans son rapport une des pièces maitresses de l’accord d’été, la réforme de l’Isoc. La Cour s’interroge notamment sur la manière dont les conséquences de cette réforme ont été calculées, entre autres l’aspect neutre budgétairement de l’opération.

« A l’heure actuelle, on voit bien que les dernières projections 2017 confortent plus que jamais l’approche du Gouvernement », estime quant à elle Sophie Wilmès.

La Cour des comptes confirme l’amélioration du budget, selon Van Overtveldt

Le ministre des Finances, Johan Van Overtveldt, voit des nouvelles encourageantes dans le rapport de la Cour des comptes à propos du budget 2018. « La Cour des comptes confirme les chiffres meilleurs de la croissance économique, l’amélioration du budget et la diminution engagée du niveau de la dette », a-t-il indiqué dans un bref communiqué.

La Cour relève par ailleurs à propos de la réforme de l’impôt des sociétés que les calculs n’intègrent pas d’éventuels effets retour positifs et tiennent compte d’un marge de sécurité, souligne le ministre qui rappelle qu’une analyse de la Banque nationale est attendue prochainement. Le rapport sera présenté la semaine prochaine en commission des Finances de la Chambre.

Le PS pointe du bricolage budgétaire

Le rapport rendu par la Cour des comptes sur le budget 2018 confirme les craintes formulées depuis 2014: le gouvernement fédéral se livre à du « bricolage budgétaire », estime le PS.

« Le bricolage se confirme d’année en année. Le gouvernement est entré dans une forme d’insouciance alarmante. On semble sacrifier sur l’autel de la communication d’après conclave la justesse des chiffres. Le résultat, c’est un budget en trompe-l’oeil », estime le chef de groupe à la Chambre, Ahmed Laaouej. Le député pointe du doigt l’analyse de la Cour sur les mesures antérieures du gouvernement, le calcul de la réforme de l’impôt des sociétés censé être neutre budgétairement ou encore des mesures annoncées pour 2018 mais qui sortiront en fait leurs effets à partir de 2019, soit la fin de la législature actuelle et le début de la suivante

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