Mohamed Abrini lors du procès des attentats de Bruxelles.

La cavale de Mohamed Abrini reconstituée au procès des attentats de Bruxelles

La cavale de l’accusé Mohamed Abrini dans les heures et jours suivants les attentats du 22 mars 2016 a été retracée mercredi après-midi devant la cour d’assises par un enquêteur de la DR3, l’unité anti-terroriste de la police judiciaire fédérale. Après avoir abandonné sa bombe à l’aéroport de Zaventem, renonçant à se faire exploser, « l’homme au chapeau » passera par une planque à Laeken, avant de, selon lui, errer comme SDF durant plusieurs jours dans la capitale et de se faire arrêter le 8 avril 2016.

Le 22 mars, juste après l’explosion de la première bombe à Brussels Airport, Mohamed Abrini abandonne son chariot sur lequel se trouve une autre charge explosive. Il sait qu’une 2e explosion, celle déclenchée par Najim Laachraoui, est imminente. Il se bouche les oreilles.

   Aussitôt après la détonation, il prend la fuite en courant et sort du terminal. « Je ne pensais qu’à partir, pas à désamorcer la bombe », dira-t-il aux enquêteurs. A 7h59, il commence son périple à pied et fuit vers Bruxelles. Sa trace sera perdue près du Jardin Botanique dans le centre de la capitale. Selon les enquêteurs, l’accusé aurait marché durant 2h16 entre les deux endroits.

   Sur son chemin de fuite, Mohamed Abrini explique s’être débarrassé de sa veste, de son chapeau, d’une carte SIM et de la batterie de son GSM dans différentes poubelles. Aperçu sur des images de plusieurs caméras de surveillance en train de téléphoner, il dira que c’était pour faire semblant. Aucun raccordement téléphonique le concernant n’a pu être mis en évidence, selon les enquêteurs, et aucun téléphone lui appartenant n’a d’ailleurs été retrouvé. Lui-même affirmera ne plus en avoir depuis la mi-novembre 2015. Il disposera cependant d’un GSM le jour des attentats.

   Le 22 mars, « l’homme au chapeau » se réfugie rue du Tivoli, à Laeken, au domicile de l’accusé Hervé Bayingana Muhirwa, où il sera rejoint par l’accusé Osama Krayem, qui a renoncé à se faire exploser dans le métro. Il y arrive vers 12H30-13h et demande à Hervé Bayingana Muhirwa de l’héberger, ce que ce dernier accepte. Dans un premier temps, il n’informe pas son hôte qu’il a participé aux attentats. Il dira aux enquêteurs: « Je vois dans son visage qu’il a peur ».

   Toujours le 22 mars, Mohamed Abrini demandera à Hervé Bayingana Muhirwa d’aller lui acheter des vêtements, ce que ce dernier acceptera également.

   Après 2-3 jours passés rue du Tivoli, l’accusé explique avoir quitté les lieux, trop exigus à son goût, et commencé sa « vie de SDF ». Il raconte être passé de bar en bar et avoir dormi dans le parc de Forest.

   Après avoir dormi en rue du 25 au 31 mars, Mohamed Abrini affirme s’être installé chez une femme rencontrée dans un café à Anderlecht. Se faisant passer pour un certain Bilal, il y serait resté de 5 à 7 jours, jusqu’au 7 avril, veille de son arrestation, en échange d’argent. La femme confirmera l’avoir accueilli, mais pour une durée de deux jours, juste avant l’arrestation de l’accusé.

   Durant cette période précédant son arrestation, « l’homme au chapeau » est également passé le 3 avril, entre 2H25 et 2h32, par la planque de l’avenue des Casernes, dont il avait récupéré les clés et le badge d’accès via Osama Krayem lorsqu’ils se trouvaient ensemble rue du Tivoli. Il a essayé d’y trouver refuge mais a constaté que la porte avait été endommagée. Sans doute par Smail Farisi, qui a sous-loué le logement aux terroristes et a essayé de remplacer la serrure de son appartement, ont interprété les enquêteurs. A cette date, la police n’avait en effet pas connaissance de cette planque.

   Les enquêteurs ont toutefois émis des réserves quant aux nuits passées dans un parc étant donné les températures froides la nuit, les précipitations quotidiennes à cette période et l’absence de matériel de camping dans le chef de l’accusé. Pour eux, Mohamed Abrini pourrait être resté plus longtemps chez Hervé Bayingana Muhirwa, jusqu’au jour où il passe par l’avenue des Casernes. Ce n’est qu’ensuite qu’il aurait atterri chez la femme qui l’a hébergé jusqu’à la veille de son arrestation le 8 avril.

   Les enquêteurs pensent par ailleurs que Mohamed Abrini a rencontré son ex-compagne le soir du 31 mars. Cette dernière a raconté avoir été contactée par un individu qui lui a donné rendez-vous à Anderlecht. Arrivée près du lieu, Abrini est entré dans la voiture de son amie. Elle aurait tenté de le convaincre de se rendre à la police, sans succès. « Il était très pensif et peu bavard », aurait-elle déclaré.

   « Pourquoi n’est-il pas retourné à la rue Max Roos (le 22 mars, NDLR)? », a demandé un juré. L’existence de cette planque a très rapidement été connue grâce aux déclarations du chauffeur de taxi, ont répondu les enquêteurs, concédant ne pas avoir interrogé l’accusé sur cette question.

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