Une avenue où l'immobilier professionnel côtoie le marché résidentiel. © Everland

Immobilier à Bruxelles : l’avenue Louise mise sur la mixité

La prestigieuse avenue Louise se partage aujourd’hui entre les logements et les bureaux. Un équilibre inédit à l’échelle de la capitale.

Versée dans le résidentiel à sa création, dès 1850, l’avenue Louise s’est résolument tournée vers les bureaux à compter des années 1960. Maisons et hôtels de maître d’antan ont été démolis par dizaines pour laisser place aux hauts immeubles modernes qu’on lui connaît. Depuis une quinzaine d’années, les logements signent un retour remarqué. Pour preuve, la prestigieuse artère et le quartier alentour qui porte son nom sont repris tant dans les tablettes des courtiers spécialisés en immobilier professionnel que dans celles de leurs confrères actifs sur le marché résidentiel. C’est d’ailleurs cette double identité qui fait la particularité et la richesse de la zone Louise, les quartiers réellement mixtes n’étant pas aussi nombreux qu’on le pense à Bruxelles.

Ce n’est pas la demande qui pose problème, mais plutôt l’offre de qualité.

Il faut voir plusieurs raisons à cette mixité. Géographique d’abord, l’avenue Louise étant proche du quartier européen, comme des quartiers Flagey et du Châtelain. Mais, surtout, historique et urbanistique. Dans la foulée de l’Exposition universelle de 1958 et de la transformation de l’artère en autoroute urbaine, son développement a été régi dès 1970 par un Plan particulier d’affectation du sol (Ppas). Lequel privilégiait la construction de complexes de logements, de bureaux, de commerces et d’hôtels. Les promoteurs ont même bénéficié de l’autorisation d’y élever quatre tours de bureaux, dont trois verront le jour : la Tour Louise (1966), l’IT Tower (1971) et la Blue Tower (1976).

Vide locatif

Abrogé en 2011, le Ppas de 1970 laisse derrière lui une avenue en perte de vitesse, largement acquise aux bureaux dans un contexte où ceux-ci n’ont plus de succès dans la capitale. Vieillissants, étriqués, morcelés au sein de larges copropriétés, mal desservis par les transports en commun, ils peinent à trouver des occupants. Dans le dernier opus de l’Observatoire des bureaux bruxellois, qui comprend un focus sur l’artère, Perspective.brussels évoque un taux de vacance de 18,9 %, contre 7,5 % à l’échelle de la Région. Soit 75 637 m2 vides sur un total de 401 037 m2.  » Le départ annoncé de quelques occupants prestigieux vers des localisations plus centrales ainsi que les nombreuses ventes d’immeubles de bureaux intervenues ces dernières années confirment une certaine désaffection de l’avenue Louise « , indiquent les auteurs de l’étude.

Un constat  » peu engageant  » auquel a tenu à réagir le consultant en immobilier professionnel JLL, après s’être, lui aussi, plongé dans ses chiffres. S’il reconnaît un net recul du nombre de transactions en 2017 (41) et en 2018 (31), après une décennie de stabilité entre 2007 et 2016 (autour de 50 transactions par an), le courtier le justifie par la baisse du stock de mètres carrés immédiatement disponibles. En chute libre depuis plusieurs années, il n’est plus que de 4,75 % (31 497 m2) au troisième trimestre de 2019. Ce n’est donc pas la demande qui pose problème à première vue, mais plutôt l’offre de qualité.

The Hype fait l'objet d'une stratégie de repositionnement depuis 2018.
The Hype fait l’objet d’une stratégie de repositionnement depuis 2018.© Eaglestone

Reconversions en or

Pourtant, les investissements ne manquent pas le long de l’avenue Louise. Mais, pour beaucoup, il s’agit non pas de rénovations d’immeubles de bureaux, mais de reconversions en logements. Perspective.brussels dénombre quinze projets de ce type ayant abouti ces dernières années (48 500 m2). Un chiffre qui est amené à grandir, d’autres projets étant à l’étude.  » On peut clairement parler de nettoyage « , affirme Pierre-Paul Verelst, en charge de la Recherche chez JLL.  » En dix ans, pas loin d’un quart du stock de bureaux du quartier a été reconverti, soit 210 000 m2, dont un cinquième sur l’avenue Louise.  » Avec un effet positif :  » Cela a largement résorbé la problématique de vacance structurelle « , salue-t-il.

Au rang des derniers projets en date figure le Louise 194, mené par le promoteur Goplus. Lancé début 2018, le chantier de 61 appartements se terminera en juin prochain. Un peu plus loin, le Louise 228 est, lui aussi, en travaux. Après le déshabillage de l’immeuble, la construction a commencé. Le promoteur Everland y prévoit 16 appartements et un commerce en pied d’immeuble. A l’arrière, un immeuble neuf sur un terrain acquis rue de Lens se raccroche au projet, fort de neuf appartements destinés à la location. Tous ont été vendus, sauf le commerce et le penthouse du Louise 228, affichés respectivement à 1,3 et 1,95 million d’euros. Des biens résolument haut de gamme, au diapason de leur illustre adresse.

 » Chaque immeuble acquis fait l’objet d’un arbitrage pour décider de sa future affectation « , commente Michael Goldberg, patron de Phicap, le gestionnaire immobilier dont s’est entouré Everland pour son projet. En fonction de la taille des plateaux et de la hauteur sous plafond, mais aussi de la situation du bien sur l’avenue, le logement ou le bureau sera favorisé.  » Mais c’est réellement le calcul de la rentabilité de l’investissement cumulé du prix d’achat et de la rénovation qui tranche. Cela fait trois ans que l’avenue Louise est en surchauffe et les prix auxquels s’échangent les immeubles imposent une grande prudence aux investisseurs « , souligne-t-il.

L’essor du coworking

Loin de tomber dans le tout-au-résidentiel, certains immeubles de bureaux bénéficient d’une rénovation tout en conservant leur affectation. Ainsi, par exemple, du complexe The Hype, au n°250 de l’avenue, qui fait l’objet d’une stratégie de repositionnement depuis 2018 et vient d’être cédé à BNP Paribas Reim France par Eaglestone.  » Les promoteurs ont longtemps été très frileux à l’idée de lancer de nouveaux projets de bureaux car les redéveloppements résidentiels haut de gamme affichent une rentabilité supérieure « , convient Pierre-Paul Verelst. Mais le vent tourne, tel qu’en témoigne l’expert de JLL, qui cite aussi la rénovation en cours de 3 000 m2 de bureaux dans l’IT Tower, propriété d’AG Real Estate.  » D’autres projets suivront d’ici à 2022 avec la rénovation en profondeur de la Tour Louise ainsi que celle de l’immeuble Président (n° 104).  »

Outre ces chantiers d’envergure, le renouveau des bureaux sur l’avenue Louise viendra peut-être aussi de l’essor des espaces de coworking. Présent aux côtés de Regus et Tribes, Silversquare vient d’acquérir 7 000 m2 dans le Platinum (n°235) après avoir étendu de 1 600 m2 ses bureaux du Stéphanie Plaza (n°54).

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